S.V.M.

Volume 2

LES ENSEIGNEMENTS

de l’Apôtre Paul

1936

Éditeur : S. VAN MIERLO

9, Rue Pierre Bertin, 9

VERSAILLES

Chèques postaux - Paris 1774.93

Téléphone : Versailles 29.09

Prix : 10 francs

Ouvrages de M. Ch.-H. WELCH

 

La revue « The Berean Expositor », les livres et les brochures peuvent être obtenus chez Mr F. P. Brininger, 14, Hereford Road, Wanstead, London E 11, Angleterre.

La brochure « La Voie par excellence » et quelques autres imprimés français sont à commander chez Mlle J. Bieth, 44, rue Victor Hugo, Lyon, ou chez Miss F. Thorpe, 21, Victoria Road, West Kirby. Angleterre.

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La revue « Uif de Sehriffen », les livres et les brochures peuvent être obtenus à l'Administration de cette revue : Alexander Gogel weg 24, 'sGravenhage, Nederland ; ou : Jacobstr. 18, Antwerpen, België. Le présent livre peut aussi être obtenu à cette dernière adresse.

 

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S'adresser à l'Administration de « Uif de Schriften », Alexander Gogel weg 24, 'sGravenhage, Nederland.

 

Correspondance

 

Pour toute correspondance au sujet du présent livre s'adresser à M. S. VAN MIERLO, 9, rue Pierre Bertin Versailles.

Lire aussi :

 

LE PLAN DIVIN

ET SA RÉALISATION

Par S. V. M.

 

Ce livre donne un aperçu des âges depuis la création initiale jusqu'à la fin et traite de beaucoup de questions importantes telles que: La création, la chute, les Alliances, la Loi, les prophètes, la mission d'Israël, le Royaume sur terre, la période des Actes, la rejection provisoire d'Israël, le jour du Seigneur, le siècle à venir, la nouvelle création, Dieu tout en tous.

L'ouvrage contient aussi les appendices suivants : « Le corps humain », « Les géants », « Les Lois de la nature et les miracles », « Le premier jour de la semaine) , etc..

 

TABLE DES MATIÈRES

Page

INTRODUCTION ............................................................................ 5

Résumé de notre ouvrage « Le Plan Divin » ................................. 16

PREMIÈRE PARTIE

Pendant la période des Actes

1. Qui est Paul ? ............................................................................... 23

2. Plusieurs Évangiles ..................................................................... 24

3. Le Message du Royaume et de la Nouvelle Naissance ............... 26

4. Le Message du Royaume dans les Épîtres ................................... 33

5. Le Message céleste………………………………………………35

6. Considérations relatives à la Loi ................................................. 38

7. L'Histoire de l'Olivier .................................................................. 45

8. La Justification ............................................................................ 50

9. Les deux Hommes ....................................................................... 54

10. Résumé de la période des Actes ................................................ 58

DEUXIÈME PARTIE

Après les Actes

1. Les quatre Épîtres écrites en Prison ........................................... 62

2. Le Message du Mystère .............................................................. 63

a) Une nouvelle unité .................................................................... 65

b) Un nouveau mystère .................................................................. 67

c) Accès à une nouvelle sphère ...................................................... 69

d) Une nouvelle Église .................................................................. 71

e) Une nouvelle espérance ............................................................. 72

3. Les trois sphères ........................................................................ 73

4. Paul abandonné .......................................................................... 76

5. Le désarroi général au premier siècle ........................................ 80

TROISIÈME PARTIE

Les documents humains des premiers siècles

a) Épître de Barnabas ........................……………………….......… 83

b) La « Doctrine des douze Apôtres » ..........………………...….... 85

c) Les Épîtres de Clément ........................ ....................................... 88

d) Les Épîtres d'Ignace ......................................................................89

e) L'Épître de Polycarpe ....................................................................90

f) Les Livres d'Hermas .......................................................................90

g) Constitutions des Apôtres ..............................................................90

h) Les Pères Apologètes .....................................................................90

i) Eusèbe…………………………………………………. ...............92

CONCLUSION ................................................................................100

APPENDICE 1. - Autre et Différent ..................................................106

APPENDICE 2. - Né de l'Esprit, rempli de l'Esprit,

accompli par l'Esprit .........................................................................109

APPENDICE 3. - Les Épîtres de Paul ...............................................112

APPENDICE 4. - Les Sur Célestes ...................................................115

APPENDICE 5. - L'Église qui est le Corps de Christ

est-elle l'Épouse ?.. ............................................................................121

APPENDICE 6. - Peut-on juger de la valeur d'un message

d'après le nombre de conversions obtenues ?....................................123

APPENDICE 7. - La Pâque et la Messe ............................................127

APPENDICE 8. - La date de la Pâque ...............................................131

APPENDICE 9 . – Quelques considérations éparses relatives à

« l’Église naissante »………………………….............................….133

SCHEMAS ET TABLEAUX

Les Cinq Éons. ....................................................................................23

La Loi. .................................................................................................44

L'Histoire de l'Olivier. .........................................................................49

Les Trois Sphères ................................................................................73

Les éons et les sphères ........................................................................74

Résumé du rituel de la Pâque juive………………………………….129

_________________________

Alençon – Imp. Corbière & Jugain.

 

LES ENSEIGNEMENTS

de l'Apôtre Paul

 

INTRODUCTION

Page  5

 

Alors que notre premier volume, Le Plan Divin a pour but principal de donner un aperçu, général des âges et du rôle du peuple d'Israël, le présent ouvrage traite plus spécialement la période des Actes et de l'intervalle entre cette période et le retour de Christ. Après avoir, dans le premier volume, indiqué les grandes divisions à discerner dans l'histoire de l'humanité, nous examinons ici les grandes divisions à reconnaître dans les messages divins.

Nous croyons que, si le déplorable état actuel du christianisme est avant tout dû à un manque de foi, deux grandes erreurs ont été, d'une manière plus spéciale, la source de la confusion et de la ruine : l'idée que « l'Église » remplace Israël et que ce peuple n'a plus, dès lors, d'avenir comme tel, que cette « Église » commence à la Pentecôte, et que la totalité du N.T. concerne tous les croyants sans distinction. Cette tradition humaine des premiers siècles a conduit d'une part à une usurpation de pouvoir (l'Église de Rome), et d'autre part à une confusion générale (le protestantisme).

Suivons très sommairement quelques étapes de ce développement. On n'a pas cru à l'avenir d'Israël, malgré les affirmations innombrables de la loi et des prophètes. On n'a pas distingué les âges et les dispensations. Quand Israël fut rejeté temporairement à la fin des Actes, on a donc cru qu'une autre unité visible devait remplacer ce peuple, et l'on est arrivé petit à petit à lui approprier le rôle qu'Israël aura sur terre pendant l'âge prochain. C'est la base de l'Église romaine avec tous ses abus. Mais le fait qu'un tel ordre de choses n'est pas scripturaire conduit nécessairement à la corruption. De là une réaction de ceux qui tiennent aux Écritures ; et la Réforme fait un effort pour revenir vers la foi divine et vers les enseignements de Paul.

 

Page  6

 

Mais la base de l'erreur n'est pas entamée, et la substitution de « l'Église » à Israël conduit à d'innombrables difficultés qu'on est amené à résoudre en spiritualisant une grande partie de la Parole. Mais de grandes difficultés subsistent. Tant que les problèmes dogmatiques soulevés par la réaction contre Rome occupent les réformateurs et leurs successeurs, ces difficultés demeurent à l'arrière-plan ; mais quand la situation se stabilise, elles surgissent et hantent les théologiens.

Ainsi la tradition humaine conduit par exemple à la nécessité d'admettre que le Seigneur et les Apôtres se sont trompés quand ils parlaient de la venue prochaine du Royaume terrestre. On est amené aussi à la conclusion que Paul a souvent changé d'idées. La logique oblige alors à ne plus voir dans la Bible un document inspiré par Dieu, mais un produit de la pensée humaine qu'on peut donc juger et critiquer. Arrivé là, un examen « rationnel » semble montrer partout contradictions et erreurs, qui confirment la non inspiration. Que reste-t-il alors ? Un ancien document, vénérable, mais non pas divin, et une vague morale « chrétienne ».

Après ce désastre, on tâche de sauver les apparences, et même de présenter les résultats de cette critique destructive comme un grand bienfait (1). On dit par exemple qu'il ne faut pas une « religion d'autorité », et qu'il est donc bon de pouvoir montrer que la Bible n'est pas une autorité.

 

1 ) M. A. Westphal dans son « Introduction » au Dictionnaire Encyclopédique de la Bible pense pouvoir citer beaucoup de contradictions dans la Bible. Il serait facile de montrer que si l'on ne commence pas par douter de ce que la Bible dit, si on la prend telle qu'elle est, ces « contradictions » n'existent pas et qu'il est inutile de chercher une théorie pour les expliquer. Il dit : « En démêlant ces relations (c a d les trois documents supposés JE D, P), en les reconstituant, autant que faire se peut, en faisant saillir la pensée originale de chacune d'elles, en établissant entre elles une saine chronologie, la critique a libéré la foi d'objections redoutables et ouvert devant elle des horizons de lumière ». En réalité aucun résultat positif n'est acquis. On est en plein chaos. Le seul résultat est que la Bible a perdu toute autorité et est pratiquement abandonnée par la masse.

Faisons de la recherche, mais pas de critique. Ne craignons pas l'esclavage théopneustique », car si nous sommes «esclaves» de Dieu et si la Bible est Sa Parole, nous pouvons donc aussi être « esclaves » de cette dernière. La « théorie de l'inspiration » est vérifiée par toute l'Écriture et conduit à une unité absolue et à un résultat positif.

 

Page  7

 

Dieu même aurait amené le monde à reconnaître qu’il ne faut pas chercher à établir l'autorité extérieure d'un livre. Il voudrait conduire à une religion intérieure, qui se manifesterait à la conscience pieuse. La source de la vérité serait dans l'homme, et il suffirait de lui donner l'occasion de se manifester. Il y aurait bien un témoignage divin dans la Bible, mais il n'y aurait pire hérésie que de prendre ce livre comme inspiré intégralement et comme ayant une autorité égale à celle de Dieu car, dans ce cas, la vérité serait extérieure à nous.

Au lieu de reconnaître que la tradition humaine nous a égarés, on préfère se persuader que la Bible n'est pas une autorité qui juge l'homme et ne peut pas être critiquée par lui. On a raison de ne pas sacrifier la raison, mais on a tort de sacrifier les Écritures. Car par la raison on peut montrer, et c'est ce que nous aurons l'occasion de faire à plusieurs reprises dans nos ouvrages, que la source des difficultés n'est pas dans la Parole de Dieu, mais dans la tradition humaine qui, après avoir rejeté une partie de ses enseignements, a prétendu interpréter le reste d'une manière arbitraire. Si les Écritures, prises telles qu'elles sont, se contredisaient ou étaient dans l'erreur, personne ne demanderait d'accepter ces contradictions ou ces erreurs parce qu'elles se trouvent dans la Bible. La vraie question est de savoir si ces contradictions et erreurs s'y trouvent réellement. Est-il logique de commencer par ne pas accepter certaines choses (par exemple la restauration d'Israël) et d'accuser d'erreur la Parole quand on est ainsi conduit à une difficulté ?

D'autre part, comparer l'autorité de la Bible à celle de l'Église romaine, et nier les deux pour proposer une « religion de l'esprit » est faire preuve d'une singulière confusion. Tout ce qu'on objecte à l'autorité d'un livre, on peut l'objecter à celle de Dieu et du Seigneur. Ne sont-ils pas des autorités ? Et voudrait-on prétendre qu'il est impossible que Dieu ait donné un livre divin ? Si oui, sur quelle base ? Sinon, les arguments de principe contre une autorité tombent. Et les arguments qui découlent d'une fausse tradition n’ont aucune valeur ( 2 ).

 

(2) Il est pénible de voir comment certains se basent sur cette « lettre » pour tâcher d'en tirer un argument contre la « lettre ». Ils citent 2 Cor. 3 : 6 : « Car la lettre tue, mais l'esprit vivifie. » La « lettre » indique ici, « le ministère de la mort gravé avec des lettres sur des pierres » (v. 7), c à d l'ancienne alliance qui présentait à Israël la volonté de Dieu, mais ne donnait pas le moyen d'obéir à cette volonté. En contraste avec cette « lettre » Paul dit qu'il est le ministre d'une nouvelle alliance (v. 6). Nous avons montré dans « Le Plan Divin » et nous y revenons

dans le présent ouvrage, que la nouvelle alliance demande encore et toujours l'exécution de la volonté de Dieu, c.-à-d. ce qui avait été écrit par Moïse, mais en donnant la capacité de l'accomplir c.-à-d. la grâce, l'aide de l'Esprit. La « lettre ~ seule, sans l'Esprit, ne peut que tuer, ainsi qu'il est dit en Rom. 7 : 10, Il : ( Le commandement qui conduit à la vie se trouva pour moi conduire à la mort. Car le péché, saisissant l'occasion me séduisit par le commandement, et par lui me fit mourir. » Ce n'est en réalité pas la lettre, la loi qui tue, mais c'est le péché (v. 13). Cette action était nécessaire pour amener Israël à Christ. Arrivé là, ne devait-il plus observer la « lettre » ? Bien au contraire, c'est justement alors qu'il pouvait le faire. La " lettre", reste donc absolument nécessaire pour connaître la volonté de Dieu (Rom. 2 : 18). De même la « lettre » inspirée, la Parole de Dieu, nous est nécessaire pour connaître toute la volonté de Dieu. Mais la lettre seule est morte, elle doit vivre en nous par le Saint-Esprit.

 

Page  8

 

Admettons un moment que nous devions retenir seulement ce que nos « lumières intérieures » nous font reconnaître comme juste et vrai. Si nous reconnaissons de cette manière que toute la Bible est la Parole de Dieu, qui peut nous empêcher d'en témoigner ? Voudrait-on nous imposer d'autorité que la Bible est faillible ?

Examinons de plus près la confusion de ceux qui ne veulent pas de l'autorité d'un livre. Ce Livre peut très bien être autorité dans le sens qu'il est la vérité sans l’être dans le sens qu'il s'impose autoritairement. Même s'il est la vérité, s'il est la Parole de Dieu, l'appropriation personnelle de cette vérité ne se fait que librement par le témoignage du Saint-Esprit en nous. Imposer ce Livre est l'erreur que l'on peut combattre et désigner par une « religion d'autorité ». Dire qu'il ne peut y avoir qu'une « religion de l'esprit » n'a donc rien à faire avec la question de savoir si la Bible est entièrement inspirée ou non, si elle est la vérité ou ne fait que contenir la vérité.

Et qu'on ne dise pas que nous n'avons pas besoin d'une vérité écrite ! Hommes, il nous a été donné par Dieu une intelligence et une raison, et le Livre est essentiellement adapté à ces facultés. C'est par ces dons que nous avons accès à la vérité dans la mesure où elle nous est accessible dans notre manière d'être actuelle. Nous ne devons pas nous attendre maintenant à des intuitions et des révélations qui nous permettraient de nous passer de l'Écriture.

 

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Le Saint-Esprit agit en nous non pas de manière à rendre nos facultés « naturelles » inutiles, mais en illuminant ce qui est obscurci. Le Saint-Esprit qui a inspiré les écrivains de la Bible ne se passe pas de ces Écritures et ne nous communique pas la vérité sans la Parole. Si nous n'acceptons pas ces révélations écrites, nous ne pouvons avoir qu'une foi vague, car l'objet de cette foi est mal déterminé et ne résulte que d'impressions diverses : conversations, lectures, prédications, qui toutes sont fort imparfaites. Une vérité écrite est une base sûre qui donne du corps à l'objet de notre foi.

La tradition et la critique, se donnant la main, ont conduit à n'avoir plus rien de concret, et il ne reste que cette « foi » vague qui peut s'adapter à tout parce qu'elle n'est rien. Quand on ne distingue pas les âges, les dispensations, les messages, etc., il va de soi qu'on se trouve devant un mélange d'où ne peut résulter aucune indication nette. On est conduit alors à ne plus s'attacher à la lettre (3). Mais en distinguant les choses qui diffèrent, l'objet de notre foi peut se préciser et notre foi peut alors embrasser beaucoup de choses. Toutes nos facultés concourent à cette oeuvre, notre intelligence sanctifiée aussi bien que nos sentiments. Nous sommes loin alors de croire « en bloc » tout ce que la Parole enseigne, sans nous en approprier le contenu.

Relevons un argument qui a pu impressionner certaines personnes : nous ne possédons pas le texte original et les copies présentent certaines différences. À quoi bon prétendre que le texte original est inspiré, si nous ne le connaissons pas ? La réponse n'est pas difficile. Supposons qu'un artiste renommé ait produit un chef-d'oeuvre. Par l'effet du temps et du manque de soins, le tableau s'est crevassé, il s'est recouvert de taches, et quelques petites parties manquent. Certains ont cru bon de réparer ces défauts et ont essayé de restaurer le chef-d'oeuvre. Dira-t-on :

« À quoi bon prétendre que c'est l'oeuvre du maître, puisque nous ne possédons pas le tableau intact ? »

 

(3) Au contraire, ce qui semble contradiction quand on part d'un point de vue faux, devient confirmation quand on prend le point de vue juste. Un examen poussé du texte original montre continuellement son inspiration au chercheur, car une telle précision dans le choix des mots et une telle structure de l'ensemble ne se trouve dans aucun document humain.

 

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Et qui prétendra que les imperfections enlèvent toute valeur à cette oeuvre ? N'est-il pas vrai qu'on reconnaisse d'une part la main du maître et d'autre part les petits défauts ? Ainsi en est-il des Écritures. Il y a un certain nombre de mots douteux, il y a quelques expressions incertaines. Mais cela ne touche pas l'ensemble et un chercheur pourra même arriver à reconstituer l'original. La critique a l'air de dire que le tableau est tellement détérioré qu'on ne reconnaît plus le sujet, qu'on peut prendre un objet pour un autre. Or il n'en est rien, l'oeuvre ne peut jamais nous induire en erreur quand il s'agit de questions importantes. Même dans les détails, il est bien rare qu'après, un examen comparatif des manuscrits, on n'arrive pas à la vérité pure.

Mais ici se présente une autre objection. La masse des croyants ne peut pas examiner les textes. Encore une fois : à quoi bon alors que l'original soit inspiré ou non ? Nous répondrons en poursuivant notre comparaison. Le chef-d'oeuvre a été copié par d'autres artistes. Pour la majorité de ceux qui regardent le tableau, il n'y a pas grande différence avec l'original car le sujet général est rendu avec suffisamment de précision. Ce n'est que dans le cas où un examen précis est nécessaire qu'on devra recourir à l'original. Dans la plupart des cas, il suffira d'un peu d'exercice et d'attention. Nul besoin d'être expert. N'en est-il pas de même avec la Parole de Dieu ? Les versions sont satisfaisantes dans beaucoup de cas, ce n'est que dans les détails qu'il faut préciser et alors un examen relativement simple, qui peut se faire à l'aide d'une Concordance et d'un lexique peut être entrepris par tout croyant décidé. On a trop souvent pris la mauvaise habitude de considérer des recherches de ce genre comme étant hors de la portée d'un croyant « ordinaire ».

Quant à la question : pourquoi nous acceptons le canon des Écritures établi qu'il fut par une autorité que nous ne reconnaissons pas, il est assez élémentaire que si Dieu a voulu nous donner Sa Parole, Il a pu le faire malgré et contre tout. Nous avons tout ce qu'il a jugé bon de nous donner. Chaque élément de cette Parole porte d'ailleurs la marque divine et aucun autre document ne peut s'y comparer.

 

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La critique a parfois eu recours à l'orgueil humain pour s'imposer aux naïfs. On a dit que c'est par ignorance, par défaut de sens critique, par illuminisme qu'on tient à l'inspiration verbale, mais qu'une étude sérieuse est suffisante pour montrer que cette opinion n'est pas tenable. Nous accordons que cela a pu se produire souvent. Surtout dans les cas où les conceptions traditionnelles concernant Israël et « l'Église ont embrouillé les pensées et où l'on ne distingue ni âge, ni dispensation. Alors une étude plus sérieuse a semblé montrer les contradictions apparentes et a pu faire conclure faussement à la faillibilité de la Parole. Mais qu'on ne dise pas que c'est là un conséquence nécessaire d'un examen sérieux. Car nous aussi connaissons les documents des premiers siècles, nous aussi avons suivi le développement de « l'Église », nous aussi savons comment est née la critique par Luther, Spinoza, Grotius, les philosophes allemands et tant d'autres. Nous avons suivi avec douleur les progrès de ce chancre chez Bayle, Leclerc, etc., même dans l'école de Saumur. Nous connaissons la réaction du Réveil et nous pouvions prévoir qu'elle ne durerait pas, car tant que les idées traditionnelles directrices demeuraient, on ne pouvait sortir des conséquences logiques du système. L'expérience douloureuse d'un Scherer en est témoin. Nous aussi nous avons vu le développement à outrance de la critique chez de Wette, Baur, Wellhausen, pour ne pas parler des plus modernes. Nous connaissons toutes ces théories qui furent répandues comme des conclusions infaillibles de la critique et que les faits, une plus grande connaissance des langues anciennes, les fouilles dans les pays bibliques, etc., ont nettement démenti ( 4).

 

4 On ne compte plus les théories audacieusement imposées par la critique comme des faits certains, et qui ont été démentis radicalement par la recherche archéologique et l'étude documentaire. Nous ne mentionnons ici que quelques cas typiques :

1. On a prétendu que les cinq premiers livres de la Bible ne pouvaient pas avoir été écrits par Moïse, parce que de son temps la civilisation ne pouvait pas encore avoir atteint le développement que montrent ces livres, et qu'en particulier il ne pouvait exister alors une législation aussi raffinée. Or les résultats des recherches démontrent, de plus en plus, que la civilisation est très ancienne. Les tombeaux d'Ur sont estimés être de 1.500 ans plus anciens qu'Abraham et révèlent une civilisation extraordinaire. Le code d'Hammurabi a montré en particulier que des législations très développées existaient longtemps avant Abraham.

D'après un expert contemporain, M. C.-L. Woolley, qui dirige l'expédition du British Muséum et de l'University Muséum de Philadelphie, Abraham a vécu dans des conditions de vie domestique et nationale fort compliquée, qui ont étonné tous les chercheurs. Il dit aussi : « Les fouilles n'éclairent pas toujours la Bible, mais nous avons au contraire- recours à la Bible pour expliquer les faits donnés par elles. » La Parole de Dieu se manifeste donc aussi comme une « autorité » dans ce domaine.

2. Le Prof. Garstang qui a montré que la pioche confirme ce que la Bible dit de la prise de Jéricho, a écrit ceci : La présentation historique de l'établissement d'Israël en Canaan, tel qu'elle est donnée par les livres de Josué et des Juges, rue semble, après dix ans d'investigations sur place, au cours desquels j'ai examiné tout site et toute route qui s'y rapportent, être à l'abri de toute objection archéologique ou topographique importante. D'autre part, les dates plus récentes proposées par des théoriciens modernes conduisent immédiatement à des difficultés archéologiques et déforment la narration. L' « onus probandi » reste sûrement chez ceux qui rejettent la tradition biblique. » Son expédition de 1932 a confirmé l'histoire de l'Exode d'Égypte.

3. Une étude minutieuse des documents écrits dans les langues sémitiques et autres a permis au Prof. R. D. Wilson (Princeton Theological Seminary) de montrer : qu'il n'y a aucune raison pour ne pas croire que le Pentateuque serait de Moïse et que David aurait écrit beaucoup de Psaumes, et que les langues et l'histoire confirment que tous les livres de l'A. T., excepté quelques-uns, ont été écrits plus tôt que 500 ans avant Jésus-Christ.

Parmi beaucoup d'études, qui montrent que la critique résulte souvent de l'ignorance, nous donnons l'extrait suivant :

" La critique assure qu'Esdras, Néhémie et les Chroniques dans leur forme actuelle ont été rassemblés par le même rédacteur et que celui-ci a dû vivre pendant la période grecque parce qu'il désigne les rois de Perse par l'expression « Rois de Perse ». L'éminent critique allemand Ewald a dit : « Il est inutile et en contradiction avec les habitudes de ce temps, de désigner les rois de Perse par le titre , Rois de Perse... ». Or j'ai montré par une conclusion déduite d'un examen de tous les titres des rois d'Égypte, de Babylone, d'Assyrie, de la Grèce et de tous les autres peuples de cette partie du monde, y compris les Israélites, depuis 4.000 ans avant Christ jusqu'au temps d'Auguste, que de tout temps, dans toutes les langues et dans tous les royaumes des titres comme celui ci-dessus ont été utilisés (Voir : The Princeton Theological Review de 1905 et 6). L'auteur a montré en plus que le titre " Roi des Perses " a été donné par Nabonide, roi de Babylone, à Cyrus en l'an 546 avant Jésus-Christ, sept ans avant le premier usage de ce titre dans la Bible et qu'il était utilisé par Xénophon en 365 avant Christ, probablement quarante ans après avoir été utilisé pour la dernière fois dans la Bible. Il a montré qu'entre les années 646 et 365, le titre fut utilisé 38 fois en divers temps par 18 auteurs différant en 19 documents, 6 langues et 5 ou 6 pays. Il a enfin montré que les auteurs grecs postérieurs à la période perse n'étaient pas habitués à utiliser ce titre (Voir : Festschrift, Éd. Sachan, Berlin, 1911). »

" La Bible a donc raison ; et il est démontré que le Prof. Ewald de Göttingen, de son temps l'allemand le plus savant pour ce qui concerne l'A. T. et les Prof. Driver et Gray d'Oxford ont tort. Tous auraient pu prendre connaissance de l'évidence donnée par Hérodote, Thucydide, Eschyle, Xénophon et autres. Après un examen minutieux de ce que ces savants ont écrit à propos de ce titre, je n'ai pu trouver aucune indication qui montre qu'ils se soient jamais adressés pour leurs renseignements à une source quelconque hors du grec, de l'hébreu et de l'araméen. Et pour ce qui concerne ces sources, ils n'ont pas prêté attention aux grands auteurs grecs nommés ci-dessus. S'ils sont si négligents et si peu dignes de confiance là où leurs affirmations peuvent être contrôlées, quelle raison y aurait-il alors pour attendre de nous que nous les croyions quand leurs affirmations ne peuvent pas l'être ? »

Voilà quelques exemples qui montrent que la critique moderne et soi-disant scientifique, ne s'appuie pas sur des faits, mais sur l'ignorance. Les faits ont toujours confirmé la Parole de Dieu. Jamais un fait n'en a prouvé l'erreur.

 

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L'homme érudit et savant a donné la mesure de son ignorance et de son orgueil quand il s'est attaqué à ce qui est divin. Ce n'est donc pas par ignorance que nous croyons à l'inspiration des Écritures.

 

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Au contraire, en voyant l'impuissance de la critique moderne

nous avons une Preuve nouvelle de son erreur ( 5 ) et de l'inspiration de la Parole qui reste au-dessus de toutes les attaques. Si l'on ne part pas d'un point de vue faux, un examen « scientifique » doit conduire à la conclusion que le Livre n'est pas humain. La foi et le Saint-esprit nous en donnent la certitude.

Nos publications ont pour but principal d'amener ceux qui ont soif de vérité à réexaminer les choses. Nous sommes loin d'imposer nos idées ; nous ne sommes pas une « autorité ». Mais nous voyons une solution, alors que presque tout mène au néant (6 ).

 

5 (5) On a souvent parlé des , résultats acquis » de la critique or, tout est chaos dans cette critique. Les théories de Baur et de l'école de Tübingen ont en grande partie été abandonnés. Les théories de Wellhausen sont aussi fortement discréditées. Quand on examine l'évolution des nombreuses théories concernant les soi-disant « sources » de l'A. T. et le désaccord permanent entre les grands théologiens, on est édifié sur ce que veut dire : « résultats acquis ». Il est trop visible que, dans beaucoup de cas, le point de départ de la critique est que l'on n'accepte pas d'intervention divine. Tout ce qui n'est pas « naturel » est a priori écarté, comme étant impossible !

6 (6) Il est probable que certains nous répéteront ce qu'on a dit de tout temps à ceux qui désirent un retour à la vérité et que nous rendrons par les mots de Calvin : « Ils enquièrent si c'est raison qu'elle (la doctrine de Calvin) surmonte le consentement de tant de Pères anciens, et si longue coustume. Ils insistent, que nous la confessions estre schismatique, puisqu'elle fait la guerre à l'Église : ou que nous respondions, que l'Église a esté morte par tant longues années, ausquelles il n'en, estoit nulle mention. » Et plus loin : " Toutesfois ce n'est pas nouvel exemple. On demandoit à Hélie s'il n'estoit pas celuy qui troubloit Israël (1 Rois 18, 17). Christ estoit estimé seditieux ,des Juifs (Luc 23, 5). On accusoit les Apostres, comme s'ils eussent esmeu le populaire à tumulte (Actes 24, 5). » Il se réfère ensuite à la réponse d'Élie en 1 Rois 18 : 18.

 

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Nous proposerons aux croyants sérieux de faire un effort personnel et de considérer notre travail comme indiquant quelques jalons le long de la route solitaire qu'ils auront à parcourir.

Dans l'Introduction de notre ouvrage Le Plan Divin, nous avons déjà exprimé l'opinion qu'il ne faut jamais craindre d'être trop intellectuel, pourvu qu'il y ait l'équilibre voulu et qu'on soit spirituel au même degré. Dans le présent ouvrage aussi nous nous adressons en grande partie à l'intelligence de nos lecteurs, parce que nous ne concevons pas comment on pourrait autrement exposer ces matières. Nous n'avons fait que suivre l'exemple de Paul. Nous aurions pu nous attacher davantage à exhorter le lecteur à prendre à coeur ces messages. Si nous ne l'avons pas fait, cela ne signifie pas que nous ne le trouvons pas nécessaire. Mais nous croyons que si le lecteur se rend compte de la profondeur croissante de ces messages, il sera amené à lire et relire les

Epitres elles-mêmes et, exhorté par elles d'une manière bien plus efficace que nous ne pourrions le faire. Ces exhortations prennent toute leur vigueur pour celui qui sait qu'elles sont

d'inspiration divine et qu'elles s'adressent directement à lui. Or, notre effort a pour but, d'abord de mieux faire apprécier toute la Parole en supprimant des obstacles qui pourraient faire douter de son inspiration, et ensuite de rendre chaque message plus saisissant en le réservant à ceux auxquels il s'adresse. Trop souvent, la Bible ne semble qu'un chaos plein d'exhortations contradictoires. Par le mélange, l'effet des parties différentes se neutralise. On ne comprend plus et on délaisse la Parole. La tradition et les habitudes « religieuses » prennent alors la place que l'Écriture devrait occuper. Celui qui est membre d'une « Église » se croit souvent régénéré de ce fait ; pour lui, plus besoin de repentir. Il croit ne plus être pécheur et pense être sauvé par une foi bien souvent superficielle.

Nous mettons le lecteur devant les faits et l'aidons à examiner par lui-même. Nous espérons qu'ainsi le non régénéré reconnaîtra son état et que sa connaissance intellectuelle le conduira à prendre au sérieux les exhortations divines adressées aux non régénérés.

 

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De même, celui qui n'est pas encore mort au péché pourra apprendre à s'humilier, à se repentir, à mourir. Et ainsi, même dans la position la plus avancée sur la voie du salut, le croyant pourra nettement distinguer la volonté spéciale de Dieu envers lui et accepter le message particulier qui s'adapte à son cas.

 

Nous mettons le lecteur en garde d'une manière toute spéciale contre une fausse impression qui pourrait résulter d'une lecture superficielle. Nous ne disons pas qu'une partie de la Bible ne serait pas nécessaire. (Voir à ce sujet aussi p. 32). Tout est utile. Partout nous trouvons des enseignements nécessaires, des exemples utiles, des exhortations salutaires. Si nous divisons la Parole, ce n'est pas pour rejeter certaines choses, mais pour mieux les appliquer, en les plaçant sur leur vrai plan.

La principale réserve que nous faisons, c'est que les choses extérieures dépendent souvent des conditions extérieures et que ces choses doivent rester réservées à ces conditions. À telle époque, Dieu peut interdire de manger de la viande, à tel peuple Il peut ordonner des sacrifices, à tel groupe Il peut imposer tel rite. Tout cela est utile à tous les points de vue, mais tout n'est pas imposé à tous.

Nous faisons une deuxième restriction. C'est que, pour chaque groupe d'hommes : incroyant, régénéré, « fils » de Dieu, homme fait, il y a un message particulier. Ce qui est adressé à l'incroyant ne s'adresse plus au régénéré, etc. Toute l'Écriture reste cependant utile à tous.

Dans La Voie du Salut, qui est en préparation, nous traitons de ce qui concerne chaque homme personnellement. Le Plan Divin et le présent ouvrage ne sont que la préparation ; l'essentiel pour tout homme est de voir quelle place il occupe dans la création et comment il peut, en glorifiant Dieu, arriver au but glorieux qui lui a été assigné.

Nous remercions Mlle J. B., MM. E. C., H. B., G. G., et d'autres encore pour la révision et la correction du texte, ainsi que pour leurs suggestions.

Versailles, 1935.

 

Résumé de notre ouvrage « Le Plan Divin »

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Nous croyons utile de présenter avant tout un résumé de notre ouvrage Le Plan Divin, qui donne un aperçu général des âges et du rôle du peuple d'Israël.

La Parole de Dieu, acceptée simplement, comme elle nous est donnée, forme une unité sans contradictions et nous fait connaître le Plan divin.

Avant toute création, Dieu est. L'Image de Dieu, nommée aussi « Fils de Dieu », devint créature pour créer. Le Fils de Dieu est le Médiateur en tout : création, rédemption, perfection.

La création est bonne, mais non parfaite (puisqu'elle n'est pas Dieu). Dieu veut l'amener à la perfection par la voie de la liberté. La créature est donc libre et peut faire de sa liberté un usage bon ou mauvais, suivant qu'elle fait ou ne fait pas la volonté de Dieu.

La création comprend cinq éons (âges). Les conditions d'existence, les lois, diffèrent complètement d'un éon à l'autre, mais il y a une certaine correspondance entre le premier éon et le cinquième, ainsi qu'entre le deuxième et le quatrième.

 

Premier éon. - Dieu a, par le moyen de Son Fils, créé librement des êtres libres et a montré ainsi Sa perfection, Certains êtres s'écartent de Dieu, tombent ainsi dans le péché et s'élèvent même contre Dieu. Satan (I'Adversaire), un chérubin tombé par orgueil, joue le rôle principal dans cette révolte insensée. Une partie de la création est précipitée dans le chaos.

Mais Dieu veut que la créature parvienne à sa destinée.

 

Deuxième éon. - Après le chaos, vient la reconstruction en six jours. Adam est créé à l'Image de Dieu et ressemble donc au Fils devenu créature.

Il reçoit les grâces nécessaires pour soumettre la mer, le ciel et la terre, pour être roi. Mais, avant tout, il doit lui-même occuper librement sa position en faisant la volonté de Dieu.

 

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Il manque ce but à cause de la séduction de Satan, qui veut empêcher la réalisation sur terre du Royaume (Royaume céleste cependant, parce qu'institué par le Ciel).

Adam est ainsi privé de la gloire de Dieu, il est séparé de la source de Vie (mort spirituelle). Il n'a plus qu'un reste de vie corporelle : il est « mourant », et ainsi le seront tous ceux qui proviennent de lui.

La terre est maudite. L'homme n'est pas seulement devenu ennemi de Dieu, mais aussi ennemi de la création.

Les anges déchus (et leur progéniture) souillent la terre. Le déluge enlève cette corruption et laisse Noé et les siens.

 

Troisième éon. - C'est dans cet « âge » que nous vivons. Il diffère aussi dans les conditions physiques, de l'éon précédent. Cet âge est appelé : « Le mauvais âge présent », et Satan en est le dieu.

Dieu veut réaliser Son plan. Il livre la terre et la mer entre les mains de Noé, puis choisit Sem, Abraham, Isaac, Jacob pour servir d'instruments à la restauration et amener le Royaume. Satan réagit constamment.

Abraham reçoit la promesse de bénédictions terrestres et célestes : il aura deux postérités.

Dieu choisit, parmi les nations, un peuple : Israël, (lui devra spécialement servir à apporter la régénération du monde, mais qui doit d'abord lui-même être régénéré, c'est-à-dire entrer en communion spirituelle avec Dieu.

Pour que ce peuple se rende compte de son péché, se tourne librement vers Dieu et soit régénéré par Lui, Dieu lui indique ce qu'Il désire : Il lui donne la Loi. Cette Loi a pour base Sa volonté générale envers toute créature, mais sa forme spéciale n'en est applicable qu'à Israël, particulièrement en ce qui concerne les cérémonies. Par l'Ancienne Alliance Dieu demande que la Loi soit exécutée intégralement. Israël aurait dû se rendre compte qu'il ne savait pas exécuter ce que cette Alliance demandait et aurait dû avoir recours à la grâce divine. Le peuple élu manque son but en prétendant faire par ses propres forces ce que Dieu désire.

 

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Toute l'histoire d'Israël prouve la patience de Dieu, qui veut amener Son peuple, par la voie de la liberté, à se détourner de Satan et à se repentir.

L'Adversaire intervient à tout moment dans le but d'empêcher la venue du Royaume et de la régénération mondiale.

Dieu a donc suscité un peuple, un pays (Canaan), une cité (Jérusalem). Pour que le Royaume vienne, il ne manque que la repentance d'Israël. Les prophètes rappellent les promesses divines et font entrevoir les bénédictions qui seront le partage de la terre quand le Messie sera Roi.

Enfin, le Fils même, devenu semblable aux hommes, vient sur terre, s'humilie et est obéissant jusqu'à la mort sur la croix. Il résout le problème impossible à résoudre : concilier l'amour et la justice de Dieu, permettre à la créature pécheresse et incapable de faire le bien, de retourner vers Dieu. Il rend possible le pardon, la justification, la réconciliation et la sanctification du pécheur. Il ne fonde pas une nouvelle religion, mais Il exécute le Plan divin.

Jésus-Christ s'adresse au peuple choisi, montre par ses actes qu'Il est son Roi et demande sa repentance pour que le Royaume vienne sur terre. Les miracles et les signes confirment que ce Royaume est proche. Il choisit douze Apôtres (les Apôtres de la circoncision), qui seront assis sur douze trônes pour guider les douze tribus d'Israël dans ce Royaume. Les vrais israélites formeront une Église visible.

Le Christ instaure la Nouvelle Alliance avec Israël, dont parlaient les prophètes, et selon laquelle la Loi, c'est-à-dire la volonté divine à leur égard, pourra être accomplie par la grâce.

Par leur repentance, les hommes peuvent obtenir le pardon des péchés et, par leur foi en Jésus-Christ, la vie éonienne (éternelle), c'est-à-dire la vie sur terre pendant l'éon à venir.

Certains se tournent vers Lui, mais le peuple, comme tel, le rejette et le fait crucifier. Tout semble perdu, et pourtant la croix est le seul moyen pour arriver à la restauration et au but final : Dieu tout en tous.

Par la résurrection d'entre les morts, Jésus-Christ a été déclaré avec puissance être le Fils de Dieu. La grâce abonde maintenant. Dieu a condamné et réconcilié le monde en Lui.

Après la croix, Israël n'est pas rejeté. Les douze Apôtres insistent de nouveau sur la repentance et sur la venue du Royaume.

 

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Ce Royaume par lequel commencerait l'éon prochain, caractérisé par la régénération du monde, est toujours « proche », les signes extérieurs : miracles, guérisons, intervention des anges, etc., le prouvent.

La Loi et les cérémonies sont scrupuleusement observées par les Juifs, même par ceux qui croient en Christ. (Les Juifs ne cessent pas en effet d'être juifs quand ils croient en Christ, mais peuvent alors l'être vraiment et accomplir la Loi par la grâce.)

À la Pentecôte, les anciennes promesses faites à Israël commencent à se réaliser. Dix ans après seulement la parole divine commence à être adressée aux Gentils, qui ont part aux bénédictions d'Israël conformément aux prophéties.

Entre temps, Paul, non compris parmi les Douze, se convertit. Il est l'apôtre des Gentils, et commence à proclamer un nouveau message : la justification par la foi. Cette bonne nouvelle dépasse celle (la régénération) des douze Apôtres de la circoncision et vise déjà les conditions du cinquième éon. La proclamation, en quelque sorte anticipée, a comme but partiel d'exciter Israël par la jalousie à accepter ses privilèges.

Les Juifs rejettent leur Messie successivement dans les grands centres et, au fur et à mesure, le message de Paul prend plus d'importance. Le dernier effort auprès du peuple élu est fait par Paul à Rome (Actes 28) ; mais là encore ce peuple ne veut pas entendre. Israël est rejeté provisoirement, et toute possibilité d'une venue prochaine du Royaume disparaît. En même temps, tous les signes extérieurs (y compris les dons spirituels spéciaux visibles) annonçant le Royaume, cessent. Tout ce qui a rapport à Israël, tel que l'observance de la Loi et les cérémonies religieuses visibles, prend fin. Il y a là un changement radical de dispensation duquel il est extrêmement important de tenir compte quand on lit ce qui est écrit avant cette date : par exemple les Évangiles, les Actes, les Épîtres aux Romains, aux Corinthiens, aux Galates et aux Thessaloniciens. La partie personnelle de ces messages demeure, mais tout ce qui a rapport à la dispensation passe, cesse d'être applicable. Les charismes pentecôtistes en particulier ne se rapportent pas à nous.

Est-ce la faillite du Plan divin ? Non, Paul, emprisonné, proclame maintenant un nouveau message, inconnu de tout temps, à lui seulement révélé, et concernant le grand mystère : le Corps de Christ.

 

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En esprit, on peut déjà atteindre la position parfaite correspondant au but du Plan divin : Dieu tout en tous. La voie du salut est donc entièrement connue : l'homme naturel doit devenir enfant de Dieu (nouvelle naissance), puis « fils » de Dieu (nouvelle création-justification) et enfin devenir homme parfait. La dispensation actuelle est donc celle de l'Église du mystère. Elle commence après le temps des Actes et prend fin avant le « jour du Seigneur » qui termine l'éon présent. Pendant toute cette période, il y a interruption dans la réalisation des prophéties, notre dispensation étant complètement inconnue des prophètes.

Les membres de l'Église du mystère ressuscitent en premier lieu.

Israël passe par la grande tribulation, se repent, et le Seigneur vient en gloire. C'est le moment de la transformation des croyants vivants et de la résurrection des morts.

Tous les royaumes du monde sont remis à Christ

Il est le Roi de toute la terre. Satan est lié pour 1.000 ans.

 

Quatrième éon. - Le Fils de l'homme est assis sur le trône de Sa gloire, et les 12 Apôtres sont assis sur 12 trônes, jugeant les 12 tribus d'Israël. C'est le « renouvellement » (la régénération), le temps du rétablissement de toutes choses dont Dieu a parlé anciennement par la bouche de Ses saints prophètes. Israël occupe la terre promise, du Nil jusqu'à l'Euphrate, et toutes les nations sont bénies en Abraham. Les juifs chrétiens forment l'Église de Christ sur terre, une unité visible. La création est affranchie de la servitude de la corruption. La terre produit normalement ; la nature des animaux est changée, la durée de la vie décuplée. C'est une ère de justice et de paix, Satan étant lié. Le temple de Jérusalem est le centre du culte d'Israël, qui observe fidèlement la Loi par la grâce. La Nouvelle Alliance avec ce peuple est accomplie et les conduit vers la sphère céleste.

La postérité céleste d'Abraham se manifeste par des miracles et des actes puissants.

Après les 1.000 ans, Satan est relâché pour un peu de temps. Il séduit les nations et est jeté dans l'étang de feu et de soufre.

 

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Ceux qui n'ont pas eu part aux résurrections passées paraissent devant le grand trône blanc pour être jugés. Ils subissent le châtiment qu'ils méritent.

La durée de cet éon semble devoir dépasser de beaucoup les 1.000 ans. La terre entière est amenée à prendre part à la régénération. Tous les ennemis sont finalement mis sous les pieds du Fils.

En résumé on voit sur terre Israël et les nations régénérées !(les enfants de Dieu), dans le ciel les justifiés (les fils de Dieu) et dans les sur cieux ceux qui sont arrivés à la mesure de la stature parfaite de Christ et qui montrent l'infinie richesse de la grâce de Dieu.

Le Christ a régné comme Roi pendant cet éon et remet maintenant le Royaume au Père pour régner avec Lui.

 

Cinquième éon. - C'est celui de la nouvelle création. Toutes les conditions sont de nouveau changées radicalement, y compris les lois physiques. C'est le « jour de Dieu ». Tout ce qui est relatif à Adam, à l'ancienne humanité est maintenant passé et englouti par la nouvelle humanité. Toute la création est dans la sphère céleste, à part ceux qui se trouvent déjà pour ainsi dire hors de la création, dans la sphère sur céleste.

La nouvelle Jérusalem descend du ciel. Les mots manquent pour décrire la gloire de cet âge. On peut cependant dire qu'il n'y a pas de mer, pas de souffrances, pas de jour et de nuit, pas de mort, pas de temple, pas d'anathème, pas de péché. Dieu habite avec les hommes. Christ règne avec le Père.

La création est amenée à l'état où elle se trouvait au premier éon, mais avec cette différence, qu'elle a appris, grâce à l'amour infini de Dieu et au sacrifice de Son Fils, à faire bon usage de sa liberté. Elle peut ainsi atteindre la perfection.

 

Dieu tout en tous. - Dieu a atteint Son but et a fait pour cela l'impossible Il a augmenté Sa gloire en créant et en rendant parfaite Sa créature. Il est tout en tous et il n'y a donc plus de Médiateur, plus de Roi, plus de Prêtre. Le Fils a achevé Son oeuvre et possède la gloire qu'Il avait avant Son humiliation.

La créature, par sa communion avec le Fils, est élevée avec Lui.

 

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Elle atteint l'amour parfait, la liberté absolue en acceptant librement la volonté de Dieu et forme ainsi une unité glorieuse.

Nous reproduisons aussi le schéma du Plan Divin, qui donne en quelques traits un aperçu général des éons.

 

 

 

 

 

PREMIÈRE PARTIE

 

Pendant la période des Actes

 

1.      - Qui est Paul ?

 

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Dans Le Plan Divin, nous avons montré que Paul n'est pas l'un des Douze Apôtres. Certains pourraient en conclure qu'il n'est donc pas apôtre. Mais cette remarque a déjà trouvé sa réfutation et Paul lui-même a dit : « Ne suis-je pas apôtre ? » (1 Cor. 9 : 1). On l'attaquait de toutes parts et sans doute a-t-on invoqué contre lui le fait qu'il n'avait pas accompagné le Seigneur pendant sa vie terrestre et ne satisfaisait donc pas aux conditions requises pour faire partie des Douze (Actes 1 : 21, 22). Il reconnaît une différence entre eux et lui (1 Cor. 15 : 5-8), mais il maintient pourtant qu'il est apôtre, il prétend même avoir reçu son apostolat directement du Seigneur Jésus-Christ (Rom. 1 : 5), et être prédicateur et apôtre (1 Tim. 2 : 7). C'est principalement dans l'Épître aux Galates qu'il insiste sur son titre : « Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par un homme, mais par Jésus-Christ et Dieu le Père. » On s'était rendu compte que son message aux Gentils n'était pas le même que celui des Douze et c'était une raison de plus pour mettre son autorité en doute. Il reconnaît avoir un autre message, mais cet Évangile « n'est pas de l'homme » et il ne l'a reçu ni appris d'un homme, mais par une, révélation de Jésus-Christ (1). Il n'a consulté « ni la chair, ni le sang » et ne monta point à Jérusalem vers ceux qui furent apôtres avant lui. Trois ans après seulement il fait la connaissance de Pierre. Quatorze ans après il expose aux Apôtres l'Évangile qu'il prêche aux Gentils et Jacques, Pierre et Jean (apôtres de la circoncision) ayant reconnu la grâce qui lui avait été accordée donnent à Paul et Barnabas (apôtres des Gentils) la « main d'association ».

 

1 (1) Gal, 1 : 12. Il est bon de remarquer que le mot « apokalupsis », traduit par « révélation » indique toujours une communication venant directement de Dieu.

 

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On doit se rendre compte qu'il est donc absolument nécessaire de distinguer

1° Entre les douze apôtres de la circoncision, choisis par le Seigneur avant son ascension et les apôtres de l'incirconcision choisis après son ascension (2) ;

2° Entre le message spécial des Douze, qui se rapportait au séjour du Seigneur sur terre et au Royaume terrestre et le message spécial de Paul pendant les Actes, qui se rapporte à des choses célestes et à la nouvelle création et où il ne connaît plus Christ selon la chair (2 Cor.5 :16).

Ces distinctions n'empêchent nullement d'une part Pierre de s'adresser aussi occasionnellement aux Gentils (au sujet de leurs bénédictions dans le Royaume terrestre) et d'autre part Paul de s'adresser aux Juifs. Nous verrons que le message caractéristique de Paul dépasse celui des Douze. Paul peut à l'occasion parler du Royaume terrestre, mais inversement les Douze ne parlent pas de ce qui est au-dessus de leur sphère.

 

 

2 (2) Eph. 4 : 10 parle de Son ascension et Eph. 4 : 11 des apôtres appelés après cet événement.

 

2.       -- Plusieurs Évangiles.

 

La version Darby rend souvent le texte inspiré avec plus de fidélité que d'autres versions. Nous y trouvons par exemple : « À moi, certes, ceux qui étaient considérés n'ont rien communiqué de plus ; mais au contraire, ayant vu que l'évangile de l'incirconcision m'a été confié, comme celui de la circoncision l'a été à Pierre... » (Gal. 2 : 6, 7). La Parole parle en effet de plusieurs « évangiles » c'est-à-dire de plusieurs Bonnes Nouvelles. Mais, objectera-t-on, Paul lui-même affirme qu'il n'y a pas « un autre Évangile » (Gal. 1 : 7). Ici encore la version Darby pourra nous aider il faut distinguer entre « autre » et « différent » ( 1a ). Toutes les Bonnes Nouvelles qui sont d'inspiration divine sont de la même espèce, donc pas « différentes », mais par contre l'évangile auquel passaient les Galates était de provenance humaine ou démoniaque, donc « différent ».

 

1a (1a) Grec : alles et heteros. Voir Appendice 1.

 

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La grâce de Dieu est telle qu'il peut y avoir beaucoup de Bonnes Nouvelles, beaucoup d'évangiles, mais leur ensemble forme une unité homogène, qui renferme Son dessein. En particulier, il y a une Bonne Nouvelle spécialement pour les Juifs et une autre (mais de même espèce divine) concernant les incirconcis. Ce dernier évangile a aussi été appelé par Paul «mon évangile » pendant les Actes. Après cette période, il a d'autres Bonnes Nouvelles qui complètent la grâce (2).

 

 

2 (2) Tous ceux qui ont étudié avec attention les épîtres de Paul se sont rendu compte qu'elles comportaient des différences frappantes. On a essayé de les expliquer sans y parvenir et quand l'incrédulité moderne a commencé à critiquer les Écritures et à nier leur inspiration littérale, on a cru trouver là des arguments décisifs. On a appelé ces différences de Paul « un progrès constant de ses conceptions chrétiennes ». On parle de " formes élémentaires » de la « connaissance humaine ». S'il était vrai qu'en « aucun moment, ses conceptions ne lui ont paru parfaites ni définitives » on se demande quelle valeur il faudrait attacher à ses écrits. On nous dit aussi que par un nouveau « progrès » la pensée de Paul achève de « se débarrasser des liens de l'eschatologie juive ». Il nous semble que les chrétiens qui croient à l'inspiration littérale et à l'autorité des Écritures portent une lourde responsabilité dans ces choses. Il ne suffit pas de passer sur ces problèmes d'une manière superficielle. Ceci est déjà inconséquent, car si le texte est inspiré, tout doit être pris très au sérieux et être soumis à un examen spirituel profond. Mais la négligence de tels problèmes a singulièrement contribué à répandre les enseignements destructifs et a donné l'impression qu'on ne peut pas expliquer ces variations de Paul. Le lecteur verra que, pour nous, la solution est simple. Nous acceptons la Parole telle qu'elle est, nous l'examinons au microscope, mais nous l'embrassons aussi dans son ensemble. Cette attitude ne nous donne pas seulement une réponse nette, mais montre que la question était mal posée et qu'en fait, il n'existe aucune difficulté. De pareilles difficultés apparentes proviennent du fait qu'on s'est écarté de l'enseignement des Écritures et au lieu de s'éterniser à discuter une question insoluble, il est bien plus simple de rechercher en quel endroit on s'est écarté de la vérité.

Dans le cas présent, il faut avant tout se rendre compte de la mission d'Israël comme nation. Il ne faut pas s'imaginer qu'une « religion chrétienne », fondée par « Jésus » aurait remplacé la « religion juive ». (Voir à ce sujet Le Plan Divin.) il faut aussi se rendre compte qu'il y a une voie du salut comprenant plusieurs étapes, plusieurs sphères. Paul parcourt ces sphères et proclame les Bonnes Nouvelles correspondantes. Ce ne sont pas ses conceptions qui progressent dans le sens qu'elles seraient au début plus loin de la vérité qu'à la fin. Ce qu'il dit est toujours absolument juste et reste juste pour la sphère dont il parle. S'il y a une différence entre ses messages, c'est qu'il y a une différence entre les étapes successives dans la voie du salut. Il y a progression dans ce qui est révélé (Jean 16 : 12-14 Eph. 3 : 5 etc.).

Quant à " l'eschatologie juive », s'il y a un changement, ce n'est pas parce que Paul s'est trompé (ni parce que les prophètes et le Seigneur même se seraient trompé !). Le Christ viendra un jour sur terre pour établir son Royaume. Ce qu'il y eût de changé après les Actes, c'est que par la rejection d'Israël ce Royaume n'était plus « proche ». Dans les épîtres qui suivent cette période, Paul n'attend donc plus la venue imminente de ce Royaume et de tout ce qui l'accompagne.

 

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3.       - Le Message du Royaume et de la Nouvelle Naissance.

 

L'évangile de la circoncision est aussi celui du Royaume. Il est mentionné trois fois (1). Nous avons vu dans Le Plan Divin que cet évangile annonçait à Israël que le Royaume sur terre, faisant l'objet de tant de prophéties, était proche. Il ne fallait plus que la repentance de ce peuple rebelle. Après Jean-Baptiste, le Roi Lui-même était venu annoncer cette bonne nouvelle : « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres ; Il m'a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur. » (Luc. 4 : 18, 19).

Après avoir cité ces paroles d’Esaïe. Il ferma le livre et dit : « Aujourd'hui cette parole de l'Écriture est accomplie. » Il s'arrêta au milieu d'une phrase d'Ésaïe parce que le reste ne s'accomplirait que beaucoup plus tard, juste avant la venue du Royaume.

Le sommaire de ce message, qui devait contribuer à les amener à la repentance et à la nouvelle naissance, était que ce « Jésus » méprisé était le « Christ » c'est-à-dire

l'Oint, le Messie, le Fils de Dieu (2 ).

Or nous voyons que Paul proclame cette nouvelle dès sa conversion. Après quelques jours « il prêcha dans les synagogues que Jésus est le Fils de Dieu » et après il « se fortifiait de plus en plus, et il confondait les Juifs qui habitaient Damas, démontrant que Jésus est le Christ (Actes 9 : 20-22).

 

1 (1) Mat. 4 : 23 ; 9 : 35 ; 24 : 14.

2 (2) Nous rappelons que ce message ne s'adressait qu'aux Juifs. Les Gentils seraient bénis par le moyen du peuple élu ; il fallait donc que ce peuple se repentît et prît la place que Dieu avait prévue pour lui, dans Son dessein. Voir Le Plan Divin. L'évangile du royaume ne dit rien de la croix. Quand le Seigneur parle de Sa mort aux disciples (Mat. 16 : 21), ils ne le comprennent pas et Le reprennent !

 

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À Antioche il enseigna avec Barnabas beaucoup de personnes (Actes 11 : 26). Il est bon de se souvenir qu'il s'agit ici d'assemblées de Juifs-chrétiens. Les premiers Gentils venaient à peine de recevoir la Parole de Dieu (3). Ces Juifs croyant au Messie étaient appelés des « chrétiens » (4).

Envoyés par le Saint-Esprit à Salamine, Barnabas et Paul (qui s'appelle encore Saul) annoncent la Parole de Dieu dans les synagogues des Juifs.

Arrivés à Antioche de Pisidie ils entrent dans la synagogue le jour du Sabbat (Grec : des sabbats) et après la lecture de la loi et des prophètes, le chef de la synagogue les invite à parler au « peuple » (Actes 13 : 14, 15). Il désigne ainsi l'assemblée des Juifs et des prosélytes (5). Paul résume l'histoire d'Israël et arrive au Sauveur d'Israël et à la repentance. « C'est à vous que cette parole de salut a été envoyée. » Il témoigne, comme les Douze, de Sa résurrection (6). « Et nous, nous vous annonçons cette bonne nouvelle que la promesse faite à nos pères, Dieu l'a accomplie pour nous, leurs enfants. » « C'est par lui que le pardon des péchés vous est annoncé». Il dépasse les Douze en faisant déjà allusion à la justification, qui fera plus spécialement partie de son évangile aux incirconcis.

Le Sabbat suivant il n'y a pas seulement des Juifs et des Prosélytes, mais « presque toute la ville » et maintenant les Juifs s'opposent à Paul et celui-ci se tourne, en cette ville, vers les Gentils.

 

(3) Voir le même chapitre v. 1 à 18. Ceci se passe environ dix ans après la Pentecôte.

(4) Actes 11 : 26. D'habitude on considère que " juif » et « chrétien » sont en opposition. Il n'en est rien. Le juif régénéré reste juif. Le terme « juif " n'indique pas une croyance, mais une nationalité. Ce n'est que dans les sphères célestes et sur célestes, qu'il n'y a plus ni juif, ni gentil, c.-à-d. plus de distinction nationale. Tous les juifs de l'éon à venir sont chrétiens tout en restant juifs. Les juifs chrétiens commencent actuellement à se rendre compte de cela et à former des assemblées séparées.

(5) Voir le verset 16 où « vous qui craignez Dieu " indique les prosélytes. C'était le terme, technique » utilisé pour désigner des Gentils, circoncis ou non, qui croyaient en " Jéhovah, et assistaient, séparés des Juifs, aux réunions dans les synagogues. Voir aussi le v. 43 où les prosélytes sont appelés par leur nom, et Actes 13 :26 ; 10 : 2, 22 ; 16 : 14 ; 17 : 4, 17 ; 18 : 7.

(6) Voir aussi 1 Cor. 15 : 11, 12 qui parlent de Paul et des Douze (v. 5-9).

 

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Paul et Barnabas sont chassés. Ils avaient présenté leur message et avaient accompli à la lettre les instructions du Seigneur quand il s'agissait d'aller, non vers les Gentils, mais plutôt vers les brebis perdues de la maison d'Israël pour leur dire que le Royaume était proche (Mat. 10 : 5-7). Le Seigneur avait dit : « Lorsqu'on ne vous recevra pas et qu'on n'écoutera pas vos paroles, sortez de cette maison ou de cette ville et secouez la poussière de vos pieds. » Paul et Barnabas « secouèrent contre eux la poussière de leurs pieds » (Actes 13 : 51).

Paul et Barnabas continuent ainsi à porter les messages du Royaume aux Juifs de la dispersion. À Icône ils entrent dans la synagogue des Juifs et font les prodiges et les miracles (Actes 14 : 1-4) qui sont l'accompagnement normal de ce message (7). Mention est faite des « Grecs ». Comme ceux-ci se trouvent dans la synagogue, ce sont des prosélytes. Les Juifs excitent les « païens » et obligent Paul, et Barnabas à se réfugier à Lystre et Derbe, où ils annoncent la bonne nouvelle. Paul y guérit un boiteux et la foule les prend, avec Barnabas, pour des dieux. Mais Paul n'accepte pas cet hommage et, comme il s'agit d'un milieu païen ne connaissant pas le Dieu vivant, il ne leur annonce pas le Royaume, mais les exhorte à se tourner vers le Dieu-Créateur. C'est une autre Bonne Nouvelle, adaptée à ceux-là et à beaucoup d'autres, même de nos contemporains. Le chemin du salut devait commencer par la crainte du Dieu créateur.

Retournés à Lystre, à Icone et à Antioche, ils rappellent aux disciples que la venue du Royaume est précédée de beaucoup de tribulations. Ils ne font ainsi que confirmer les prophètes, le Seigneur et les Douze.

Nous voyons qu'Israël, dans les villes principales ainsi visitées, rejette en quelque sorte officiellement le message du Royaume et que, par contre, les Gentils commencent à se tourner vers Dieu et vers le Christ. Le temps des Actes est une période de transition. Elle aurait dû conduire au Royaume, mais, vu la non repentance d'Israël, elle aboutit à des bénédictions supérieures à celles d'Israël. Le message du Royaume continue cependant à être proclamé parmi les Juifs de la dispersion dans les endroits où le Messie n'a pas encore été rejeté.

 

7 (7) Mat. 10 : 7, 8 et voir Le Plan Divin.

 

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Mais parallèlement nous voyons se développer l'évangile de l'incirconcision. Barnabas semble cependant vouloir se limiter au message du Royaume.

Mais le Royaume reste toujours « proche » et les signes continuent : Paul est délivré de la prison (Actes 16 : 24-26).

À Thessalonique il entre aussi dans la synagogue et témoigne que Jésus est le Christ (Actes 17 : 1-3). Quelques Juifs et beaucoup de prosélytes sont convaincus. À Bérée, nouvelle visite à la synagogue et les Béréens reçoivent la Parole avec beaucoup d'empressement et chaque jour ils examinent les Écritures, pour vérifier si ce qu'on leur dit est exact. Or il ne peut s'agir ici que des Écritures formant l'Ancien Testament et cela prouvent que le message de Paul aux Juifs n'allait pas plus loin. Rien de ce qu'il annonce en relation avec le Royaume n'est caché.

À Athènes, Paul s'entretient dans la synagogue avec les Juifs et les prosélytes et sur la place publique avec ceux qu'il rencontre. Aux Gentils il annonce, comme à Lystre, le Dieu Créateur et demande leur repentance « vers » Lui.

Chaque Sabbat il parle dans la synagogue de Corinthe et atteste aux Juifs que Jésus est le Christ (Actes 18 : 1-5). Là encore, il se tourne vers les Gentils quand les Juifs font de l'opposition. Nous voyons ensuite Paul dans la synagogue d'Éphèse (Actes 18 : 19 et 19 : 8) discuter pendant trois mois au sujet du Royaume de Dieu (8). Il fait des miracles extraordinaires.

Aux 26e chapitres des Actes, Paul parle encore ainsi:

« Et maintenant, je suis mis en jugement parce que j'espère l'accomplissement de la promesse que Dieu a faite à nos pères, et à laquelle aspirent nos douze tribus, qui servent Dieu continuellement nuit et jour. C'est pour cette espérance, ô roi, que je suis accusé par les Juifs ! » (Actes 26 : 6-8).

Enfin aux 28e chapitres, où nous voyons que la morsure d'une vipère ne lui faisait aucun mal, nous assistons après qu'il a guéri des malades, à la dernière conférence avec les Juifs de Rome.

 

8 (8)Voir version Jérusalem : 19 : 8 et 20 : 25 (dans ce dernier texte les principaux manuscrits n'écrivent pas " Dieu ").

 

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Il parle encore et toujours de l'espérance d'Israël (9), il leur annonce le Royaume de Dieu et cherche, par la Loi de Moïse et par les prophètes à les persuader de ce qui concerne Jésus. Là encore, Israël rejette son Messie et Paul rappelle la sentence d'Esaïe 6 : 9, 10, qui se réalise enfin complètement : Israël a partout fermé ses oreilles et ses yeux, a endurci son coeur. Le salut de Dieu est désormais partout envoyé aux Gentils. Désormais Paul ne parle plus de « Jésus », mais du Seigneur Jésus-Christ ; il ne connaît plus le Christ selon la chair, mais le Christ-Jésus placé à la droite de Dieu. Il proclame le Royaume de Dieu en général, Royaume comprenant toute la création et tous les éons, mais il ne proclame plus le Royaume des cieux localisé sur terre. Le peuple élu est rejeté pour un temps, le Royaume terrestre est temporairement éloigné.

Nous voyons donc en résumé que Paul, pendant cette période, proclame au moins trois évangiles :

1) Il annonce le Dieu-Créateur aux non-croyants en Dieu et leur demande de renoncer aux choses vaines et de se tourner vers le Dieu vivant ;

2) Il annonce la bonne nouvelle du Royaume à la circoncision et aux prosélytes, et les appelle à la foi en Jésus-Christ et la repentance ;

3) Il annonce aux incirconcis croyants en Dieu le Christ et leurs bénédictions en rapport avec Israël.

Dans les Épîtres, nous verrons qu'il proclame également pendant cette période le message de la justification et de la nouvelle création. Dans le livre des Actes, nous ne trouvons que quelques allusions à ce dernier évangile.

Il est bon de penser ici aux promesses abrahamiques. Il faut, dans ce but, considérer quatre catégories d'hommes:

1) Les non croyants en Dieu

2) La grande nation, c'est-à-dire Israël, qui sera béni, possédera le pays de Canaân et sera une source de bénédictions (Gen. 12 : 2, 3) ;

3) Les familles de la terre bénies en Abraham (10). Israël surtout forme la postérité qui est « comme la poussière de la terre » (Gen. 13 : 16) ;

4) La postérité qui sera nombreuse comme les étoiles du Ciel et qui est en relation avec la justification (Gen. 15 : 5, 6).

 

9 (9) Actes 28 : 20. Il est important de noter qu'il s'agit jusqu'à la fin des Actes de l'espérance d'Israël.

10 (10) Il est question des familles de la terre. Gal. 3 : 8 parle d'une bénédiction plus générale,

qui comprend la postérité céleste.

 

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Ces promesses commencent à se réaliser pendant la période des Actes. Les Douze s'adressent surtout à la deuxième catégorie et exceptionnellement à la troisième. Paul s'adresse à tous. Au fur et à mesure que le Royaume est rejeté par Israël et que les promesses concernant cette nation et les bénédictions des Gentils par elle apparaissent comme ne pouvant pas encore se réaliser, Paul se concentre sur le message adressé à la quatrième catégorie et parle de la position céleste en Christ et de la justification. Nous voyons ainsi qu'il faut distinguer entre des catégories de personnes et entre les messages qui leur furent adressés. Il faut cependant se garder ici d'une grave erreur. Tout homme est né pécheur et Dieu veut le conduire au salut. Cela reste toujours vrai, dans n'importe quelle circonstance. Dans ces divers messages, il y a un élément personnel, qui ne change pas et reste toujours indispensable. Ce qui concerne l'homme extérieur et ses rapports avec son entourage, peut varier suivant les dispensations, mais ce qui concerne l'homme intérieur ne varie pas. Ainsi un « non croyant en Dieu » a toujours besoin, quelle que soit la dispensation, qu'on lui présente le Dieu-Créateur. De même tout « croyant en Dieu » doit apprendre aussi à avoir foi en Jésus-Christ. Mais là-dessus se greffe un élément temporaire, qui dépend des circonstances extérieures, des dispensations. Quand le Royaume terrestre est proche, on demande aux «Juifs-croyants-en-Dieu » de croire aussi que Jésus est le Christ. Il y a là un double but : 1e le but personnel ; 2e le but national. Sans repentance et foi en Christ de la part de la nation, pas de Royaume terrestre. Mais lorsque le Royaume est rejeté et que le but national disparaît pour un temps, le premier but subsiste et tout Juif, comme tout autre homme, peut encore être invité à se repentir. Mais l'Écriture ne demande jamais à un « Gentil croyant en Dieu » d'avoir foi en Christ pour que le Royaume vienne. Seule la repentance nationale d'Israël pouvait conduire au Royaume sur terre.

Si nous disons donc qu'après la période des Actes, le Royaume s'est éloigné et que le message du Royaume (ou de la circoncision) n'est plus proclamé, cela ne signifie nullement que l'élément personnel de ce message est devenu inutile ou a été remplacé par un autre message.

 

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Le changement est dans les conditions extérieures et surtout dans le fait qu'Israël (comme nation) est rejeté. Si Paul se concentre sur un évangile céleste, cela ne veut pas dire que désormais, un « non croyant en Dieu » pourra avoir part aux bénédictions supérieures sans avoir foi en Dieu, sans repentir et sans conversion « vers » ce Dieu-Créateur.

Nous verrons au chapitre suivant comment Paul ouvre une sphère nouvelle de bénédiction ; mais nous insistons ici sur le fait qu'il ne cesse pas pour cela d'exhorter des « non-croyants » à se tourner vers Dieu et des « croyants en Dieu » à croire que Jésus est le Christ.

Souvent on nous a reproché de ne garder des Écritures que quelques Épîtres, puisque nous prétendons que tout le reste est « juif ». Or, ce reproche repose sur une grave confusion. Nous disons, en effet, que tout ce qui caractérise la période pendant laquelle Israël est encore le peuple de Dieu n'existe plus maintenant, c'est-à-dire tous les dons et miracles visibles et de pratique courante pour la majorité des croyants, ainsi que toutes les cérémonies, etc., mais nous sommes loin de rejeter pour cela ce qui est personnel et qui reste toujours nécessaire. La voie du salut reste la même, malgré tout changement dispensationnel. Nous nous proposons d'examiner cela plus en détail dans La Voie du Salut.

Nous ne perdons pas de vue que « Tout ce qui a été écrit d'avance l'a été pour notre instruction, afin que, par la patience, et par la consolation que donnent les Écritures, nous possédions l'espérance » (Rom. 15 : 4). Nous avons dans l'A. T. tant d'exemples de l'amour, de la miséricorde et de la patience de Dieu. Non seulement nous pouvons nous appliquer beaucoup de choses d'une manière spirituelle, tel le cas où Paul cite les promesses faites à Israël en 2 Cor. 7 : 1, mais de plus tout ce qui concerne personnellement les régénérés et les justifiés de l’A. T., concerne aussi personnellement les régénérés et les justifiés actuels. Et comment ne pas apprécier ce que les Psaumes nous apprennent de l'expérience personnelle de Salomon, de David et d'autres ? Voir aussi p. 15 de l'Introduction.

 

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4.     Le Message du Royaume dans les Épîtres.

 

Nous verrons plus loin que Paul, dans les épîtres écrites pendant la dernière partie de la période des Actes (Romains, 2e Ep. aux Corinthiens, et Galates, s'occupe presque exclusivement du message céleste, qu'il appelle « mon évangile » (11).

Nous n'examinerons pas ici quel est l'auteur de l'épître aux Hébreux. La Parole garde le silence à ce sujet et nous ne pourrions n'émettre que des suppositions. Ce qui est certain, c'est qu'elle est adressée à des « Hébreux » c'est-à-dire à des Juifs, comme celles de Jacques, de Pierre, de Jean et de Jude. Comme on a généralement trop de tendance à perdre de vue que ces épîtres sont adressées à des Juifs chrétiens, il est peut-être bon d'insister un peu sur ce fait.

Pour ce qui concerne l'épître de Jacques, il n'y a aucune difficulté, il suffit de lire l'adresse : « Aux douze tribus, qui sont dans la dispersion » (2). Il parle de la synagogue (3), de la Loi (4), d' «amis de Dieu » (5), du Seigneur Sabaoth (6), de l'onction (7), etc. Toute cette épître respire l'atmosphère judéo-chrétienne des Actes.

Pierre, dans sa première épître, s'adresse aussi aux « dispersés ». Ils sont des « étrangers » sur la terre pendant cet âge (8). Ces Juifs sont régénérés (1 Pi. 1 : 3, 23). Il parle de la pierre en Sion (1 Pi. 2 : 6) et les désigne comme un « sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis » (9), comme le « peuple de Dieu » (10), comme des « brebis errantes » (11).

 

 

1 (1) Dans les épîtres aux Thessaloniciens, qui sont sans doute les plus anciennes, Paul touche à peine ce qui concerne la sphère céleste. De même pour la première aux Corinthiens.

(2) C'est la « diaspora ». Voir aussi Jean 7 : 35 ; Actes 8 : 1 ; 1 Pi.1 : 1. Jamais ce terme n'indique des Gentils.

(3) Jacq. 2 :2 (Version Darby).

(4) Jacq. 2 :9, 10 ; 4 : 11.

(5) C'est une expression juive caractéristique. Voir 2 Chron. 20 : 7 ; Es. 41 : 8 (Darby).

(6) Jacq. 5 :4 (Darby).

(7) Jacq. 5 :14 et Marc. 6 : 13.

(8) Voir Héb. 11 : 13 et 1 Pi. 2 : 11.

(9) Remarquer que ceci indique des Juifs : Ex. 19 : 6 ; Es. 61 : 6 ; 66 : 21 ; Apoc. 1 : 6. Celui qui veut laisser à Israël ce qui appartient à Israël doit appliquer ces textes à ce peuple.

10 (10) 1 Pi. 2 : 10. Ceci est une citation d'Osée 1 : 9 ; 2 : 25 adressée à Israël. Voir d'ailleurs le contraste avec 1 Pi. 2: 12 où les " païens », c.-à-d. les nations, sont mentionnés.

(11) Voir Mat. 9 : 36. Les Gentils ne sont jamais appelés des « brebis ». Le Seigneur n'est jamais non plus appelé le Berger des Gentils.

 

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Dans sa deuxième épître, Pierre s'adresse aux mêmes Juifs dispersés, puisqu'il l'appelle sa « seconde lettre » (12).

Jean est un des apôtres de la circoncision et il va de soi que ses épîtres sont adressées aux circoncis. Cela ne demande donc aucune démonstration. Au contraire ceux qui croient qu'elles sont adressées à des Gentils devraient justifier cette opinion. Jean met ses lecteurs en garde contre le fait de croire que Jésus-Christ est une victime expiatoire uniquement pour les Juifs ( 1 Jean 2 : 2). Il ne dépasse pas la sphère de la nouvelle naissance (13) et de la vie « éonienne » terrestre. Jamais il ne parle de la justification dans le sens paulinien, ni de la nouvelle création. Nous examinerons cela plus loin. Dans sa troisième épître, il fait le contraste entre les Juifs auxquels il s'adresse et les « païens » (3 Jean 7).

Jude rappelle la délivrance du peuple hors d'Égypte (Jude 5), mentionne Micaël (Jude 9) qui est le défenseur du peuple juif (Dan. 12 : 1) et parle des temps précédant le Royaume (14).

Nous n'insisterons pas ici sur ce qui concerne l'Apocalypse, dont le caractère hébraïque et les nombreuses références à l'Ancien Testament ont amené certains auteurs à vouloir éliminer ce livre du canon des Écritures.

Le lecteur qui voudra bien relire ces écrits en tenant compte de nos remarques pourra se rendre compte que tout demeure dans la sphère du Royaume qui était proche. La fin de l'âge présent semblait peu éloignée.

 

(12) 2 Pi. 3 : 1. Il est curieux de voir l'aveuglement de ceux qui croient que « l'Église » a remplacé Israël. Ainsi Batiffol dit de 1 Pi. : "L'épître est adressée à des chrétiens, qui ne sont pas juifs de naissance (2 : 10), et qui vivent dispersés au milieu des païens (2 : 12). » Or le verset 2 - 10 se réfère évidemment à Osée 1 : 9 et 2 - 25. Israël avait été « Lo-Ammi » (pas mon peuple) mais l'Éternel dirait de nouveau : « Tu es mon peuple. » Il n'est pas question des gentils ici. Le comble est que Batiffol ajoute en note : « Je ne connais pas d'autre exemple de l'emploi chrétien du mot " Dispersion ». Voir l'Église naissante, p. 132.

(13) 1 Jean 5 : 1 et Jean 3 3 et voir le chapitre 9.

(14) Jud. 18 et voir 2 Pi. 31-4.

 

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Le message des auteurs de ces Épîtres est la repentance, la foi en Christ, comme Messie, la nouvelle naissance. Le chapitre suivant fera mieux ressortir que ce message n'atteint pas l'Évangile de Paul.

Toutes les épîtres adressées aux Juifs pendant les Actes contiennent des indications d'ordre national et dispensationnel, qui ne sont applicables qu'à Israël, et seulement tant que ce peuple n'est pas rejeté. Elles contiennent également des éléments personnels, qui avaient pour but de conduire Israël à la repentance, à la nouvelle naissance et à une marche digne de sa vocation. Ces parties sont d'application universelle, mais encore faut-il se souvenir qu'elles ne mènent pas plus loin que la nouvelle naissance et les bénédictions terrestres avec Israël. Après avoir vécu ce qu'il y a de personnel dans ces épîtres, il faut suivre Paul dans sa course vers le but et laisser Jean comme une expérience du passé.

Les épîtres de la circoncision restent toujours utiles, mais elles cessent, pour deux raisons, d'être de première importance pour ceux qui suivent Paul.

1e parce que, en partie, elles concernent uniquement Israël ; 2e parce qu'elles se limitent au commencement de la voie du salut.

Si certains lecteurs ne sont pas convaincus que notre conception est scripturaire, les chapitres suivants pourront peut-être leur faire trouver notre attitude plus acceptable.

 

5.       - Le Message Céleste

 

Il ne s'agit plus ici de bénédictions pour les Gentils par Israël, comme annoncées par les prophètes et confirmées par les apôtres de la circoncision. Dans le Livre des Actes, les épîtres aux Thessaloniciens et la 1e Ep. aux Corinthiens, on ne trouve que des allusions à ce nouveau message, et il est préférable d'examiner d'abord les épîtres que Paul a écrites pendant la dernière partie de la période des Actes, pour se rendre compte en quoi cet évangile diffère de celui des Douze. On pourra ensuite relire les Actes et mieux reconnaître les quelques indications relatives à ce message.

Le message céleste est tellement différent de celui de Pierre et de Jean, que Paul l'a appelé « mon évangile » (Rom, 2: 16 ; 16: 25), et aussi l'évangile de l'incirconcision, (Gal. 2: 7).

 

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Il le nomme encore l'évangile du Fils de Dieu (Rom. 1: 9) et l'évangile de Christ (Gal. 1: 7). Mais quoique ce message ne soit pas celui des Douze, il n'est pas absolument nouveau. En effet, l'Ancien Testament y fait déjà allusion. Ne savons-nous pas qu'avant la formation du peuple élu, avant la circoncision, Abraham savait déjà qu'il aurait une postérité céleste basée sur la justification par la foi (1) ?

Il n'est plus question ici d'hériter Canaan, mais d'être cohéritiers de Christ (Rom. 8: 17 ; Gal. 3: 29).

Il y a cependant encore prééminence des Juifs sur les Gentils, au point de vue national et dispensationnel. Pendant la période des Actes, nous lisons en effet à plusieurs reprises : le Juif premièrement, puis le Grec (c'est-à-dire le Gentil) (Rom. 1: 16 ; 2 : 9-10 ; 3 : 1, 2).

Dans cette nouvelle sphère, il ne s'agit plus de la Jérusalem terrestre, mais de la Jérusalem d'en haut (Gal. 4:25, 26). Paul fait aussi la distinction entre ceux qui - nés de nouveau - sont « enfants de Dieu » et ceux qui sont arrivés à l'adoption comme « fils » (2). Les premiers sont encore esclaves du péché et de la Loi (3), et appartiennent encore à l'ancienne création, tandis que les fils sont libres (Rom. 8: 2 ; Gal. 4: 5, 26), morts au péché (Rom. 6: 2), séparés de l'ancienne humanité (Rom. 6: 6) ; ils ne sont plus « en Adam », mais ils appartiennent maintenant à la nouvelle création parce qu'ils sont « en Christ Jésus ».

 

 

1 (1) Gen. 15 : 5, 6 et p. ex. Rom. 4 : 9-13 ; Gal. 3 : 6-9. Paul avait été spécialement désigné pour proclamer cet évangile. D'autres comme Silvain et Timothée qui n'appartiennent pas aux Douze, présentent le même évangile (2 Cor. 1 : 19 ; 3 : 5, 6 ; 4 : 3).

(2) Gal. 4 : 1-7 et Rom. 8 : 14, 15, 19 (fils = huios). M. Ch. Welch a montré dans le Berean Exposîtor du mois d'avril 1935 que Rom. 8 : 1-39 se décompose comme suit :

A, 11-4. Pas de condamnation. Dieu a envoyé Son propre Fils (huios)

BI 15-15. Conduit par l'Esprit de Dieu. Fils (huios)

CI 115-17. L'Esprit rend témoignage. Adoption (huiothesia)

D 1 17-21. Souffrance et gloire. Manifestation des fils (huios)

C2 / 22-28. L'Esprit intercède. Adoption (huiothesia)

B2 / 29-30. Semblables à l'image de Son Fils (huios)

A2 / 31-39. Qui condamne? Dieu n'a pas épargné Son propre Fils (huios).

On remarque la correspondance entre les parties A, et Au, BI et Bu, Ci et Cu. D est le passage central. De telles « structures » sont une des preuves de l'inspiration divine.

(3) Gal. 4 : 1-3, 25 (le texte n'a pas , enfant » (teknon), mais « mineurs » (nèpios) ; Rom. 7 : 23. Pour la différence entre " sous » et « en » la Loi, voir note NI 54, p. 39, Le Plan Divin.

 

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Tandis que le message du Royaume a en vue l'âge prochain (celui de la régénération), le message céleste est en rapport avec l'âge qui le suivra : celui de la nouvelle création (Gal. 6: 15 ; 2 Cor. 5: 17). Nous restons pourtant toujours dans la série des éons, et il est donc aussi question de la vie « éonienne » (4). Cependant celle-ci ne concerne plus la terre et l'ancienne création comme dans le Royaume, mais le ciel et la nouvelle création. « En Christ Jésus » est l'expression caractéristique de ce message.

L'accent est maintenant mis sur la réconciliation (5) et la justification (6). Nous examinerons ces deux sujets dans un autre chapitre.

Voilà donc l'évangile particulier de Paul pendant la dernière partie de la période des Actes. Lorsque les Juifs rejetaient le Royaume et retardaient ainsi les bénédictions terrestres des Gentils, Paul ouvrait une nouvelle possibilité : la sphère céleste (7). Le but était triple. D'abord le dessein de Dieu ne serait ainsi en rien retardé par la défection des Juifs. Ensuite les Gentils n'auraient pas nécessairement à souffrir de l'apostasie juive. Enfin Israël serait excité à la jalousie (Rom. 10: 19 ; 11 : 11). Nous examinerons ce dernier point au chapitre 7.

Il est bien entendu que les Juifs aussi pouvaient déjà avoir accès, individuellement, et pour ce qui concerne l'homme intérieur, à cette position céleste.

 

4 (4) Rom. 6 : 23 ; Tit. 1 : 2 ; Gal. 6 : 8 et voir Le Plan Divin pour ce qui concerne la signification de « vie éonienne ».

(5) Rom. 5 : 10, 11 ; 11 : 15 ; 2 Cor. 5 : 18, 19, 20. Paul seul parle de la réconciliation.

(6) Rom. 3 et Gal. 2 et 3.

(7) C'est aussi le but de l'épître aux Romains p. ex. Il y a en des discussions interminables dans le monde théologique au sujet de la composition de l'église de Rome. Pour les anciens et quelques modernes c'est une église de pagano-chrétiens, pour les autres elle est essentiellement judéo-chrétienne. Il semble clair qu'elle était composée de ces deux éléments, mais que l'église ne connaissait pas encore le message céleste. Ce message amena une division et prépara l'abandon complet de l'Apôtre après la période des Actes. Voir p. 76

 

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Si cette bonne nouvelle est celle de l'incirconcision, cela ne veut pas dire en effet que le Juif en soit exclu, mais simplement qu'il s'agit des bénédictions promises à Abraham avant que fût instituée la circoncision, et ne mettant pas en cause Israël comme nation.

Pour y avoir part, le Juif devait abandonner toutes ses prérogatives nationales et, comme les Gentils, mourir avec Christ, se séparer en esprit de l'ancienne humanité, être justifié par la foi (Gal. 2: 16). Ce qui ne devait pas l'empêcher de suivre selon la chair les formes extérieures de la Loi.

Nous voyons par tout ceci que cette nouvelle sphère de bénédiction n'a rien à voir avec la Pentecôte. Personne en ce moment n'avait une connaissance détaillée de ces bonnes nouvelles : Paul serait le premier à les proclamer. Par contre, les événements de la Pentecôte étaient promis à Israël (8).

On a parfois cru que ce qui distinguait la Pentecôte, c'était qu'à partir de ce moment le Saint-Esprit « demeurait » dans le croyant, au lieu de le visiter temporairement, comme dans l'Ancien Testament. C'est une erreur. L'esprit n' « habite » pas dans ceux qui appartiennent à la sphère terrestre, mais seulement dans ceux de la sphère céleste (9).

 

6.       Considérations relatives à la Loi

 

Nous avons plus spécialement en vue la Loi particulière donnée à Israël, mais ces considérations s'appliquent en général à tout commandement conforme à la norme divin. Dans Le Plan Divin, nous avons déjà touché plusieurs questions relatives à la Loi (1), mais nous devons maintenant préciser, sans toutefois traiter la matière à fond.

 

8 (8) Actes 2 : 16 ; Joël 2 : 28-31 ; Es. 44 : 3 ; Ezech. 36 : 26, etc. Voir aussi Le Plan Divin.

(9) Voir Rom. 8 - 9, il par exemple. Nous avons déjà fait remarquer dans Le Plan Divin que les dons spirituels n'étaient pas permanents, mais passagers. On a pensé pouvoir attacher une signification spéciale à l'expression « remplis du SaintEsprit » utilisée au début des Actes (Actes 2 : 4 ; 4 : 31). Or il s'agit ici non du Saint-Esprit lui-même, mais de Ses dons, qui sont souvent indiqués par ce nom. Cela se voit clairement dans le texte grec, où il n'y a pas d'article et où « esprit » est au génitif. En contraste avec ceci, l'Épître aux Éphésiens parle d'être rempli (ou plutôt « accompli »), par l'Esprit, Eph. 5 : 18. Ici le datif indique la personne qui agit. Voir aussi Appendice 2.

(1) Voir p. 35, 77 et l'Appendice 6.

 

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Dieu donne une série de commandements pour faire connaître Sa volonté (Rom. 2 : 18, c à d qui est normal. Ceci est indispensable pour que l'homme puisse parvenir au but que Dieu a en vue ; parce que, de lui-même, l'homme n'a rien d'absolu, rien qui puisse lui montrer à quoi il doit parvenir.

Mais en demandant ce qu'Il veut, Dieu semble demander l'impossible, car l'homme ne peut pas faire par ses propres efforts ce qui est juste.

La Loi doit ainsi avoir pour effet :

1e de montrer à l'homme la norme voulue par Dieu ;

2e De le rendre conscient de son péché en lui faisant sentir, par l'expérience, son impuissance à se conformer à la volonté de Dieu (2) ;

3e D'anéantir son orgueil à tel point qu'il s'adresse finalement à Dieu.

Il est bien vrai que « l'homme qui mettra ces choses en pratique, vivra par elles » (Rom. 10 : 5), mais pour les mettre en pratique il faut avoir la grâce divine. L'homme naturel ne se rend pas facilement compte de son péché, et il peut croire naïvement qu'il suffit que Dieu lui dise ce qu'il doit faire pour qu'il le fasse. S'il n'était pas aveuglé, il pourrait pourtant observer que la connaissance de la volonté divine l'excite souvent à enfreindre cette volonté (Rom. 7 : 8).

Nous savons comment Israël n'a pas eu recours à cette grâce et devra encore passer par la grande tribulation avant de se repentir et de se tourner vers Christ. Tous ceux qui veulent observer la Loi par leurs propres efforts et disent : « Nous ferons tout ce que l'Éternel a dit » (3) sans se jeter d'abord à Ses pieds en reconnaissant leur péché, deviennent esclaves de la Loi (Gal. 4 : 3), se placent « sous » la loi (Rom. 6 : 14) et sous la malédiction (Gal. 3 : 10, 13). Par expérience ils devront apprendre à connaître leur péché.

Le commandement est saint, juste et bon (Rom. 7 : 12), mais ne vivifie pas (Gal. 3 : 21) et ne donne pas par lui-même la possibilité de l'accomplir. Il est donc impossible

d'être justifié par la Loi ou par les oeuvres.

 

2 (2) Rom. 3 :19, 20 5 : 20 ; 7 : 7-13 ; Gal. 3 :19.

(3) Ex. 19 : 8 ; 24 1-3, 7, 8. La grâce de Dieu était cependant offerte depuis longtemps et beaucoup d'Israélites l'ont acceptée. Ex. 22 : 25-27 ; 34 - 5-7 ; Ps. 116 : 5 ; 103 : 2-10, etc.

 

 

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Quand Israël se repentira, un des buts de la Loi sera atteint. Mais cela veut-il dire que les Juifs ne devront plus faire ce que Dieu leur demande ? Au contraire les commandements ont été donnés pour être observés, et s'il est vrai que les Israélites devaient être régénérés avant d'aimer la Loi, ce serait un peu trop extraordinaire qu'étant parvenu là, ils ne soient plus obligés de les accomplir. Quand Israël sera de nouveau « Mon Peuple », la Loi sera toujours là.

Si le lecteur n'aime pas ce raisonnement, qu'il accepte au moins les affirmations de la Parole à ce sujet. La Loi est « éternelle », c à d. durera pendant tout l'âge prochain (4). Le Seigneur a dit : « Car je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne, passeront pas, il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre, jusqu'à ce que tout soit arrivé. » Or le ciel et la terre ne « passeront » qu'à la fin de l'âge prochain, quand viendront « un nouveau ciel et une nouvelle terre. » (Apoc. 21 : 1 ; 2 Pi. 3 : 13). Israël aura alors accompli ses fonctions. Ézéchiel ne donne-t-il pas des détails minutieux de tous ces commandements, qui comprennent toujours la circoncision de la chair et les offrandes animales pour l'éon prochain ? (Ezéch. 40 à 45).

Pendant l'âge à venir s'accomplira ce que les prophètes ont dit concernant la Nouvelle Alliance avec Israël et la régénération qui sera le premier pas pour, changer leur coeur de pierre en un coeur de chairs : « Je mettrai ma loi au-dedans d'eux » (5). Le Psaume 119 sera alors chanté, non par quelques hommes régénérés, mais par tout Israël. Ils prendront, comme tout homme né d'en-haut, « plaisir à la loi de Dieu selon l'homme intérieur » (Rom. 7 : 22). Ils auront par cette naissance de l'Esprit, l'intelligence nécessaire pour discerner exactement ce que Dieu désire d'eux, y compris la profonde signification de toutes les cérémonies, qui mettront journellement devant leurs yeux toutes les grandes vérités. Ils aimeront ces commandements et pourront exécuter les cérémonies d'une manière entièrement conforme à la volonté de Dieu. Chez eux, pas de disputes concernant le baptême d'eau, la Pâque, etc.

 

4 (4) Ex. 27 : 21 ; 28 : 43, etc. Voir Le Plan Divin pour la signification d' « éternel ».

(5) Jér. 31 : 31-34 et Héli. 8 : 10 ; 10 : 16.

 

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Mais tout cela est loin d'être parfait. Bien que régénérés, ils ne sont que des « enfants mineurs » et comme tels ils ne diffèrent en rien d'esclaves, quoiqu'ils soient les maîtres de tout (6). Ceci était déjà le cas pour les régénérés de l'Anc. Testament, mais s'appliquera également à ceux qui vivront pendant l'âge à venir.

Les conditions sur terre, pendant le règne du Seigneur, sont entièrement différentes des nôtres (7) mais encore loin de la perfection. Celui qui est arrivé à la nouvelle naissance est encore semblable à un petit enfant qui doit être conduit par des tuteurs et des administrateurs. Bien qu'aimant ce que Dieu veut et voulant l'accomplir, il appartient encore à l'ancienne création et est captif de la loi du péché (8). Il est encore sous l'esclavage des rudiments du monde, « sous » la loi (Gal. 4 : 3-5). Il tâche d'observer une série de préceptes extérieurs et n'agit pas encore comme un « fils », qui, sans préceptes, fait ce que Dieu veut par le Saint-Esprit qui habite en lui. L'humanité a besoin de beaucoup de temps pour évoluer librement selon le plan divin.

Que faut-il donc de plus ? Par la régénération on est venu en contact avec le monde spirituel, avec la nouvelle création, la nouvelle humanité, mais on appartient toujours à l'ancienne humanité, on est encore « en Adam ». Il faut quitter cette sphère, c à d mourir au péché, laisser crucifier le vieil homme, laisser détruire le corps de péché. Alors on sera aussi mort à la Loi et donc dégagé de la loi (9).

 

6 (6) Gal. 4 : 1. :Le verset 4 indique le moment historique du rachat. Il ne faut pas conclure de ce verset que tout ceux d'avant la croix étaient des « enfants » et tous ceux d'après des « fils ». Abraham p. ex. avait déjà part à la bénédiction qui n'était rendue possible historiquement qu'à la croix. Inversement des multitudes seront encore « enfants » et n'auront pas encore reçu l'adoption comme fils dans l'éon à venir

(7) Voir Le Plan Divin.

(8) Hom. 7 : 14-25 et voir les chapitres concernant le « Message Céleste » et la « Justification » .

(9) Rom 6. Ceci ne veut pas dire que l'on ne doit plus faire ce que Dieu demande ! La loi, dans le sens de « volonté de Dieu ,, reste toujours applicable, mais on est délivré de la condamnation de la loi (Gal. 3 : 13). Il est important ici de distinguer la " Loi » spécialement donnée à Israël, contenant des prescriptions inapplicables à nous, de ce qui est la volonté immuable de Dieu envers les hommes en général. La volonté de Dieu est une et ne change pas. Mais elle peut se présenter à l'homme sous divers aspects adaptés aux temps et aux circonstances. Ainsi le peuple d'Israël a reçu une « Loi » à lui dont le fond : aimer Dieu et son prochain, est d'application universelle, mais dont la forme est particulière. Cette « Loi » ne se composait pas seulement des " dix commandements », mais comprenait aussi toutes les institutions cérémonielles et sociales. Telle qu'elle est adressée à Israël, elle n'est pas applicable aux Gentils.

 

 

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On ne sera plus esclave du péché, ni captif de la loi du péché (Rom. 6 : 7 ; 7 : 23), mais affranchi (Rom. 8 : 2). D'enfants mineurs, on sera devenu « fils » de Dieu (10).

Que devient alors la Loi ? Elle reste toujours dans son essence, mais l'attitude des « fils » vis-à-vis d'elle est complètement changée. Elle n'est plus pour eux une série de préceptes qu'ils s'efforcent de suivre ; ce n'est plus une « lettre ». Les cérémonies ne leur sont plus imposées. Maintenant ils sont entrés dans la nouvelle création, ils sont « en Christ-Jésus », Lui-même agit en eux, la Loi est accomplie en eux (Rom. 8 : 4), ils servent dans un esprit nouveau (11).

L'esprit de la Loi reste, la forme change, car certains commandements n'avaient un sens que tant que ceux auxquels ils étaient destinés n'étaient pas arrivés à l'état de « fils » ; ils devaient les aider à y parvenir. Toutes les cérémonies, qui ne sont que l'ombre des choses, sont écartées. Quand l'humanité sera passée de l'éon de la nouvelle naissance à celui de la nouvelle création, il n'y aura même plus de temple (Apoc. 21 ; 22). C'est le Seigneur Lui-même qui remplacera tout ce qui était la « lettre ».

Ce qui précède a rapport à Israël comme peuple et à l'humanité. Quand il s'agit d'individus, les choses peuvent être un peu différentes. En effet personne ne doit attendre pour recevoir les bénédictions divines que la masse se soit engagée dans la voie du salut. Abraham était déjà justifié, donc « fils ». De même beaucoup d'autres après lui.

 

(10) Rom. 8 : 14, 15 ; Gal. 3 : 26 ; 4 : 5-7. Il faut noter la précision avec laquelle les mots sont choisis dans l'original. GaL 3 : 26 dit : « Car vous êtes tous fils de Dieu par la foi eu Jésus-Christ » et précise donc ce que la foi des v. 23 à 25 embrasse. Les régénérés avaient déjà cru « jusqu'en » (Grec : eis) Christ, mais pas encore « en » (Grec : en) Lui. Ceci sera développé dans La Voie du Salut.

(11) Rom. 7 : 6. Faisons une comparaison banale : Pour certains travaux on peut utiliser des aides auxquels on donne des instructions minutieuses ou bien un initié qui comprend l'esprit de la chose. Les premiers tâcheront de suivre tout à la lettre, mais risquent de mal faire le travail. L'initié arrivera sûrement au but sans aucune prescription extérieure.

 

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Avant la croix le nombre de régénérés a été relativement considérable quoique Israël ne l'était pas en tant que nation. À la Pentecôte les dons particuliers ont révélé qu'il y en avait des milliers.

Pendant les Actes, nous voyons une variété de groupe de croyants. Il y a des croyants en Dieu, mais non régénérés, d'autres sont nés de nouveau, mais encore « enfants mineurs » et enfin il y a les « fils » de Dieu. Les « enfants » et « fils » devanceront le temps où toute l'humanité sera dans ces sphères correspondantes. Ils n'occupent leur position qu'en esprit. Leur corps n'y a pas encore part. Comme tous ces croyants vivent ensemble, ceux des sphères supérieures doivent bien des fois s'abaisser par charité dans les sphères inférieures et ainsi imiter le Seigneur (Phil. 2 : 5-8). Un « fils » peut dans ces conditions être amené à suivre la lettre de la Loi et il n'y a rien d'étonnant de lire que Paul montre en public qu'il se conduit en observateur de la Loi, se purifie, entre dans le temple et offre des offrandes (Actes 21 : 22-26). La Loi était en vigueur. S'il est vrai que Paul, mort à la Loi, n'était pas astreint aux cérémonies, il lui était impossible de faire comprendre cela à ceux qui n'étaient pas encore morts à la loi. Ne pas observer les cérémonies aurait donc donné l'impression qu'il les considérait comme déjà abolies, alors qu'elles ne le seront absolument qu'à la fin de l'éon à venir.

La période des Actes présente donc souvent des situations compliquées du fait que diverses sphères sont représentées, que plusieurs messages sont dispensés. Cette période aurait due être une transition jusqu'au Royaume terrestre, alors que du fait de la non-repentance d'Israël elle a conduit à la situation actuelle, ignorée des prophètes et des Apôtres de la circoncision.

Nous pouvons donc distinguer pendant les Actes des hommes occupant les quatre positions suivantes :

1° Sans Loi

2° avec la Loi, mais sans la grâce

3°Avec la Loi et la grâce, mais encore sous le péché

4° affranchis de la Loi et du péché ; la Loi accomplie en eux.

Le tableau suivant donne un résumé de ce que nous avons examiné dans ce chapitre.

 

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Zone de Texte: (Rom.7 :4)Zone de Texte: (Rom.6 :11)Zone de Texte: (Rom.7 :6)Zone de Texte: (Rom.8 :4)Plan div

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7.       L'Histoire de l'Olivier

 

Les Écritures parlent à titre symbolique de différents arbres. Ainsi dans le livre des Juges il est question au neuvième chapitre de quatre arbres :

1. L'olivier (v. 8) qui produit l'huile (v. 9)

2. Le figuier (v. 10) qui produit la douceur et un excellent fruit (v. 11)

3. La vigne (v. 12) produisant le vin qui réjouit (v. 13) (1)

4. Le buisson d'épines (v. 14)

Or dans d'autres textes nous trouvons qu'Israël (ou ses représentants) sont symbolisés par ses arbres. Nous ne mentionnons que quelques textes qui se rapportent à l'olivier :

Jér. 11 : 16. « Olivier verdoyant, remarquable par la beauté de son fruit, tel est le nom que t'avait donné l'Éternel. »

Os. 14 : 6. « Il (Israël) aura la magnificence de l'olivier. »

Hab. 3 : 17 « Le fruit de l'olivier manquera. »

Zach. 4 : 14. « Ce sont les deux oints », c'est-à-dire Zorobabel et Josué qui représentaient le peuple.

Apoc. 11 : 3, 4. « -Mes deux témoins... ce sont les deux oliviers. »

L'olivier symbolise les prérogatives spirituelles et particulièrement celles d'Israël :

« Quel est donc l'avantage des Juifs, ou quel est l'utilité de la circoncision ? Il est grand de toute manière, et tout d'abord en ce que les oracles de Dieu leur ont été confiés » (Rom. 3 : 1, 2).

« À qui appartiennent l'adoption, et la gloire, et les alliances, et la loi, et le culte, et les promesses, et les patriarches, et de qui est issu, selon la chair, le Christ... » (Rom. 9 : 4, 5).

Romains 11 surtout est instructif en ce qui concerne l'olivier. Paul parle aux Gentils, dont il est l'apôtre (v. 13) et les appelle un olivier sauvage (v. 17). Des groupes de Gentils forment les « branches » de cet olivier (v. 24), entés à la place de quelques branches de l'olivier franc (17, 24).

 

1 (1) Jean 15 parle de la vigne, qui, ici aussi, représente Israël.. Il demeure toujours pour nous une application personnelle de ce qui est destiné à Israël. Les paroles ne nous sont pas adressées, mais peuvent nous être applicables, tout au moins en partie.

 

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Il désigne donc clairement d'une part des groupes israélites tombés dans l'endurcissement (v. 25), ne croyant pas en Christ, et, d'autre part, des groupes de Gentils, participant de la racine et de la graisse de l'olivier (v. 17). L'olivier sauvage représente l'ensemble des Gentils, l'olivier franc tout le peuple d'Israël. La racine peut symboliser les promesses abrahamiques. Les incirconcis ont reçu certaines bénédictions naturelles (Actes 14 : 17), mais Dieu les a laissés suivre leurs propres voies et ils étaient « sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde » (Eph. 2 : 12). Pendant ce temps, Israël occupait le premier plan et nous avons vu comment le Seigneur Lui-même ne s'adressait qu'à eux. Ils devaient occuper la position voulue pour que le dessein de Dieu s'exécutât et que les bénédictions puissent venir aux Gentils.

Romains 11 nous présente une image inspirée des conditions de la période des Actes. Conformément aux promesses abrahamiques, Dieu a suscité en premier lieu Israël, le peuple terrestre, et les nations sont provisoirement laissées à l'écart. C'est par Israël que les bénédictions relatives au Royaume terrestre doivent leur parvenir. Mais Israël ne se repent pas, ne réalise pas sa position et retarde ainsi la régénération mondiale. En partie pour exciter Israël (Rom. 10 : 19 ; 11 : 11), Dieu fait participer des groupes de Gentils aux bénédictions abrahamiques (2) et cela pour ainsi dire avant le temps.

Ce qui est de suprême importance ici, c'est de voir que l'olivier n'a rapport qu'aux bénédictions spirituelles et non à des prérogatives nationales. Si les nations ont déjà part à ce qui est spirituel, cela ne veut nullement dire que les croyants de ces nations remplacent entièrement Israël et encore moins que les promesses nationales de ce peuple sont définitivement écartées.

 

2 (2) On a critiqué Paul pour avoir dit que des branches de l'olivier sauvage sont entées sur l'olivier franc, sous prétexte que cela ne se fait pas. Or cette pratique était parfaitement ,,connue et est encore de nos jours utilisée en Palestine et même chez nous pour d'autres arbres. Ainsi le poirier « Doyen du Comice » ne produit habituellement que peu de fruits, mais on a trouvé qu'en entant sur cet arbre une branche d'une autre espèce tout l'arbre devient productif. Ce cas est cité par Mr. C. H. Welch dans son livre The Apostle of the Reconcilialion, p. 211

 

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Pendant les Actes, Israël, même dépouillé de certaines de ses parties au point de vue spirituel, existe toujours dans son ensemble c à d. comme olivier, comme figuier, comme vigne. D'autres peuvent avoir part aux bénédictions spirituelles, mais rien ne remplace ce peuple sous ses aspects nationaux, sociaux et religieux (3). La Parole ne dit nullement que l'olivier franc, le figuier, ou la vigne sont abattus à la Pentecôte. Ce qu'on a nommé « l'Église » n'a d'aucune manière remplacé Israël. Il y a des croyants en Jésus --Christ parmi les Juifs et parmi les Gentils et si l'on veut désigner leur ensemble par le nom d' « Église », il s'agit ici de ceux qui ont part à la sphère céleste. Israël, comme peuple, reste toujours l'élu qui aura comme mission sur terre de devenir bénédiction pour les autres nations. Dès qu'il se repentira, le Seigneur en fera son église terrestre (Mat. 16 : 18). Ce sont eux qui formeront l'Église « visible » sur terre ; les autres, même s'ils s'assemblent, ne constitueront jamais cette unité visible du Royaume sur terre. Pendant les Actes, les Juifs qui, conjointement à un certain nombre de Gentils, ont part aux bénédictions célestes, nationalement restent des Juifs, mais spirituellement ne le sont plus. Les Juifs qui croient en Christ comme leur Messie et restent dans la sphère terrestre, sont l' « Israël de Dieu » (Gal. 6 : 16), les vrais Israélites (Rom. 2 : 28 ; 9 : 6).

Les Gentils ne sont pas entés sur l'olivier afin d'éliminer Israël, mais cette greffe a pour but de sauver Israël comme nation. C'est la dernière tentative pour l'amener à la repentance, la dernière tentative pour l'avènement du Royaume terrestre. L'olivier était toujours debout (4).

 

3 (3) Pendant le Royaume terrestre, Israël rassemble en une seule unité l'Église (terrestre) et l'Etat. Ceux qui pendant la période actuelle prétendent remplacer Israël devraient aussi être un « sacerdoce royal » (l Pi. 2 : 9) et diriger le monde à tous les points de vues. Tous les conflits actuels culmineront dans celui du temps de l'Antéchrist et prouveront l'erreur fondamentale de ces " églises ». La seule Église terrestre visible sera celle que le Seigneur bâtira dans l'âge prochain. Cette Église ne comportera pas deux groupes, l'un terrestre, l'autre céleste, mais tous les membres seront sur terre. Les « portes du Hadès » ne prévaudront point : tous les membres de l'Église ressusciteront et seront sur terre. C'est la seule Église dont le Messie dit " mon Église ".

(4) Il est peut-être nécessaire de faire remarquer que pour « chute " en Rom. 11 : il, il faut lire « faute , comme la version Darby le met en note, Le grec a : « paraptôma », traduit couramment par « offense » (Rom. 4 : 25 ; 5 : 15). Leur faute ou offense était leur manque de foi dans le Seigneur. C'est pour cause d'incrédulité que des branches sont retranchées (Rom. 11 : 20).

 

 

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Dans notre chapitre IV nous avons vu comment les représentants d'Israël ont rejeté leur Messie successivement dans les grands centres. Les principales « branches » retranchées étaient celles de Jérusalem (Mat. 13 : 11-15), d'Antioche (Actes 13 : 46, 51), de Corinthe (Actes 18 : 6), d'Éphèse (Actes 19 : 9) et finalement de Rome (Actes 28 : 26-28). C'est la réalisation de la prophétie d'Es. 6 : 9. Des « branches sauvages » sont entées à leur place (5) et ont part aux bénédictions abrahamiques, sans empiéter d'ailleurs sur les prérogatives nationales, sociales et religieuses d'Israël (6).

Quelle est la fin de l'histoire de l'olivier ? La dernière branche naturelle a été retranchée à Rome à la fin des Actes. Israël a été rejeté comme peuple, c à d. nationalement. Depuis ce temps l'olivier (et avec lui les autres « arbres » représentant ce peuple sous d'autres aspects) a été coupé parce qu'il ne produisait pas de bon fruit (Mat. 3 : 10). Seule la racine (les promesses abrahamiques) reste. C'est la situation actuelle que nous examinerons de plus près dans notre deuxième partie.

Tant qu'Israël n'est pas de nouveau accepté comme peuple de Dieu, le symbole des arbres ne peut plus être utilisé. Il n'y a ni arbre, ni branches. Il ne reste que des individus ayant, par leur communion avec Christ, part aux bénédictions célestes. Si la racine de l'olivier représente les promesses abrahamiques, ces croyants en Christ peuvent tout au plus être représentés par de petites tiges qui poussent sur la racine.

Mais ce n'est pas là la fin de l'histoire. Un jour l'arbre repoussera et ses rameaux s'étendront (Os. 14 : 6, 7). Israël, après son repentir national, s'appropriera toutes les bénédictions terrestres promises et les communiquera aux Gentils.

Nous avons représenté cette histoire par une figure, qui ne nécessite aucune explication après ce qui précède.

 

5 (5) Voir p. ex. Actes 13 : 48 ; 18 : 10 ; 19 : 10 ; 28 : 28.

(6) Il leur était p. ex. défendu sous peine de mort d'entrer dans les bâtiments intérieurs du temple. Il y avait un « mur de séparation » (Eph. 2 : 14).

 

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Le symbole de l'olivier pourra nous aider à nous rendre compte de la différence énorme qui existe entre les circonstances du temps des Actes et celles de la période actuelle. Ce qui est personnel dans les messages des prophètes, du Seigneur, des Douze, de Paul, reste toujours indispensable pour tout homme, mais tout ce qui a rapport à la vie nationale, sociale et religieuse (ainsi, par exemple, toute organisation visible formant une unité imposante, toute cérémonie religieuse, toute prescription sociale donnée en relation avec Israël) cesse. Après les Actes on entre dans l'économie du grand Mystère, qui dépasse tout ce qui se rapporte à Abraham.

Si notre vision est juste, au moins dans les grandes lignes, on se rendra compte que l'idée communément répandue, à savoir que : « L'Église a remplacé Israël », doit introduire partout la confusion avec ses résultats désastreux.

 

8.       La Justification.

 

Dans Le Plan Divin, nous avons déjà fait allusion à la nécessité de distinguer entre le pardon des péchés et la justification. La parabole du Roi et des serviteurs (Mat. 18 : 23-35) a servi à nous rendre compte de la manière dont Dieu agit envers le pécheur. Dès que l'homme se tourne vers Lui et reconnaît son impuissance, Dieu lui pardonne, c à d. que provisoirement Il ne lui demande pas de payer sa dette. Le pardon est donc conditionnel, le pécheur devant d'abord croire en Dieu et se tourner vers Lui. Le pardon est aussi temporaire, il peut être retiré. En effet, si le pécheur abuse de la situation et n'agit pas conformément à cette première grâce et aux possibilités qui lui sont données, Dieu exige de nouveau le payement intégral (1).

Celui auquel les péchés ne sont que pardonnés (2) n'est pas encore justifié. Il reste pécheur.

 

1 (1) Ne pas « imputer n'est pas la même chose que remettre. Rom. 4 : 8 et 2 Cor. 5 19 ne concernent pas la rémission des péchés, mais la justification. En Actes 13 : 38, 39 Paul n'identifie pas ces deux, mais il place la justification après la rémission des péchés. De même en Rom. 4 : 7, 8.

(2) Nous ne parlons ici que du mot grec « aphièmi », et pas du pardon complet exprimé par le mot « charizomai », comme en Eph. 4 : 32.

 

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Une personne est justifiée quand elle est trouvée et donc déclarée sans faute, non coupable. Un coupable peut recevoir le pardon, mais ne peut pas être appelé juste. Un juste n'a pas besoin de pardon. Le pardon permet au coupable de changer sa vie, mais n'efface pas le passe : il reste toujours coupable de ce qu'il a fait. Seule la mort peut annuler le passé. Tout cela est élémentaire, mais d'importance capitale non seulement pour comprendre les enseignements de Paul, mais pour ne pas dévier de la voie du salut. C'est donc essentiel pour celui qui veut aider son semblable.

L'Ancien Testament nous a appris que l'Éternel ne tient point le coupable pour innocent (3). Cela est-il changé dans le Nouveau Testament ? Voyons. L'épître aux Romains nous dit que l'homme est justifié par la foi (Rom. 3 : 28). La foi elle-même n'est pas une oeuvre (Rom. 4 : 4, 5), mais une grâce. Jamais l'Écriture ne dit que la justification vient par la foi, dans le sens qu'elle a sa source dans la foi, mais elle dit que la foi est le moyen par lequel la justification est possible (4). La foi n'a aucune valeur en elle-même, elle ne peut servir que d'instrument.

Le chapitre IV de l'épître aux Romains ne nous explique pas comment la foi, qui en elle-même n'a aucune valeur, peut mener à la justification.

Le cinquième chapitre nous dit un peu plus : « Nous sommes justifiés par son sang » (Rom. 5 : 9). Nous voyons immédiatement que la cause de notre justification réside en Christ et, d'une manière plus précise, dans Son sang.

Mais la solution complète ne se trouve qu'au chapitre VI où nous remarquons les expressions : « morts au péché » (v. 2, 10), « c'est en sa mort que nous avons été baptisés » (v. 3), « si nous sommes devenues une même plante avec Lui » (v. 5), « notre vieil homme a été crucifié avec Lui » (v. 6), « mort avec Christ » (v. 8). Et le verset 7 dit (d'après le texte grec) : « celui qui est mort est justifié du péché. » Il n'y a qu'un seul moyen d'atteindre à la justification : c'est la mort, la mort au péché, la crucifixion de notre vieil homme, de ce que nous sommes en Adam.

 

3 (3) Ex. 34 : 7. Il y a bien des choses à dire sur cette traduction, mais elle exprime exactement la pensée du texte original.

(4) Ceci est clair dans le texte grec. " Dia » avec l'accusatif veut dire à cause de » ; « dia » avec le génitif veut dire " au moyen de ou " au travers de ». Or quand il est question de la justification, c'est toujours le génitif qui est utilisé.

 

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Et la foi en Christ (qui est autre chose que la foi que Jésus est le Christ, le Messie) est le seul moyen qui nous permettra, par notre communion avec Lui, de mourir ainsi. Par cette mort seule le passé est effacé, et la nouvelle créature partage la justice du Seigneur. Considérant sa position devant Dieu, le croyant en christ n'est donc plus pécheur, mais justifié. Dans La Voie du Salut, nous verrons plus en détail l'importance de distinguer entre foi et foi. La Parole indique elle-même ces distinctions et montre que toute foi ne conduit pas de plano à la justification. Paul seul parle de la foi « en Christ-Jésus » (5) qui fait partie de la sphère céleste. Cette foi comprend un abandon complet de soi-même et de tout ce qui est en rapport avec Adam, de tout ce qui est du « Vieil homme ».

Nous voyons donc que l'affirmation de l'Ancien Testament reste toujours vraie : le coupable n'est pas tenu pour innocent et ne saurait éviter la punition. Par la foi en Christ il est baptisé en Sa mort et subit en esprit avec Christ la peine du péché : il meurt. Lui seul ne peut ni mériter la justification (p. ex. par ses oeuvres), ni subir la peine. Il ne peut pas crucifier le vieil homme, mais seulement accepter par la foi, ce que le Seigneur a fait pour lui en mourant sur la croix. Par la communion en cette mort, il quitte l'ancienne humanité d'Adam et entre, « en Christ-Jésus », dans la nouvelle création.

Que l'on ne s'imagine donc pas que Dieu ferme les yeux sur le péché, que Son amour est si grand qu'Il justifie sans jugement. Ce serait Le rendre injuste. Il faut maintenir d'une manière absolue aussi bien la Justice que l'Amour de Dieu et l'unique solution, la solution divine, c'est Christ. Lui est mort pour nous permettre de mourir, non en suivant Son exemple, mais en mourant avec Lui. Il a porté nos iniquités, mais nous devons partager en esprit le supplice et cela est possible par la foi en Lui.

Tout cela n'est pas symbole, mais réalité spirituelle profonde. Ne soyons pas matérialistes et ne tenons pas seulement pour réel ce que nous voyons se passer dans le temps et qui ne peut être dès lors que partiel, douteux et relatif. Ce n'est que dans le domaine spirituel, dans l'absolu, que nous pouvons vraiment mourir avec Christ. Et là le temps n'existe pas.

 

5 (5) Nous nous référons au texte grec.

 

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Que la mort de Christ ait, suivant les données humaines, eu lieu il y a 1.900 ans, n'empêche en rien notre participation spirituelle à Sa mort (6).

Nous espérons que le lecteur voudra bien convenir que la justification dépasse de loin le pardon des péchés. La mort avec Christ est une étape importante dans la voie du salut. Le pardon concerne la marche du régénéré, la justification concerne une nouvelle position. Le juste est mort au péché, séparé d'Adam, du vieil homme (7). Les Douze proclament le message de la nouvelle naissance et du pardon. Paul va plus loin et parle pendant la période des Actes de la justification et de la nouvelle création. La nouvelle naissance reste dans la sphère terrestre et dans l'ancienne humanité adamique, la nouvelle création concerne le groupe céleste et atteint la sphère supérieure en Christ. Au point de vue personnel, tout homme doit passer par la nouvelle naissance avant d'atteindre la justification et devenir une nouvelle création par sa mort avec Christ. Il est alors délivré de l'esclavage, justifié du péché, « en Christ-Jésus ».

Selon le cours normal du dessein de Dieu, le monde aurait passé tout entier à la nouvelle naissance avant que la nouvelle création eût été proclamée. Tous auraient eu un corps changé ou ressuscité avant d'entrer dans la nouvelle sphère. Ils auraient atteint l'adoption comme « Fils » lors de la rédemption de leur corps (Rom. 8 : 23). L'endurcissement d'Israël a eu comme conséquence que la sphère céleste a été pleinement accessible avant la régénération mondiale, avant le changement ou la résurrection. Il s'ensuit un état anormal : notre corps est encore humilié et dans la sphère terrestre adamique, tandis qu'en esprit nous pouvons déjà être placés dans la sphère céleste.

 

6 (6) On pourrait comprendre jusqu'à un certain point l'idée du « sacrifice perpétuel » inclus dans la messe romaine, si l'on insistait exclusivement sur le fait spirituel. Malheureusement l'insistance mise sur la présence réelle et matérielle, condamne d'autant plus cette pratique, qui au surplus imite la Pâque juive.

(7) Ceci ne veut pas dire que le péché est mort en lui, qu'il est sans péchés. Celui qui croit en Christ est, par. la communion ainsi établie, mort au péché et donc juste. Ceci concerne sa position , en Christ-Jésus ». Mais il n'est pas parfaitement saint selon sa marche. il est mort en esprit, mais sa chair n'a pas eu part à cette mort et reste le siège du péché. Mais celui-ci ne doit pas dominer. Nous développerons ceci dans La Voie du Salut.

 

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De là des souffrances, des soupirs (8).Nous terminerons cette note concernant la justification en attirant l'attention sur le fait que le mot « justice » a plusieurs significations dans la Parole, de Dieu. Il y a d'abord la justice absolue, qui est opposée au péché. C'est une conformité absolue à la norme de Dieu. À ce point de vue, il n'y a qu'un seul juste : Le Seigneur Jésus-Christ (1 Jean 2 : 1). Mais en esprit nous pouvons atteindre cette justice, par la foi en nous établissant dans cette position en Christ. Paul seul parle de la justification dans ce sens.

Il y a ensuite une justice relative. Tout homme, qui fait son devoir, correspondant à la position qu'il occupe, est relativement juste. L'enfant (Eph. 6 : 1) et le non-croyant (Actes 10 : 35, etc.) même peuvent, dans ce sens, pratiquer la justice. Ce n'est là qu'une justice toute relative aux hommes. Pour le croyant il y a des degrés de justice et Pierre parle d'une « voie » de la justice (2 Pi. 2 : 21). Cette justice relative a donc rapport à la marche et non à la position.

Le cinquième éon est spécialement celui de la justice. Pierre dit en effet que la justice habitera dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre (9). Pierre et Jean ne parlent qu'exceptionnellement de la justice et encore, quand ils parlent du présent, est-ce dans le sens relatif c à d. de la justice consistant à faire ce qui est imposé dans la position et les circonstances où l'on se trouve momentanément.

Nous nous proposons d'examiner la question de la justification plus en détail dans La Voie du Salut.

 

9.       Les Deux Hommes.

 

On connaît l'opposition que Paul fait entre le premier homme « Adam » et le second homme « Christ « (1 Cor. 15 : 45-49). Il y a aussi deux humanités dérivant d'eux, l'une désignée par « le vieil homme » (Rom. 6 : 6 ; Eph. 4 : 22 ; Col. 3 : 9) et l'autre par « l'homme nouveau » (Eph. 2 : 15 ; 4 : 24). L'une est sous l'empire du péché, esclave, l'autre est justifié du péché, libre.

 

8 (8) Voir p. ex. Rom. 8 - 18-23.

(9) 2 Pi. 3 : 13. Voir Le Plan Divin pour les cinq « éons » ou âges.

 

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Tandis qu'Adam et la vieille humanité appartiennent à la première création, Christ et la nouvelle humanité font partie de la nouvelle création (2 Cor. 5 : 17 ; Gal. 6 : 15).

Notons ce point important, que Paul seul parle de la nouvelle création et du nouvel homme. C'est la base de son évangile. Il nous fait connaître, que le passage de l'ancienne humanité à la nouvelle, s'est fait à la croix. Tout homme, déjà régénéré, qui par sa foi et sa communion avec Christ abandonne ce qui concerne le « vieil homme », est mort avec Christ, baptisé dans sa mort, mort au péché. Il a quitté en esprit la vieille humanité parce qu'il a pris part en esprit au crucifiement du « vieil homme ». Il est ainsi justifié et appartient à la nouvelle création. Là il n'y a plus de Juif ni de Gentil (Gal. 3 : 128 ; 6 : 1,5). Il est « en Christ-Jésus ».

Nous voyons la différence radicale entre l'évangile propre à Paul et celui des Douze pour la circoncision. La mission particulière de ces derniers est d'amener Israël à se repentir en tant que nation et à croire que Jésus est le Christ, c à d l'Oint, le Messie. C'était la condition nécessaire pour la venue du Royaume sur ferre. Or ce Royaume et tout l'âge prochain appartiennent encore à l'ancienne création. La nouvelle création, non seulement spirituelle, mais englobant tout le monde, ne commence qu'au cinquième éon.

Le message de la croix relatif au passage d'une humanité et d'une création à l'autre n'est touché dans aucune épître de Pierre, Jean, Jacques ou Jude, à part les quelques références qui se rapportent à l'avenir, au cinquième éon. Leur mission se bornait à réaliser le dessein de Dieu concernant Israël, les prophéties, relatives au règne terrestre et la nouvelle naissance du monde. Dans cette sphère, Israël est nettement séparé comme peuple choisi de toute autre nation. Les douze tribus sont le moyen de choix divin pour répandre sur terre les bénédictions promises par lesquelles commencera la restauration universelle. On voit par là qu'il était impossible aux Douze et à ceux qui étaient en rapport avec eux, de proclamer l'évangile de Paul qui dépasse cette étape et se rapporte déjà à la nouvelle création où il n'y a plus ni Juif, ni Gentil, où il n'y a plus de nationalité, plus de sexe, plus de « religion », plus de race. Paul proclame ce message en vue de l'endurcissement d'Israël et en partie pour exciter la jalousie de ceux de sa race.

 

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La sphère nouvelle n'est pas ouverte pour fermer la sphère terrestre, mais au contraire pour en hâter la manifestation. Le message de Paul n'atteindra actuellement que quelques hommes, sa pleine réalisation pour le monde entier ne pourra avoir lieu que si ce monde est d'abord passé, par le moyen d'Israël, par la nouvelle naissance. Ce n'est qu'après le Royaume terrestre que viendront le nouveau ciel et la nouvelle terre et que Dieu pourra habiter avec les hommes sans distinction, parce qu'ils ne seront plus pécheurs, mais justifiés. Le message de Paul, d'individuel et d'exceptionnel doit devenir universel. Toute la vieille humanité devra un jour être crucifiée et passer à la nouvelle humanité.

On voit ainsi peut-être encore mieux l'erreur formidable de la majorité des chrétiens qui croient remplacer Israël pendant ce mauvais âge, où Satan est le « dieu »... On arrive fatalement ainsi à une confusion totale. Pour remplacer Israël, les chrétiens devraient assumer la mission d'Israël, ce qu'en effet d'ailleurs ils veulent faire en partie. Mais alors ils restent dans l'ancienne création et dans la sphère terrestre. Or, là les nations, loin d'avoir la promesse de pouvoir remplacer Israël, ne peuvent être bénies que par Israël. S'ils remplaçaient Israël, ils devraient dominer le monde et l'autorité politique devrait être entre leurs mains.

Mais dira-t-on, peut-être est-il possible d'admettre que Jean p. ex. soit resté dans la sphère du vieil homme, qu'il n'était pas « en Christ-Jésus » et n'aurait donc pas atteint la nouvelle création ? Et comment peut-on admettre que le Royaume terrestre soit encore soumis au péché et dans l'ancienne création ? Évitons de nous baser sur nos sentiments, essayons de nous débarrasser de toute tradition non scripturaire et soumettons-nous exclusivement aux Écritures. Jean ne parle jamais de la nouvelle création ni de l'homme nouveau. L'expression « en Christ-Jésus » lui est étrangère. Il parle à peine de la justification, et dans ces rares occasions, il n'utilise pas ce mot dans le sens où Paul le prend habituellement et où l'homme est mort au péché. Jean ne parle que de la justification relative (1) et se limite au pardon des péchés et à la nouvelle naissance.

 

1 (1) Voir le chapitre concernant la Justification, voir aussi La Voie du Salut. Jacques parle aussi de la justice relative que l'on peut atteindre par une marche conforme à certaines prescriptions.

 

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Il ne parle pas de la réconciliation (2), mais se tient à la « victime expiatoire » (3) qui « couvre » le péché. Il ne connaît pas le pardon complet (4), mais seulement le pardon conditionnel (5). Il n'envisage que très partiellement la puissance du sang du Seigneur, puisqu'il se limite à la purification cérémonielle dans le sens de l'Ancien Testament (6). Il ne connaît que l'état d' « enfant » de Dieu et ne mentionne en tout cas pas l'adoption comme « fils ».

Pour passer de l'ancienne humanité à la nouvelle, il faut être crucifié avec Christ, et Jean, ni aucun autre apôtre de la circoncision, ne parle de la croix en relation avec le croyant !

On a trop souvent oublié que Jean est un des Apôtres de la circoncision et qu'il ne s'adresse qu'à des Juifs chrétiens. Si l'on compare attentivement son message avec celui de Paul, on sera frappé par la différence et l'on se rendra compte que Jean est resté dans la sphère où sa mission devait s'exercer.

Tout cela n'empêche que ce qui est personnel dans ses écrits, et par conséquent applicable à tous les hommes, est très nécessaire et très utile. Mais il se limite à la nouvelle naissance. Pour progresser dans la voie du salut, il faut continuer avec Paul et atteindre la justification, la nouvelle création et même aller plus loin. Jean, ainsi que les autres apôtres de la circoncision, se limite à rappeler ce qui avait déjà été révélé (7).

Voyons maintenant la deuxième objection concernant la situation des « chrétiens » sur terre pendant le Royaume. Ils ne peuvent pas dire avec Paul : « La loi de l'esprit de vie en Jésus-Christ m'a affranchi de la loi du péché et de la mort. » (Rom. 8 : 2). Ils doivent suivre la loi dans toutes ses cérémonies, pour autant qu'ils sont Juifs, et ils restent soumis au péché. Mais ils ont l'offrande de réelle efficacité, celle de Christ, qui peut les purifier du péché quand ils confessent leurs péchés (1Jean 1 : 8, 9). Dans l'éon à venir Satan sera lié et l'anathème ôté de l'ancienne création.

 

2 (2) Katallassô ou Apokatallassô.

(3) Hilasmos, 1 Jean 2 : 2 ; 4 : 10.

(4) Charizomai, comme en Eph. 4: 32.

(5) Afiemi, comme en Mat. 18 27-35.

(6) Comparer 1 Jean 1 : 7 et 2 : 2 avec Lev. 16 : 30.

(7) Voir p. ex. 2 Pi. 1: 12;3 : 2; l Jean 2 : 7,21,24; 2 Jean 5 ; Jud. 5.

 

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La présence du Messie, d'Abraham, des douze Apôtres, la nouvelle alliance de grâce, la justice immédiate, les puissances spirituelles de cet âge, tout rendra possible une marche dans la lumière. Mais les « chrétiens » de cet âge restent dans la sphère terrestre de la nouvelle naissance et n'atteignent la nouvelle création qu'à la fin du quatrième éon. Des individus, Juifs et Gentils pourront sans doute abandonner le vieil homme et mourir avec Christ. Les Juifs pourront abandonner leurs prérogatives nationales. Laissant en arrière ce qui concerne Adam, ils pourront venir en communion avec Christ par la foi en Lui. Mais de longs siècles seront nécessaires pour amener librement le monde entier à atteindre ce qui se rapporte à la nouvelle création. La liberté seule explique ces longs délais. Si Dieu traitait ses créatures comme des automates ou des pantins, le but devrait être atteint tout de suite.

Beaucoup de problèmes restent à examiner, nous le savons, mais nous ne pouvons actuellement qu'esquisser les choses en laissant au lecteur le soin d'en compléter l'examen. Pour ce qui concerne le côté individuel, nous nous proposons d'y revenir dans La Voie du Salut.

 

10.    Résumé de la Période des Actes.

 

Dans Le Plan Divin, nous avons déjà fait remarquer que tout ce qui arriva et fut proclamé pendant la période des Actes était déjà connu, en grandes lignes, par Moïse et les Prophètes. Nous nous en rendrons mieux compte maintenant.

Cette période aurait dû conduire au Royaume terrestre. Israël aurait dû se repentir et arriver ainsi à la nouvelle naissance en tant que nation. Voilà le but des Douze. Les prophéties commençaient à se réaliser et ce qui arrivait de ce temps aurait dû culminer dans la venue glorieuse du Messie et du Royaume. Toutes les épîtres écrites pendant les Actes sont imprégnées de cette atmosphère.

Mais Israël refuse de se repentir et ne croit pas que Jésus est le Christ. Paul, qui avant tout adresse le message du Royaume aux Juifs de la dispersion, de ville en ville se tourne vers les Gentils lorsque ceux de son peuple n'acceptent pas la bonne nouvelle du Royaume. Il leur montre que si leur endurcissement bloque la voie normale, s'ils ne se mettent pas dans la condition voulue pour amener la nouvelle naissance mondiale, la voie individuelle reste ouverte : foi en Dieu comme Créateur, conversion et foi en Jésus-Christ.

 

 

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Il ne s'arrête pas à la nouvelle naissance, mais ouvre une nouvelle sphère, celle de la nouvelle création et parle de réconciliation, de justification, d'adoption comme fils. Ce message individuel et supranational dépasse la sphère terrestre et est le sujet principal des épîtres qu'il écrit pendant les Actes. Il invite à abandonner tout ce qui se rapporte à Adam et à passer de l'ancienne humanité à la nouvelle où l'on est « en Christ-Jésus » et, par la mort, justifié du péché.

Il est de première importance de se rendre compte qu'Israël est toujours en ce temps le peuple élu de Dieu et que le Royaume continue à être proclamé. Si des Gentils ont individuellement part aux bénédictions spirituelles, à la nouvelle naissance et même à la nouvelle création, cela ne veut pas dire qu'ils prennent la place d'Israël au point de vue national et réalisent ce que les prophètes ont annoncé. Israël seul a une mission sur terre en rapport avec la bénédiction mondiale des nations. Mettre ce qu'on nomme « l'Église » à la place d'Israël, c'est confirmer l'erreur fondamentale qui a tout embrouillé.

Les Juifs chrétiens restent toujours Juifs au point de vue national et sont tenus de suivre la Loi, de garder toute la « religion » juive, d'observer les fêtes, les cérémonies et de maintenir une organisation visible, instituée par Moïse et complétée par les Douze. À ce point de vue, il y a une séparation nette entre le Juif chrétien et le Gentil chrétien. Ce dernier ne peut avoir aucune part aux cérémonies et fêtes juives, à moins de se faire circoncire et d'être ainsi incorporé nationalement en Israël. Que l'on se rende bien compte que le Gentil n'a part qu'aux bénédictions spirituelles et que rien ne lui permet de s'approprier une organisation ou des cérémonies données par Dieu à Israël. Les seules prescriptions qui lui sont faites, spécialement en vue de rendre possible une vie commune entre chrétiens juifs et gentils, c'est de « s'abstenir des viandes sacrifiées aux idoles, du sang, des animaux étouffés et de l'impudicité » (1).

 

1 (1) Actes 15 : 28, 29. Ces prescriptions rappellent bien plus Lév. 17 : 10 et les sept prescriptions que les Juifs donnaient aux prosélytes que Gen. 9 : 4. Il va de soi que certaines sont justes et toujours valables, mais d'autres ne le sont pas. Voir p. ex. 1 Cor. 8 : 1-13.

 

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Les épîtres écrites pendant les Actes parlent nécessairement de beaucoup de choses particulières à ce temps et adaptées à la position qu'Israël occupait encore. Lorsqu'il était question de cérémonies pour les chrétiens de ce temps, il était évident que cela ne s'appliquait qu'aux Juifs chrétiens. Les épîtres mêmes contiennent d'ailleurs des indications qui peuvent nous mettre en garde contre une fausse application de ces cérémonies. Nous ne rappelons qu'un cas de ce genre : avant de parler des cérémonies des chapitres X et XI, Paul a soin, dans sa première épître aux Corinthiens, de préciser qu'il s'adresse en cet endroit aux chrétiens juifs : « Frères, je ne veux pas que vous ignoriez que nos pères ont tous été sous la nuée, qu'ils ont tous passé au travers de la mer, qu'ils ont tous été baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer, qu'ils ont tous mangé le même aliment spirituel... » Or les « pères » ou patriarches appartiennent à Israël seulement (Rom. 9 : 4-5).

L'épître aux Hébreux, celles de Jacques, Pierre, Jean et Jude sont uniquement adressées à des Juifs chrétiens. S'il est certain qu'une partie des messages qui y sont contenus concerne n'importe quel chrétien, il n'est pas moins certain qu'elles contiennent des indications relatives à la position nationale et religieuse d'Israël qui ne sont pas applicables aux Gentils. Ces épîtres restent d'ailleurs toujours dans la sphère du « vieil homme » et n'atteignent pas la position « en Christ-Jésus » où l'on est justifié du péché.

Les épîtres de Paul aux Romains, Corinthiens, Galates et Thessaloniciens s'adressent en général à tous et (à part la première aux Corinthiens et celles aux Thessaloniciens) concernent plus particulièrement ce qui doit suivre après la nouvelle naissance : la réconciliation avec Dieu, la mort avec Christ et au péché, la justification et la nouvelle création. Cependant, comme Paul s'adresse aussi à des Juifs chrétiens qui se trouvent dans ces églises locales et que ceux-ci sont encore nationalement des Juifs et sont tenus de suivre la Loi tant qu'ils restent en contact avec les choses terrestres, ces épîtres contiennent aussi des indications qui ne s'adressent qu'à eux et qui n'ont plus cours aussitôt qu'Israël est dans la réprobation. De plus, comme la période où le Royaume est encore proche est caractérisée par les puissances de l'âge prochain, ces épîtres parlent de pratiques et de dons spéciaux qui ne cadrent pas avec les circonstances des temps actuels, où Israël est mis de côté nationalement.

 

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On se rendra donc compte que tout le Nouveau Testament est utile (aussi bien que tout l'Ancien Testament), mais que tout ne s'adresse pas à nous.

Tout ce qui tombe dans la période des Actes est le développement des promesses abrahamiques. Aussi bien la nouvelle naissance que la justification par la foi font partie de ces alliances. La postérité céleste était aussi bien promise à Abraham que la postérité terrestre (2).

La sphère terrestre, ayant comme caractéristique la nouvelle naissance s'épanouira pendant l'âge prochain (le quatrième éon). La sphère céleste s'étend dans l'univers, après avoir absorbé ce qui est terrestre, pendant le cinquième âge. Tout ce qui est enseigné pendant les Actes fait donc partie des éons et du dessein éonien de Dieu (3). L'âge prochain, celui de la nouvelle naissance, est encore dans le péché, de même que le croyant né de nouveau est encore appelé pécheur. L'âge de la nouvelle création est celui de la justification, il est hors du péché, mais n'est pas encore parfait. La perfection est réservée au moment où le but est atteint : « Dieu tout en tous. » (1 Cor. 15 : 28). Là nous sortons des éons, nous atteignons, l'incréé. Nous ne sommes pas seulement dans la sphère de Christ, mais nous sommes identifiés avec Lui, nous sommes Ses membres.

Tout ce qui est connu pendant les Actes rentre donc dans le cadre de la révélation de l'Ancien Testament et des éons. Certes, il y a développement, révélation supplémentaire de parties inconnues, mais le fond ne dépasse pas les sphères de bénédictions terrestres et célestes (4).

Voyons maintenant le message de Paul après les Actes.

 

2 (2) Voir Le Plan Divin, p. 30 et suiv.

(3) Eph. 3 : 11 « dessein éternel ». Voir Le Plan Divin pour ce qui concerne les éons.

(4) Ceux qui ont de la peine à concevoir que Paul puisse dépasser Jean, auront de la difficulté à se rendre compte que l'apôtre des Gentils s'est surpassé lui-même et il serait désirable qu'ils se familiarisent mieux avec ce qui précède, et surtout qu'ils puissent vivre ces choses, avant de continuer la lecture des chapitres suivants.

 

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DEUXIÈME PARTIE

 

Après les Actes

 

1.       Les quatre Épîtres écrites en Prison.

 

Nous examinerons maintenant les épîtres que l'apôtre Paul a écrit après la période des Actes et spécialement celles aux Éphésiens, Philippiens, Colossiens et la deuxième à Timothée. Une de leurs caractéristiques est d'avoir été écrites en prison (1). Il y a une certaine correspondance entre ces quatre épîtres et nous ne pouvons mieux faire que de traduire un tableau préparé par Mr. Welch à ce sujet (2).

 

 

 

Les Épîtres écrites en Prison

 

Structure montrant leur doctrine caractéristique

et leurs correspondances.

 

A.  Éphésiens                                                Mots-clés*                                                                                                                                                   

      Assis ensemble           La dispensation (3 : 2, 9). Mystère (3 : 3 ; 5 : 32).

                                            L'Église qui est Son Corps (1 : 22-23).

                                            La plénitude (l : 23 ; 4 : 10). Christ le Chef (l : 22).

                                            Autorités et puissances (l : 21).

                  

B. Philippiens                                              Mots-clefs

             Le prix                          Le discernement des choses (l : 10).

                                                    Combattre (l : 27). Courir vers le but (3 : 14).

                                                    Prix (3 : 14). Départ (°) (l : 23). Libation (2 : 17).

 

A.   Colossiens                                              Mots-clefs *

        Perfection en Lui     Dispensation (charge) (1 : 25). Mystère (1 : 26).

                                            L'Église qui est Son Corps (1 - 24).

                                            Plénitude (1 : 19). Christ le Chef (2 : 19).

                                            Autorités et puissances (1 : 16 ; 2 : 10).

 

B. 2 Timothée                             Mots-clefs

            La couronne                 Dispenser (diviser) droitement la Parole (2 : 15).

                                                    Combattre (2 : 5). Achevé la course (4 : 7).

                                                    Couronne (4 : 8). Départ (°) (4 : 6). Libation(°) (4 : 6).

* Aucune de ces expressions ne se trouve en Phil. et 2 Tim.

(°) Les seuls endroits où ces mots sont utilisés dans les épîtres de Paul.

 

1 (1) Voir Eph. 3 1 ; 4 : 1 6 19, 20 ; Phil. 1 : 7, 13, 14, 17 ; Col. 4 : 3, 10, 18 2 Tim. 1 8 2 : 9 ; 4 : 16. Ceci n'est qu'une simple remarque, non essentielle à notre thèse. Voir aussi App. 3.

(2) Voir p. 11 de The Testimony of the Lord's Prisoner

 

 

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Avant d'examiner de plus près ces épîtres, nous relèverons certains indices qui montrent qu'à la fin des Actes Paul avait achevé son message céleste. Ainsi, quand il prend congé des anciens d'Éphèse à Milet (Actes 20 : 17), il leur dit : « Vous savez que je n'ai rien caché de ce qui vous était utile... annonçant aux Juifs et aux Grecs la repentance envers Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus-Christ. » Et ensuite : « Je vous ai annoncé tout le conseil de Dieu, sans en rien cacher » (3). Tout ce qui concerne la nouvelle naissance et la justification avait été enseigné par Paul, rien n'était caché. Il confirme d'ailleurs que ceci ne dépasse pas Moïse et les prophètes : « Rendant témoignage devant les petits et les grands, sans m'écarter en rien de ce que les prophètes et Moïse ont déclaré devoir arriver... » (Actes 26 : 22). Tout ce qu'il a écrit dans ses épîtres de la période des Actes, c-à-d. celles aux Romains, aux Corinthiens, aux Galates, aux Thessaloniciens, vient sous cette catégorie.

De plus, il fait allusion à un nouveau message :

« Mais je ne fais pour moi-même aucun cas de ma vie, comme si elle m'était précieuse, pourvu que j'accomplisse ma course avec joie, et le ministère que j'ai reçu du Seigneur Jésus, d'annoncer la bonne nouvelle de la grâce de Dieu. » (Actes 20 : 22-24). Nous voyons dans sa dernière épître (la deuxième à Timothée) que là il a achevé sa course (2 Tim. 4 : 7). La grâce de Dieu allait plus loin que la nouvelle création, le but étant « Dieu tout en tous ». Il lui restait donc à compléter le message de la grâce et dans son épître aux Éphésiens il parle de cette nouvelle dispensation de la grâce de Dieu (Eph. 3 : 2), qui compléterait la Parole de Dieu (Col. 1 : 25 Darby). Paul a eu de multiples révélations et le Seigneur ne lui est pas seulement apparu dans le chemin de Damas, mais aussi après (Actes 26 : 12-16). Examinons donc cette plénitude de grâce, ce salut de Dieu, qui a été envoyé aux Gentils (Actes 28 : 28) après qu'Israël a été écarté comme nation.

 

2.       Le Message du Mystère.

 

Nous prions le lecteur de se souvenir que nous ne faisons que jeter un coup d’oeil sur ces matières. Il faudrait des volumes pour les approfondir.

 

3 (3) Remarquer que « conseil » est la traduction de « boulè » et non de « prothesis », traduit par « dessein » en Eph. 3 : 11.

 

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La question qu'il convient de traiter avant tout est celle de savoir si les enseignements de Paul, donnés après les Actes, ne sont que l'épanouissement de son évangile proclamé pendant les Actes, ou si c'est un autre message. Nous sommes persuadés que c'est une chose nouvelle, qu'il s'agit ici d'une nouvelle sphère de bénédictions, d'une nouvelle position à atteindre, de la perfection qui dépasse la création et les éons. Évidemment, dans un sens, cet enseignement est la continuation des messages précédents. Nous avons vu dans Le Plan Divin comment Dieu arrive à Son but par les éons et il est évident qu'un âge suit l'autre et que le tout est couronné par la perfection. Il y a donc suite, développement. Mais ce qu'il faut voir aussi, c'est que ce développement n'est pas toujours graduel. Un âge diffère complètement de l'autre, il y a des changements brusques. De même le croyant doit progresser individuellement dans le chemin du salut, mais cela se passe par étapes. La nouvelle naissance est un jalon bien défini : d'homme naturel on devient enfant de Dieu. La mort avec Christ en est un autre : de pécheur on devient juste, de l'ancienne création on passe à la nouvelle. Nous nous sommes efforcés de montrer que pendant la période des Actes, Paul avait ouvert une nouvelle sphère de bénédictions, qui faisait suite à la sphère terrestre, mais en différait complètement. Il s'agit maintenant de savoir si après les Actes, Paul parle toujours de la sphère céleste, s'il ne fait que compléter cet enseignement en communiquant aux croyants des révélations supplémentaires, ou s'il parle d'une nouvelle, d'une troisième sphère. Si le message des Douze était en correspondance avec la nouvelle naissance, l'âge prochain et la sphère terrestre, et si celui de Paul pendant les Actes concernait la nouvelle création, le cinquième âge et la sphère céleste, il s'agit de voir si le message de Paul, après les Actes, n'atteint pas l'Homme parfait, l'état où Dieu est tout en tous, une sphère en dehors des éons (1). Voilà la question. Avant d'aller plus loin, il est indispensable que le lecteur se familiarise avec ce que nous avons exposé jusqu'à présent. Nous faisons une exploration, nous voulons distinguer les choses, or plus elles sont élevées et plus il devient difficile de les distinguer.

 

 1 (1)Voir les schémas p. 22 et 74.

 

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Tout au moins pour celui qui reste en bas (2).

Quand nous examinons les quatre épîtres, écrites par Paul après la période des Actes, nous rencontrons des choses nouvelles, exprimées par des mots nouveaux. Ainsi p. ex. :

Eph. 1 : 3. Bénis de toutes sortes de bénédictions spirituelles dans les « sur célestes ».

Eph. 2: 16. La réconciliation parfaite (apokatallassô).

Eph.1: 7. La rédemption parfaite (apolutrôsis).

Col. 2 :10. La perfection.

Eph.1: 3 ; 2 : 6. Dans les « sur célestes ».

Col. 3: 3. Christ notre vie, cachée en Dieu.

Eph.3: 6. Un même corps (sussôma).

Phil. 3:11. La « hors-résurrection » (exanastasis).

 

a)       Une nouvelle unité. -La Parole parle de plusieurs « unités ». Il y a d'abord celle d'Israël comme peuple de Dieu : c'est une unité terrestre qui se réalisera dans l'âge prochain quand Jéhovah-Christ habitera « éternellement » au milieu d'eux (Ezéch. 43 : 7 ; Soph. 3 : 15-17) et quand le nom de la « ville » sera l'Éternel est ici (Ezéch. 48 : 35).

 

 

2) (Le message que Paul donne dans ses dernières épîtres ne  peut être saisi, dans ce qu'il a de spécial et d'élevé, par un croyant se trouvant au commencement de la voie du salut. Les choses lointaines sont alors comme enveloppées d'un brouillard et ce qui est en réalité distinct semble se confondre. Il faut progresser. Non seulement en connaissance, mais progresser avec tout notre esprit, notre âme et notre corps. Il faut vivre sa foi pour voir les choses de plus près et pour distinguer. Nous ne voulons pas dire par là qu'il faut nécessairement beaucoup de temps pour arriver à ce résultat. Le chemin peut être parcouru rapidement. On peut pour ainsi dire brûler les étapes et avoir l'impression qu'on a atteint sans préparation la position parfaite, quoique ce cas semble plutôt rare.

Certains diront qu'il ne faut pas faire toutes ces distinctions, que tout le Nouveau Testament s'applique à tous. Il est à craindre que ceux-là ramènent à un niveau inférieur ce qui les dépasse. Nous ne ferons que leur rappeler que le Seigneur ne pouvait pas encore dire tout quand Il était sur terre et que Paul non plus ne pouvait pas toujours donner de la nourriture solide (1 Cor. 3 : 1, 2). Pierre même reconnaît qu'il y a des points « difficiles à comprendre » dans les messages de Paul (2 Pi. 3 : 16). La Parole de Dieu n'est pas un chaos d'où l'on peut tirer un texte quelconque et se l'appliquer de plano. Il y a un développement logique et il est nécessaire de distinguer ce qui diffère et de , dispenser (ou de diviser) correctement la parole de vérité ». Le croyant a un culte logique (Rom. 12 : 1) et ne doit craindre aucune objection, aucune critique, pourvu qu'il garde toute la Parole, et la divise correctement. Mettre tout au même niveau, méconnaître ce qu'on pourrait appeler la hiérarchie des éléments divers de la Révélation, c'est créer des difficultés, des contradictions, d'où l'indifférence, la critique, l'incrédulité, l'antichristianisme. Nous insistons sur le danger de ne pas distinguer les dispensations, les messages, les positions, les éons, les sphères. Ce n'est pas là chose indifférente ou accessoire. Dieu nous a doués de l'intelligence pour nous en servir et Paul nous donne l'exemple. Lorsqu'on lâche la bride au sentiment et à l'émotion, le désastre est au bout. Nous répétons que nous ne voulons négliger aucune de nos facultés, mais qu'il faut un équilibre. Pas de connaissance réelle sans charité, pas d'amour conforme aux Écritures sans connaissance. Si Dieu nous a donné toute la Bible et non quelques versets favoris, c'est que cela était nécessaire. Négliger l'étude de Sa Parole, c'est, dans un certain sens critiquer le conseil de Dieu. Là où il y a l'amour des Écritures, les hommes les plus " simples" peuvent obtenir une connaissance surprenante, qui peut rester inaccessible à ceux qui font de longues études ou se laissent guider par le sentiment « religieux ». Ce n'est pas notre effort personnel qui compte, mais Dieu agit, pourvu que nous le Lui demandions et que nous montrions vraiment le désir de Sa grâce en faisant usage des facultés qu'Il nous a déjà données.

 

 

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Il n'y aura plus alors de séparation entre les douze tribus. Il y aura une unité, une Église visible, qui sera en bénédiction à toute la terre.

Et puis il y a le groupe céleste, qui est « un » en Jésus-Christ (Gal. 3 : 28). Les croyants qu'il comporte sont « ensevelis » avec Lui, sont « une même plante » avec Lui, sont « crucifiés » avec Lui, sont « morts » avec Lui (3). Ils ont tous « été baptisés dans un seul Esprit, pour former un seul corps » (l Cor. 12 ; 13). Ce corps était « de » Christ (4), Lui appartenait. Ils étaient « à » Christ (Gal. 3 : 27-29).

Mais dans ses dernières épîtres Paul parle d'une autre unité encore, dont la communion avec le Christ-Jésus est parfaite. Les croyants dont il s'agit maintenant sont « rendus à la vie » avec Christ, « ressuscités avec Lui », Dieu les « a fait asseoir ensemble dans les (lieux) sur célestes en Christ Jésus » (5).

 

 (3) Rom. 6 : 4-8. La résurrection est dans l'avenir.

(4) 1 Cor. 12 : 27. Le texte grec ne dit pas qu'ils sont le corps de Christ, mais simplement corps de Christ, une assemblée Lui appartenant. Ainsi la femme est « corps » de l'homme parce qu'elle lui appartient, mais elle n'est pas le corps de l'homme. Le mot " corps » ne signifie pas plus, en 1 Cor. 12, que le « corpus » latin, le mot juridique pour désigner une association. Pour les lecteurs, qui désirent un témoignage humain, nous pouvons citer Sabatier : " Le nom de sôma acquiert une signification transcendante qu'il n'avait point auparavant ; Paul ne dit plus « sôma Christou " mais, dans un sens absolu « to sôma Christou ». Dans la première manière de parler, Christou est un génitif objectif ; dans la seconde, c'est un génitif subjectif. » (L'Apôtre Paul, p. 257.)

(5) Eph. 2 : 5, 6 ; Col. 2 : 12, 13. Il s'agit ici de faits actuels et non futurs.

 

 

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Ceci dépasse ce qui est dit du groupe céleste et nous avons ici une unité parfaite, « un seul corps » (Col. 3 : 15 ; Eph. 3 : 6 ; 4 : 4), « un seul homme nouveau » (Eph. 2 : 15), « un seul Esprit », « une seule espérance », « une seule foi », « un seul baptême » (Eph. 4 : 4, 5). Il n'y a pas là une unité visible, matérielle, mais une unité réelle, spirituelle (6).

b) Un nouveau mystère. - Paul parle dans ces épîtres, écrites en prison, non de mystères concernant le Royaume des cieux ou la position céleste, mais du grand mystère (Eph. 5 : 32), qui fut caché pendant les éons en Dieu (7), mais manifesté maintenant, c à d. après les Actes, à ses saints (8). Paul l'appelle « le » mystère, en contraste avec « le mystère de Christ » (9). Ce dernier comprend le grand mystère et tous les autres mystères et englobe ainsi toute la Bible. La Parole est une révélation graduelle du mystère de Christ et Paul peut donc dire qu'au moment où il fait connaître « le » mystère, le mystère de Christ est révélé d'une façon plus complète qu'il ne l'a été aux générations précédentes.

Le passage parallèle de l'épître aux Colossiens (8) indique que c'est ainsi qu'il faut comprendre le texte. Il y est dit formellement : « le mystère caché aux éons et aux générations, mais manifesté maintenant à Ses saints. »

Mais ce mystère n'était-il pas déjà caché dans les Écritures ? L'Ancien Testament n'y fait-il jamais allusion ? La réponse est encore formelle : « caché pendant les éons en Dieu » (7). Mais les anges et les autres créatures célestes connaissaient sans doute ce mystère ? De nouveau la réponse est catégorique : « afin que les dominations et les autorités dans les lieux célestes ( sur célestes ) connaissent aujourd'hui... » (Eph. 3 : 10).

 

6 (6) Que l'on ne nous reproche pas de " diviser " les enfants de Dieu en distinguant trois sphères. Il est entendu que tous sont nés de nouveau et forment donc dans ce sens une unité. Mais dans cette grande unité on peut distinguer (sans séparer) trois autres unités. Cette distinction disparaît après les éons.

(7) Eph. 3 : 9 « apo tôn aiônôn ».

(8) Col. 1: 26. Le grec n'a pas « révélé », comme en Mat. 16: 17 p. ex. Ici il s'agit de ce qui est « manifesté ». Paul seul a reçu cette révélation, mais il la fait connaître « maintenant » aux saints.

(9) Eph. 3 : 3. Après « mystère » commence une parenthèse. Voir Darby. Cette parenthèse est close, non après « mystère de Christ », mais après « prophètes ». Lire ensuite : « En esprit les nations seront cohéritières... »

 

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Pour mieux marquer que l'on ne peut pas trouver ces richesses dans ce qui avait été révélé ou écrit jusqu'à ce moment, Paul ajoute : « À moi... cette grâce a été accordée d'annoncer aux Gentils les richesses introuvables » (10). Ne cherchons donc pas ce grand mystère chez d'autres que Paul, ni dans les Écritures des Actes ou de l'Ancien Testament.

Nous concluons que si Paul met tant d'insistance sur la nouveauté et l'importance de cette révélation, il ne faut pas la considérer comme un simple développement, comme un appendice à ce qu'il avait fait connaître antérieurement.

Quel est le sujet de ce grand mystère ? « En esprit, les nations seront cohéritières et formeront un même corps (co-corps), étant coparticipantes de la promesse en Christ-Jésus » (11). Il ne s'agit pas ici d'une promesse à Abraham, mais d'une promesse en Christ-Jésus. Il ne s'agit pas ici de vie éonienne (éternelle), mais de la vie en Christ-Jésus (12). Il ne dit pas que les nations sont maintenant élevées au rang d'Israël et reçoivent aussi l'héritage juif, ni qu'elles font un corps avec Israël et participent à des promesses abrahamiques faites à ce peuple. Ici toutes les nations (y compris Israël) participent ensemble à un héritage nouveau ; elles forment ensemble un corps nouveau et participent ensemble à une promesse nouvelle. Nous croyons avoir montré dans Le Plan Divin et dans le présent ouvrage quelle est la mission d'Israël, quel est son héritage (Canaan), quelle est son unité, quelles sont ses promesses. Le message céleste dépassait tout cela, mais était connu depuis Abraham. Comment pourra-t-on dire qu'il n'y a ici, dans l'épître aux Éphésiens, qu'une participation des nations aux prérogatives juives ? Israël est rejeté comme nation. Tout ce qui concerne Israël est remis à plus tard et l'accomplissement de ces choses attend la repentance de ce peuple et la venue du Seigneur. Comment les nations auraient-elles maintenant part à certaines choses avec Israël ? Et si nous avons bien compris le symbole de l'olivier, pourrons-nous admettre que l'épître aux Éphésiens se contente de répéter que des groupes de croyants des nations n'ont été qu'entés sur un arbre juif ?

 

10 (10) Eph. 3 : 8. Le grec « anexkniastos » est ainsi traduit par Darby en Rom. 11 : 33. C'est le sens littéral.

(11) Eph. 3 : 6. Nous traduisons du grec. Voir aussi Darby et ses notes.

(12) Voir 2 Tim. 1 : 1 et Col. 3 : 3, 4.

 

APRES LES ACTES 69

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D'aucuns auront encore des doutes et seront tentés de croire qu'il s'agit des promesses abrahamiques mondiales, qui comprennent la bénédiction de toutes les nations. Or ces promesses sont encore dans les éons, dans ce qui est imparfait. Nous allons voir que Paul parle de choses plus élevées, qui se rapportent à la perfection.

c) Accès à une nouvelle sphère. - On se contente souvent de distinguer la terre et le ciel. Or l'Ancien Testament fait déjà allusion à plusieurs régions ou sphères autres que la terre. 1 Rois 8 : 27 est caractéristique à cet égard :

« Dieu habiterait-il véritablement sur la terre ? Voici, les cieux et les cieux des cieux ne peuvent le contenir » (13). Nous trouvons donc là : 1e la terre, 2e les cieux, 3e les cieux des cieux, 4e ce qui dépasse les cieux des cieux. Le Psaume 113 dit aussi : « Sa gloire est au-dessus des cieux. » Il ne faut pas oublier en effet que les cieux sont aussi bien créés que la terre et que Dieu est avant et indépendamment de toute création.

Le Nouveau Testament nous apprend qu'après son ascension, le Christ est « monté au-dessus de tous les cieux » (Eph. 4 : 10). Il a traversé les cieux (Héb. 4 : 14) et est donc plus élevé que les cieux (Héb. 7 : 26). Cette sphère a été désignée par un nom spécial : « les sur célestes » (voir App. 4).

Que le lecteur veuille bien noter que nous ne disons pas que l'existence de cette sphère était inconnue avant Paul. A ce que nous-même avons cité de l'Ancien Testament, nous pouvons ajouter que le mot « sur céleste » est utilisé par Jean et par l'auteur de l'épître aux Hébreux (14). Dans les Écritures d'avant la fin des Actes, il est question de :

 

13 (13) Ces expressions nous en rappellent d'autres, comme le saint » et « le saint des saints » du tabernacle. On voit là, matérialisées, des choses célestes (Héb. 8 : 1-5) et une division nette entre le parvis, le lieu saint et le lieu très saint. De plus, il y avait au-dessus de tout cela la « nuée » représentant la gloire du Seigneur. Nombres 9.

14) Voici tous les textes Jean 3: 12 ;1 Cor. 15 : 40 (deux fois), 48, 49 ; Eph. 1: 3, 20; 2 :6 ; 3: 10; 6: 12 ; Phil. 2: 10 ; 2 Tim. 4 : 18 ; Héb. 3: 1 ; 6: 4; 8 : 5; 9: 23; 11 : 16 ; 12:22.

 

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« choses sur célestes »

« corps sur célestes »

« homme sur céleste »

« vocation sur céleste »

« don sur céleste »

« patrie sur céleste »

« Jérusalem sur céleste ».

 

Mais, dans tous ces cas, c’est le caractère ou l'origine qui est indiqué. En contraste avec ceci, Paul utilise cinq fois dans l'épître aux Éphésiens l'expression

« en tois epouraniois »

c à d. « dans les (sphères) sur célestes». Le datif indique ici (en contraste avec le génitif dans les expressions précédentes) que les personnes (ou choses) dont il parle, se trouvent dans cet « endroit ». Toute l'Écriture connaît donc les « sur célestes », mais jamais la moindre allusion n'indique qu'un homme puisse y être placé. C'est bien une nouvelle révélation en relation avec le grand mystère et donnant accès à une sphère fermée jusqu'à ce moment. C'est bien là une chose inconnue, cachée en Dieu, introuvable. Paul nous apprend que dans ces sur célestes :

 

nous pouvons avoir toutes sortes de bénédictions spirituelles (Eph. 1 : 3)

le Christ est assis (Eph. 1 : 20)

Dieu peut nous faire asseoir en Christ-Jésus (Eph. 2 : 6)

il y a des « dominations » et des « autorités » (Eph. 3 : 10) (15).

Le texte grec ne dit pas : « lieux sur célestes », mais simplement « sur célestes ». Nous ne pouvons plus en effet parler ici de « lieux ». L'espace est une création, or les « sur célestes » sont au-dessus de la création et « lieux sur célestes » est donc un non-sens. Nous avons ajouté parfois « sphère » parce que cette expression est plus vague. Notre langage terrestre n'est pas apte à exprimer ces réalités spirituelles, mais pour en parler il faut bien utiliser des mots.

Nous osons à peine dire que dans cette sphère sur céleste il y a un « endroit » spécial : la droite de Dieu, et que c'est là que le Christ est assis et en Lui ceux auxquels Paul s'adresse.

 

15 (15) Il y a aussi Eph. 6 : 12, mais il est probable qu'il faut lire : « Car nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang... dans les (lieux) sur célestes » et qu'il faut considérer le reste comme une parenthèse. Héb. 12 : 22 est au datif, mais n'utilise pas la préposition « en ». Cette Jérusalem descend sur terre (Apoc. 21 : 2).

 

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Ils sont ainsi vraiment au-dessus de tout, même des « dominations », etc., qui se trouvent dans la sphère sur céleste.

Il est impossible de voir ici une description complémentaire de ce qui est relatif aux choses célestes, de ce qui a rapport à la création, aux bénédictions abrahamiques. C'est une sphère entièrement nouvelle. S'il y a des limites bien déterminées entre la terre et les cieux, celles qui sont entre les cieux et les sur célestes sont, encore plus accentuées.

 

d) Une nouvelle Église. - l'Église du mystère est hors du temps et de l'espace, hors de la création, hors des éons. Elle correspond à l'état final où Dieu est tout en tous, état qui vient après les éons. En esprit, les membres de cette Église sont donc enlevés des éons et atteignent la perfection absolue (16). Cette Église n'est pas celle qui existera sur terre pendant l'éon prochain, ni l'Église céleste, mais c'est le Corps, même du Seigneur (Eph. 1 : 23). Les membres ne sont pas seulement des « enfants de Dieu », pas seulement des « fils » : ils peuvent atteindre à « l'état d'homme fait, à la mesure de la stature parfaite de Christ » (Eph. 4 : 13).

Paul parle ici, non pas seulement de rédemption (lutrôsis), mais d'une rédemption complète (apolutrôsis) (Eph. 1 : 7) ; non pas seulement de réconciliation (katallassô), mais d'une réconciliation parfaite (apokatallassô) (Eph. 2 : 16).

La communion de ceux de la sphère céleste allait jusqu'à la mort avec Christ, mais pas encore jusqu'à la vraie vie. Paul dit : « Comme si (vous étiez) vivants hors des morts » (Rom. 6 : 13). Mais à ceux de l'Église du mystère Paul dit franchement qu'ils sont rendus à la vie avec Christ, ressuscités avec Christ (17). Étant réveillés avec Christ, c'est Lui qui est leur vie. Là seulement se trouve toute la plénitude de vie.

Faut-il s'étonner après cela que Paul dit avoir complété la Parole de Dieu ? (18). À lui seul ce mystère fut révélé (19) et nous ne devons pas le chercher chez, les apôtres de la circoncision.

 

16 (16) Col. 2 :10. Texte grec.

(17) Eph. 2 :5, 6 ; Col. 2 : 12 ; 3 : 1. Le grec ne met pas « ressuscité », mais « réveillé ».

(18) Col. 1 25 Darby et App. 2.

(19) Eph. 33, 8 et voir la note Nr. 8, p. 67.

 

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L'Église du mystère n'est pas l'Épouse. Nous avons montré dans Le Plan Divin que l'Épouse est formée de Juifs chrétiens et nous examinerons cette question de plus près dans l'appendice 5.

Même si l'on distingue ainsi plusieurs Églises, il reste toujours possible de parler d'une Église universelle, qui comprend alors tous ceux qui sont nés de nouveau.

 

e) Une nouvelle espérance. - Nous nous bornerons à dire que les membres de l'Église du mystère paraissent avec Christ, quand Il viendra en gloire (Col. 3 : 4), quand d'autres croyants ressuscités ou changés viennent à Sa rencontre. Leur résurrection corporelle doit donc avoir lieu avant celle d'autres groupes de croyants. Ils peuvent même atteindre la conformité à la mort du Seigneur (20) c à d. rester très peu de temps dans le Hadès et parvenir ainsi à la « hors-résurrection d'entre les morts » (21). C'est ainsi que l'on peut être « avec Christ » (Phil. 1 : 23). Cette résurrection rend conforme « au corps de sa gloire » (Phil. 3 : 21), tandis que celle connue avant ne menait qu'à la conformité à l'image du Fils (Rom. 8 : 29) et non à Son corps glorieux même.

Si l'on considère ainsi l'ensemble de ce que Paul a enseigné après les Actes, il ne peut rester aucun doute qu'il s'agit d'une sphère nouvelle, d'une Église nouvelle. Certaines choses prises à part peuvent laisser un doute, mais l'accumulation des indications est telle qu'on ne peut plus hésiter. Comme dans toute la Parole, c'est la foi qui décidera. Dieu ne donne pas des preuves du genre de celles des mathématiques, qui obligent d'accepter une solution. Il reste toujours une liberté de croire. Non pas que ces preuves n'existent pas, mais nous sommes incapables de les saisir directement. Il n'y a qu'un chemin : celui de la foi. La preuve se cache dans le domaine que nous devons conquérir par la foi. C'est là toujours la sûreté du croyant : étant arrivé à la position où Dieu l'invite, il trouve la certitude. La certitude ne peut pas précéder la foi.

 

20 (20) Phil. 3 : 10. Il s'agit de la mort, non de la manière de mourir.

(21) Phil. 3 - 11. Grec : exanastasin tèn ek nekrôn. Cette expression doit donc être distinguée de celles où il n'est question que d'une résurrection d'entre les morts, comme celle de 1 Thes. 4 et 1 Cor. 15. A noter aussi que dans le texte grec le mot résurrection n'est employé que pour un événement qui concerne le corps. Il n'y a pas de résurrection « spirituelle. Il peut ,y avoir une « vivification » qui n'intéresse pas encore le corps.

 

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Nous voyons par ce qui précède qu'il y a trois sphères de grâce, de bénédiction, de communion avec Dieu : 1e la sphère terrestre, 2e sphère céleste, 3e la sphère sur céleste. Nous résumons dans un tableau ce qui les caractérise et les distingue.

 

3.       Les trois sphères

 

 

 

3. Les trois sphères.

 

Nous voyons par ce qui précède qu'il y a trois sphères de grâce, de bénédiction, de communion avec Dieu : 1e  la sphère terrestre,  2e  sphère céleste, 3e  la sphère sur céleste. Nous résumons dans un tableau ce qui les caractérise et les distingue.

 

                        

SPHÈRE TERRESTRE

 

SPHÈRE CÉLESTE

SPHÈRE SUR-CÉLESTE

Nouvelle naissance

(Jean 1 : 13 ; 3 : 3, 7, 8 ; 1 Pi. 1 : 3, 23 ; 2 :2).

Nouvelle création

(2 Cor.5: 17 ; Gal - 6 : 15).

Nouvel homme

(Eph. 4:24; Col. 3: 10).

Enfant de Dieu, esclave

(Rom. 8: 15 ; Gal. 3 : 24 ; 4 : 1,9 ; 1 Jean 3 : 9, 10).

Fils de Dieu, libre   (Rom. 8 : 14 ;

Gal. 3 :25 ; 4 :5).

 

Homme fait

(Eph. 4; 13).

Renouvellement de l'intelligence

(Rom 12 : 2).

Vieil homme crucifié

(Rom. 6 : 6).

vieil homme dépouillé

(Eph. 4: 2 2; Col. 3 : 9).

Sous le péché

(Rom. 7 : 14).

Mort au péché

(Rom. 6 : 2 ; 8 : 2).

Mort aux péchés

(Eph. 2 :1, 5 ; Col. 2 : 13).

Béni en Abraham.  

Béni avec Abraham

(Gal. 3 : 9, 14).

Promesse en Christ

(Eph. 3 : 6).

Poussière de la terre

(Gen. 13 : 16).

Étoiles du ciel

 (Gen. 15: 4-6).

Dans les sur célestes

(Eph. 1 : 3 ; 2 : 6)

Rémission des péchés

(Mat. 6 : 12, 14, 15 ; 18 : 27-35).

Justification

(Actes 13 : 39 ; Gal. 2 : 16).

Grâce et rédemp. compl.

(Eph. 4 : 32 ; 1 : 7).

Couvert

(1 Jean 2 : 2 ; 4 : 10).

Réconcilié

(Rom. 5 : 10 ; 2 Cor. 5:18 -20).

 

Réconciliation compl.

(Eph. 2:16; Col. 1 :21)

Résurrection au dernier jour (Jean 6 : 39-54).

Enlèvement (1 Thes. 4 ; 1 Cor 15).

Hors-résurrection d'entre les morts (Phil. 3: 11 ; Col. 3: 4).

Résurrection au dernier jour (Jean 6 : 39-54).

Enlèvement (1 Thes. 4 ; 1 Cor 15).

Hors-résurrection d'entre les morts (Phil. 3: 11 ; Col. 3: 4).

Résurrection au dernier jour (Jean 6 : 39-54).

Enlèvement (1 Thes. 4 ; 1 Cor 15).

Hors-résurrection d'entre les morts (Phil. 3: 11 ; Col. 3: 4).

Résurrection au dernier jour (Jean 6 : 39-54).

Enlèvement (1 Thes. 4 ; 1 Cor 15).

Hors-résurrection d'entre les morts (Phil. 3: 11 ; Col. 3: 4).

Vie éonienne terrestre

(Jean 3 : 15, 16, 18 ; 1 Jean 5 : 11).

Vie éonienne céleste

(Rom. 6 : 23 ; Gal. 6 : 8-10 ; Tit. 1 : 2).

Christ notre vie

(Phil. 1: 21 ; Col. 3 : 3,4).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous avons vu à plusieurs reprises qu’il y a une correspondance entre les éons et les sphères. Ainsi l'éon prochain (le quatrième) est celui où la nouvelle naissance domine sur la terre. Dans le cinquième éon, c'est la nouvelle création qui a englobé la sphère de la nouvelle naissance. Après les éons vient la sphère parfaite, où Dieu est tout en tous. Nous avons essayé de représenter cela par le diagramme suivant:

 

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Les sur célestes (sphère de l’état parfait)

 

 

 

Les cieux (sphère de la nouvelle création)

 

Création primitive                                                    Nouvelle création

Dieu

 tout en tous

 

 

Sphère de la nouvelle naissance

 

Adam                                        Royaume

 

 

 

Séparation

 

 

           1          +        2                          3                             4                     5

  Les éons qui sont passés        Le mauvais éon présent      L’éon à venir       L’éon des éons

 

 

Pendant l'éon prochain, il y a donc :  l° sur terre, ceux qui sont dans la sphère de la nouvelle naissance ; 2° dans les cieux, ceux de la nouvelle création ; 3° dans les sur-célestes, ceux de l'état parfait. Pendant le cinquième éon, il n'y a que deux groupes : ceux de la nouvelle création et ceux de l'état parfait. Les autres sont rentrés dans un de ces deux groupes. Après les éons, Dieu est tout en tous et toute la création est donc parvenue à la perfection.

On se représente souvent les choses d'une manière un peu trop simpliste : on ne connaît, dans l'avenir, qu'une sphère de bénédictions, le ciel. Pour arriver à ce résultat, on est obligé de « spiritualiser » à outrance.

D'autres se sont rendu compte que le peuple d'Israël avait une mission terrestre et qu'il y a donc deux sphères de bénédiction : une sur terre dans l'âge prochain, et une céleste. Ceci est un progrès énorme et permet de comprendre d'une manière simple et claire une grande partie des Écritures. Beaucoup de difficultés sont ainsi évitées. Mais il reste des points obscurs et une partie de la Parole doit encore être forcée pour pouvoir entrer dans le schéma.

 

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La grâce de Dieu n'est pas appréciée dans toute sa plénitude et il manque quelque chose à sa glorification. De plus, les conclusions non scripturaires conduisent, comme tout écart de la vérité, à la division, au scepticisme, etc. L'état actuel du monde chrétien, la division, même entre ceux qui croient à l'avenir d'Israël, montre qu'il y a des lacunes dans cette conception. Tous ont une partie de la vérité, mais on n'arrive pas à en faire une unité. Certains s'attardent à la loi, d'autres aux évangiles, d'autres à la Pentecôte, d'autres aux Douze, aux cérémonies des Actes, etc. Tout cela est scripturaire quand c'est à sa place, mais n'est pas conforme à la volonté de Dieu lorsqu'on l'applique à nous. On veut suivre des prescriptions données dans d'autres temps à d'autres groupes de croyants et on veut même s'approprier des promesses nationales, qui sont le monopole d'un peuple terrestre. Nous n'avons aucune objection contre un symbolisme scripturaire, qui permet d'appliquer certaines vérités d'une manière « spirituelle ", mais il ne faut pas que ce sens symbolique prenne la place de la réalité. Ainsi nous admettons parfaitement que l'histoire d'Israël peut nous servir d'exemple et d'instruction. Mais c'est une raison de plus pour protester de toutes nos forces contre l'idée qu'Israël est rejeté définitivement comme nation. S'il en était ainsi, quel mauvais exemple ! Ou tout au moins quel exemple imparfait. Si l'histoire des Israélites se termine à la fin des Actes, s'ils n'arrivent pas à leur but, nous pourrions en conclure que nous non plus n'y arriverons pas.

Nous comprenons les scrupules que certains ont à croire en un Royaume terrestre. Trop souvent, la chose est si mal présentée, qu'elle devient inacceptable ;  on a raison alors de rejeter un « chiliasme » non scripturaire. Mais si on se rend compte que pendant l'âge à venir il y a aussi une sphère céleste et même sur céleste et que ce Royaume n'est pas le but, mais le moyen pour parvenir à la nouvelle création mondiale, puis à la perfection universelle, toute objection tombe. Une vue partielle de la prophétie peut donner lieu à bien des difficultés et à rejeter le sens littéral. Seule une solution générale se basant sur toute l'Écriture, même si elle n'est pas parfaite, écarte les objections. Si elle fait apparaître les choses comme un peu plus compliquées, elle les simplifie en réalité, parce qu'on peut ainsi prendre à peu près tout à la lettre. On peut croire ce que Dieu dit.

 

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Mais, dira-t-on, avez-vous la prétention de savoir tout cela mieux que les croyants des premiers siècles, que les Pères et tous les grands hommes qui sont venus après eux ? Aurait-il fallu attendre dix-neuf siècles pour atteindre la vérité ? Ne devons-nous pas au contraire nous tenir à ce que nos pères ont enseigné ? Notre réponse est simple : nous avons foi dans les Écritures plus que dans les hommes. Nous admirons tous ces croyants qu'on nous donne comme autorités, mais s'il est vrai que nous essayons d'estimer leurs travaux à leur valeur, nous ne désirons comme modèle que Paul seul (1). Et nous croyons toucher là le point faible du christianisme : il a abandonné Paul, tout au moins en partie et cela depuis le premier siècle de notre ère. Nous n'acceptons pas le moins du monde la thèse que de ce temps-là les chrétiens avaient toute la vérité et que nous devons toujours nous en référer à eux. Nous donnons nos raisons en détail dans les chapitres suivants (2).

 

4.       Paul abandonné.

 

Pierre, Jean et Jude mettent en garde contre les faux docteurs, les antéchrists et les moqueurs (1a). Ils attendent le retour du Seigneur et la venue du Royaume sur terre, et ils savent très bien que ce Royaume ne viendra pas graduellement, mais qu'au contraire l'âge présent se terminera par des événements terribles et que les puissances du mal seront alors en pleine activité. Leurs vues correspondent exactement à celles des prophètes.

Pendant la période des Actes, Paul confirme cela et ne s'épargne pas pour mettre les croyants en garde contre l'esprit de séduction :

« Je sais qu'il s'introduira parmi vous, après mon départ, des loups cruels qui n'épargneront pas le troupeau, et qu'il s'élèvera du milieu de vous des hommes qui enseigneront des choses pernicieuses, pour entraîner les disciples après eux.

 

1 (1) Phil. 3 : 17. Voir aussi la note 6 de l'introduction.

(2) Si certains nous regardent comme des "ouvriers trompeurs » (2 Cor. 11 : 13-15), nous leur proposons de se servir de la pierre de touche qu'Esaïe donne pour reconnaître ce qui est de Satan (Es. 8 : 19, 20) : la loi et le témoignage, c.-à-d. la Parole écrite.

(1a) 2 Pi. 2 ; 1 Jean 2 et 4 ; 2 Jean ; Jude.

 

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Veillez donc, vous souvenant que, durant trois années, je n'ai cessé nuit et jour d'exhorter avec larmes chacun de vous » (Actes 20 : 29-31).

« Ces hommes-là sont de faux apôtres, des ouvriers trompeurs, déguisés en apôtres de Christ. Et cela n'est pas étonnant, puisque Satan lui-même se déguise en ange de lumière. Il n'est donc pas étrange que ses ministres aussi se déguisent en ministres de justice. Leur fin sera selon leurs oeuvres » (2 Cor. 11 : 13-15).

Dans ses dernières épîtres, il parle de toute la période qui le sépare de la fin de l'âge présent.

« Évite les discours vains et profanes, car ceux qui les tiennent avanceront toujours plus dans l'impiété, et leur parole rongera comme la gangrène » (2 Tim. 2 : 16, 17).

« Sache que, dans les derniers jours, il y aura des temps difficiles. Car les hommes seront égoïstes, amis de l'argent, fanfarons, hautains, blasphémateurs, rebelles à leurs parents, ingrats, irréligieux, insensibles, déloyaux, calomniateurs, intempérants, cruels, ennemis des gens de bien, traîtres, emportés, enflés d'orgueil, aimant le plaisir plus que Dieu, ayant l'apparence de piété, mais reniant ce qui en fait la force » (2 Tim. 3: 1-5).

« Mais les hommes méchants et imposteurs avanceront toujours plus dans le mal, égarant les autres et égarés eux-mêmes » (2 Tim. 3 : 13).

« Car il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine ; mais, ayant la démangeaison d'entendre des choses agréables, ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs, détourneront l'oreille de la vérité, et se tourneront vers les fables » (2 Tim. 4 : 3, 4).

Il ne s'agit pas seulement des incrédules, mais aussi des croyants :

« Il doit redresser avec douceur les adversaires, dans l'espérance que Dieu leur donnera la repentance pour arriver à la connaissance de la vérité, et que, revenus à leur bon sens, ils se dégageront des pièges du diable, qui s'est emparé d'eux pour les soumettre à sa volonté » (2 Tim. 2 : 25, 26).

Paul était-il au moins satisfait d'avoir organisé et consolidé un grand nombre d'églises qui se maintiendraient dans la vérité, dans toute la vérité ? Nous avons déjà vu ci-dessus qu'il ne se faisait aucune illusion à ce sujet et qu'une prière continuelle et prolongée pendant trois ans n'était pas superflue.

 

 

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Et plus il allait loin dans l'exposition de ses révélations, plus il se rendait compte qu'on l'abandonnait. Il fut obligé de dire aux Philippiens :

« Car je n'ai personne ici qui partage mes sentiments, pour prendre sincèrement à coeur votre situation ; tous en effet cherchent leurs propres intérêts, et non ceux de Jésus-Christ » (Phil. 2 : 20, 21).

Après avoir parlé de trois compagnons, il ajoute :

« Ils sont du nombre des circoncis, et les seuls qui aient travaillé avec moi pour le royaume de Dieu, et qui aient été pour moi une consolation » (Col. 4 : 11).

On voit que la grande majorité de ceux qui ont travaillé avec lui n'ont pas été pour lui une consolation. Nous sommes persuadés que ces collaborateurs étaient des croyants sérieux, mais nous sommes obligés de croire aussi qu'ils s'arrêtaient, soit à la sphère terrestre, soit à la sphère céleste, ou même étaient anti-scripturaires en certaines questions. Bien rares étaient ceux qui le suivaient dans la sphère sur céleste. Ils travaillaient pour le « Royaume de Dieu », une expression qui englobe beaucoup de choses, mais ils ne travaillaient pas pour l'Église du mystère. Il est fort probable, que l'on disait de Paul ce que certains de nos lecteurs diront de nous : « Vous allez trop loin. » Ils jugeaient donc Paul d'après leurs propres idées au lieu d'accepter ses révélations, qui dépassaient en effet tout ce qu'ils avaient entendu eux-mêmes auparavant. Nous ne prétendons pas que tous étaient des ministres de Satan, loin de là, mais ils étaient les victimes de ces ouvriers trompeurs. Nous n'entendons pas les juger, mais nous devons constater les faits.

Dans sa dernière épître, Paul confirme l'abandon général :

« Tu sais que tous ceux qui sont en Asie m'ont abandonné » (2 Tim. 1 : 15).

Or on se souvient de ce qu'il disait pendant les Actes :

« Cela dura deux ans, en sorte que tous ceux qui habitaient l'Asie, Juifs et Grecs entendirent la parole du Seigneur » (Actes 19 : 10).

Tous ceux d'Asie l'avaient entendu et abandonné. Même quand sa vie est en péril, ils ne passent pas sur ce qui les sépare de Paul au point de vue doctrinal, mais persistent dans leur abandon :

 

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« Dans ma première défense, personne ne m'a assisté, mais tous m'ont abandonné » (2 Tim. 4 : 16).

Que l'on se rende bien compte que ces épîtres ont été écrites pendant une période où, d'après la tradition, « l'Église » aurait déjà été très nombreuse et en pleine activité. Nous ne doutons pas qu'il y ait eu alors, en effet, des dizaines de milliers de croyants actifs et courageux, prêts à donner leur vie. Mais nous regrettons d'avoir à constater qu'ils ont abandonné Paul et son enseignement. Ils avaient la foi en Dieu, en Christ, mais n'atteignaient pas les sphères supérieures, la perfection, le but de Dieu. Les temps étaient fort difficiles et nous pouvons supposer que certains se sont excusés, comme on le fait encore actuellement, en disant qu'avant tout il fallait un « Évangile simple », qu'on n'avait pas de temps pour toutes les subtilités de cet « intellectuel » qu'était Paul, pour toutes ces doctrines compliquées. On osait peut-être dire déjà que les choses du coeur devaient primer celles de l'intelligence. Quoi qu'il en soit, nous avons à tenir sérieusement compte de ce fait indéniable qu'à part quelques rares exceptions, les croyants les plus sérieux, les plus pieux, ont abandonné Paul après qu'il eut fait connaître le grand mystère (2). Or si nous croyons à l'inspiration des épîtres de Paul, ne sommes-nous pas alors obligés, non pas de suivre les enseignements de ces chrétiens, mais au contraire de nous méfier d'eux au point de vue doctrinal et de faire un effort pour nous dégager de la tradition humaine ?

Quelques croyants étaient « fidèles » et c'est particulièrement à ces « saints et fidèles en Christ-Jésus » qu'il adresse ses dernières épîtres (3).

C'étaient des membres de l'Église qui est le Corps de Jésus-Christ et qui devenaient conscients de leur position. Ou c'étaient au moins des croyants qui étaient prêts à accepter les derniers enseignements de Paul. Le nombre de chrétiens augmentait rapidement, mais les croyants fidèles semblent toujours être restés des exceptions. Paul avait rapidement traversé en esprit les éons et les sphères correspondantes et était arrivé en esprit à l'état final où Dieu est tout en tous.

 

2 (2) Voir App. 6.

(3) Eph. 1 : 1 ; Col. 1 : 2 ; 2 Tim. 2 : 2. Le grec pour « fidèle est « pistos »

 

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Le plus grand nombre de chrétiens restait en arrière, soit dans la sphère de la Nouvelle Naissance, soit dans celle de la Nouvelle Création et de la justification. Quelques-uns seulement suivaient Paul dans la sphère parfaite.

Ici se pose une question grave : qu'ont fait les Apôtres de la circoncision, qui survivaient à la fin des Actes ? La Parole reste muette à ce sujet. Nous n'avons aucune indication dans leurs écrits qu'ils aient connu la sphère sur céleste. Leur mission était d'amener Israël à occuper sa position dans le monde afin que les nations fussent bénies. Pendant tout l'éon à venir Israël exercerait sa mission sur terre. Or, comme les nouveaux cieux et la nouvelle terre ne commencent qu'après l'éon prochain, jusqu'à ce moment Israël se tient dans l'ancienne création. Il s'ensuit qu'il était impossible aux Douze de proclamer l'évangile de Paul, qui transporte en esprit ceux qui le reçoivent dans la nouvelle création, où il n'y a plus ni Juif ni Gentil. Les Douze avaient une mission terrestre et se bornaient à exécuter cette mission. Si parfois nous pouvons croire entendre chez eux un vague reflet de l'évangile de Paul, il est certain qu'ils ne disent cependant pas un mot du grand mystère.

Mais que faisaient-ils après le rejet d'Israël et surtout après la destruction du temple, quand le Royaume était loin ? Il est inutile de raisonner sur ces questions. Ce qu'il nous faut ce sont des faits. Or si l'Écriture ne nous donne pas d'indications, nous avons les documents humains de ce temps. Nous n'avons jamais eu recours à de tels documents quand il s'agissait de choses divines, mais il est normal de les consulter quand on veut savoir ce que les hommes ont fait et pensé. Nous examinerons donc les écrits des deux premiers siècles sous ce rapport. Mais avant cela, tâchons de nous placer dans la situation de ce temps.

 

5.       Le Désarroi général au Premier Siècle

 

L'année 70 avait scellé, par la destruction de Jérusalem et la dispersion des Juifs, le rejet provisoire d'Israël en tant que peuple élu. Pendant environ deux mille ans, le Seigneur avait montré Sa patience et Sa grâce envers ce peuple. Les nations avaient été reléguées au second plan et Israël constituait en somme le pivot de l'histoire humaine.

 

 

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Tous les croyants des Actes vivent dans l'atmosphère du Royaume terrestre à venir et attendent la venue du Roi en gloire. Même la venue prématurée des bénédictions abrahamiques célestes sur les nations avait pour but d'apporter la conversion d'Israël et l’avènement du Royaume terrestre. C'est en se pénétrant de cet état d'esprit, que l'on peut plus ou moins se figurer quel coup de foudre a été le rejet d'Israël, et quelle importante limite constitue les années 60 à 70.

L'histoire confirme ce désarroi et nous en examinerons quelques exemples dans ce qui suit.

Jusqu'alors toute la Parole présente Israël comme le centre du dessein de Dieu et ne connaît que les bénédictions qui doivent venir par cette nation ou avec elle. Que reste-t-il donc quand Israël disparaît ? Sur quoi faille-t-il s'appuyer ? Avec les Douze, on avait une autorité vivante, comme il convient à une communauté visible. Mais quand ce peuple est rejeté, que devient cette autorité vivante ? Il est vrai que Paul est venu avec quelque chose de nouveau. Il a parlé d'un mystère caché de tout temps, d'une Église invisible, mais qui voudrait le suivre dans ces enseignements ? On se détourne complètement de lui et la tendance principale parmi les chrétiens juifs et Gentils est de rester fidèle aux enseignements des Douze. La solution qui a le plus de succès est que « l'Église » remplace Israël, qu'elle est le vrai Israël, donc héritière de toutes les promesses et que tout ce qui est prophétisé concernant ce peuple, doit s'entendre d'une manière « spirituelle » de « l'Église » (1). Quoique le peuple terrestre disparaisse, on garde autant que possible ce qui est visible. On retourne vers l'Ancien Testament et les Évangiles et on oublie Paul. On constate alors trois courants principaux parmi les chrétiens :

1) Ceux qui « judaïsent » et s'appliquent autant que possible littéralement l'enseignement de l'Ancien Testament et des Douze. Ce sont surtout les juifs chrétiens ;

2) Ceux qui réagissent contre cette tendance et rejettent l'Ancien Testament, comme Marcion ;

3) Ceux qui « spiritualisent » et tâchent ainsi de résoudre les difficultés.

 

1 (1) Ceci ne pouvant pas se soutenir intégralement, on résolut généreusement de laisser toutes les malédictions pour les Juifs et de réserver les bénédictions à « l'Église » !

 

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Dans certains cas, ils vont si loin qu'ils affirment, comme Barnabas, que les Juifs ont mal compris Moïse et que jamais ils n'auraient dû prendre la circoncision, le sabbat, les offrandes, etc. à la lettre ! Ils n'ont jamais été le vrai peuple de Dieu !

Nous verrons dans ces écrits qu'une grande partie du monde chrétien prétendait être « apostolique ». Mais de partout surgissent des difficultés quand on veut s'appliquer les prescriptions juives ; il est difficile de savoir jusqu'à quel point il faut « spiritualiser ». Les « évêques » s’anathémisent entre eux ; c'est le chaos et il faut beaucoup de temps avant que tout se calme et qu'on se mette d'accord. Les persécutions et les hérésies antichrétiennes favorisent cependant cette entente et l'on voit naître « l'Église universelle » (ou catholique) dont Rome est le centre et la tête.

Et que deviennent ceux qui sont restés fidèles à Paul ? Nous l'ignorons. Ils formaient sans doute une minorité infime et méprisée. Ils ont peut-être bien laissé des documents, mais ceux-ci semblent être inconnus. S'ils existent, ils ne sont pas traduits, pas compris ou simplement négligés par les savants.

Examinons maintenant les plus importants des documents connus. Avant tout, ceux des « Pères apostoliques ».

 

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TROISIÈME PARTIE

 

Les documents humains

des premiers siècles

 

La majorité des chrétiens croyait encore, après l'an 70, à la prochaine venue du Seigneur et s'attendait à voir commencer le Royaume terrestre. Barnabas, Clément, Hermas, Ignace, Polycarpe et beaucoup de « Pères de l'Église » parlent de cette venue en termes non équivoques. Ils gardaient donc l'espoir, espoir justifié pendant les Actes, alors qu'Israël pouvait encore se repentir, mais complètement périmé quand ce peuple avait été écarté pour un temps. Voilà au moins une chose qu'ils ne « spiritualisaient » pas.

Quand ils parlent du Seigneur, ils l'appellent surtout « Jésus », c à d. qu'ils Le connaissent surtout dans Son humiliation et non comme le « Christ-Jésus » placé à la droite de Dieu.

La justification par la foi fut entièrement perdue de vue, ainsi que tout ce qui caractérise Paul.

Nous donnons ci-dessous quelques extraits de ces documents afin que le lecteur puisse juger par lui-même.

 

a)       Épître de Barnabas.

 

Barnabas écrivait vers la fin du premier siècle. On a supposé que c'était lui qui avait accompagné Paul.

L'épître attribuée à Barnabas se réfère à des passages comme Es. 1 : 11-13 ; Jér. 7 : 22-23 ; Zach. 8 : 17 ; Es. 58 : 4 -10, etc., qui insistent sur la signification des offrandes et des cérémonies et rappellent que toute la loi dépend du commandement d'aimer Dieu et son prochain. Barnabas pense trouver là un argument décisif pour son idée que jamais Dieu n'a demandé ces offrandes à la lettre. Après avoir cité Ex. 33 : 1-3 il ajoute :

 

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Barnabas 6. « mais que dit la connaissance ?

Comprenez bien. Espérez en Lui, qui paraîtra bientôt en chair, Jésus... Mais que dit-Il donc ? Vers le pays où coule le lait et le miel. Béni soit notre Seigneur, frères, qui nous donne la sagesse et l'intelligence de ces choses cachées. Car le prophète parle en allégorie à propos du Seigneur... C'est nous-mêmes qu'Il a conduits dans le bon pays. Qu'est-ce alors que le lait et le miel ? C'est parce que l'enfant est d'abord maintenu en vie par le miel et le lait. Ainsi de même, comme nous sommes maintenus en vie par notre foi dans la promesse et par la parole, nous vivrons et serons seigneurs de la terre. »

Quand il parle de Jér. 4 : 4 il insiste aussi sur l'idée que seule la circoncision du coeur est demandée et non pas celle de la chair :

Barnabas 9. « mais vous direz : en vérité, ce peuple avait la circoncision comme un signe. Non, ainsi l'est aussi tout Syrien et tout Arabe et tous les prêtres des idoles. Appartiennent-ils donc tous à l'alliance ? Même les Égyptiens sont circoncis. »

Il veut donc conclure que la circoncision de la chair ne prouve rien du tout et n'a jamais été demandée.

À propos des indications de Moïse, défendant de manger des animaux impurs, il dit :

Barnabas 10. « Dieu ne leur défend pas de manger avec leurs dents, mais Moïse parle en esprit... Vous voyez quel sage législateur Moïse était. Mais comment pouvaient-ils voir et comprendre ces choses ? Mais nous qui avons une vue correcte sur ces commandements, nous en parlons confortablement à la volonté du Seigneur. »

La prophétie d'Ezéch. 47 : 1-12 est expliquée ainsi:

Barnabas 47 - 11. « Il dit ceci parce que nous descendons dans l'eau, chargés de péchés et d'ordures, et que nous en sortons portant du fruit en notre coeur, laissant reposer notre crainte et espérance sur Jésus en esprit. »

Sous prétexte que la Parole parle des bénédictions des Gentils, il croit que la Nouvelle Alliance est faite avec eux et non avec Israël, comme Jér. 31 : 31 le dit si clairement. Le « sabbat » est le temps qui vient après les six « jours », qui sont d'après lui les six milliers d'années depuis la création.

Après avoir mentionné Es. 1 : 13, il ajoute :

 

 

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Barnabas 15. « Vous voyez ce qu'il veut dire : ce ne sont pas nos sabbats présents qui Lui plaisent. »

Ainsi Barnabas supprime aussi le sabbat hebdomadaire. Il prétend du reste qu'il ne faut pas non plus prendre les prophéties à la lettre. C'étaient des allégories que les Juifs ne pouvaient pas comprendre.

Nous voyons donc que Barnabas est un des précurseurs de la « spiritualisation » de ce que Dieu dit dans sa Parole. Mais où faut-il s'arrêter dans cette voie ? Tout contrôle logique devenant impossible, c'est la porte ouverte librement à la fantaisie individuelle. Cette erreur est donc bien ancienne et a commencé pendant l'âge « apostolique ». Parce qu'on avait abandonné Paul on était obligé pour sortir d'une situation désespérée de recourir à une solution de fortune.

Devons-nous suivre ces enseignements ? Nous savons que la grande majorité l'a fait et a donné comme argument que ce point de vue est ancien et traditionnel. Mais nous ne voyons pas qu'une erreur doit être acceptée parce qu'elle est ancienne. La vérité l'est encore plus, et Barnabas n'était en son temps qu'un novateur dangereux. Si l'on doit rester fidèle aux « Pères », nous préférons les « Pères d'Israël » aux « Pères apostoliques ».

 

b)       La « Doctrine des Douze Apôtres ».

 

Cet écrit, nommé aussi « Didachè », date de la fin du Ier siècle ou du commencement du IIe. C'est faussement qu'on l'a attribué aux Douze, mais cette attribution illégitime montre assez que la masse des chrétiens suivait les Apôtres de la circoncision. Plusieurs autres écrits leur ont aussi été attribués. On a dit de la Didachè que c'était le plus ancien document existant, après le Nouveau Testament. Une copie, datant de l'année 1056 a été trouvée au XIXe siècle à Constantinople. Ce document est divisé en 16 chapitres assez courts dont le contenu rappelle l'enseignement des Évangiles. On y trouve des prescriptions éthiques empruntées à la Loi et aux Évangiles, plus ou moins adaptées aux nouvelles circonstances. Voici d'abord quelques extraits caractéristiques :

1 : 3. « Jeûnez pour ceux qui vous persécutent. »

4 : 6. « Si vous avez des possessions, vous donnerez une rançon pour vos péchés. »

 

 

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6 : 2. « Car si vous savez porter le fardeau entier du Seigneur, vous êtes parfait, mais si vous ne le pouvez pas, faites ce qui vous est possible. »

 

Nous nous trouvons ici entièrement dans le domaine de la justification par les oeuvres et il est évident que l'auteur rejette les messages de Paul (1). On attache, beaucoup d'importance à ce document (souvent plus qu'à une partie des Écritures) et cela donne une idée de la mentalité générale au Ier siècle et à ce jour. Nous faisons suivre encore quelques parties :

 

7 : 1. Pour ce qui concerne le baptême, baptisez ainsi : Après avoir enseigné toutes ces choses, baptisez au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, dans de l'eau courante.

2. Mais si vous n'avez pas d'eau courante, baptisez dans une autre eau ; et si vous ne pouvez pas le faire dans de l'eau froide, faites-le dans de l'eau chaude.

3. Mais si vous n'avez même pas cela, versez de l'eau trois fois sur la tête, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.

4. Mais avant le baptême, faites jeûner celui qui baptise aussi bien que celui qui est baptisé et même d'autres qui savent le faire. Vous demanderez à celui qui est baptisé de jeûner un ou deux jours d'avance.

8 : 1. Mais que votre jeûne ne coïncide pas avec celui des hypocrites, car ils jeûnent le deuxième et le cinquième jour de la semaine ; mais vous jeûnerez le quatrième jour et le jour de la préparation (2).

2. Ne priez pas non plus comme les hypocrites, mais comme le Seigneur l'a ordonné dans son Évangile... Priez ainsi : « Notre père... »

3. Priez ainsi trois fois par jour.

9 : 1. Mais à propos de l'eucharistie, rendez grâce ainsi.

2. D'abord concernant la coupe, « nous rendons grâce à toi, notre Père, pour la vigne sainte de ton enfant David, que tu nous as fait connaître par ton enfant Jésus, à toi soit la gloire dans les siècles. »

3. Concernant le (pain) rompu, « nous rendons grâce à toi, notre Père, pour la vie et la connaissance que tu nous as fait connaître par ton enfant Jésus à toi soit la gloire dans les siècles. »

 

1 (1) Batiffol dans l'Église Naissante, p. 131, dit : « La Didachè qui, à cet égard, retarde sur saint Paul, qu'on dirait qu'elle n'a pas connu, a tout de même le sentiment de cette unité. »

(2) Il semble que le « jour de la préparation » indique le vendredi. Les Écritures n'utilisent le mot , paraskeuè , (préparation) que pour le jour de la préparation de la Pâque : Mat. 27 : 62 ; Marc 15 : 42 ; Luc 23 : 54 ; Jean 19 : 14, 31, 42.

 

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4. De la même manière que ce (pain) rompu était dispersé sur les montagnes et, étant rassemblé, est devenu un (seul pain), que de même ton Église soit rassemblée des extrémités de la terre dans ton royaume, car à toi est la gloire et la puissance par Jésus-Christ dans les siècles. Mais ne laissez manger ni boire personne de l'eucharistie, excepté ceux qui sont baptisés au nom du Seigneur, car, concernant ceux-ci, le Seigneur a dit : « Ne donnez pas les choses saintes aux chiens. »

10 : 1. Après être rassasiés, rendez grâce ainsi.

2. « Nous rendons grâce à toi, Saint-Père, pour ton saint nom, que tu as fait habiter dans nos coeurs, et pour la connaissance et la foi et l'immortalité que tu nous as fait connaître par Jésus, ton enfant, à toi soit la gloire dans les siècles.

3. Toi, Seigneur tout-puissant, tu as fait toutes choses pour ton nom ; tu as donné la nourriture et la boisson aux hommes pour en jouir afin qu'ils puissent te rendre grâce, mais tu nous as bénis avec de la nourriture et de la boisson spirituelle et avec la vie éternelle par ton enfant.

4. Avant tout, nous te rendons grâce que tu es puissant ; à toi soit la gloire dans les siècles.

5. Souviens-toi, Seigneur, de ton Église pour la délivrer de tout mal et pour la rendre accomplie dans ton amour, et rassemble-la des quatre vents, elle qui est sanctifiée, dans ton royaume que tu as préparé pour elle ; car à toi est la puissance et la gloire dans les siècles.

6. Laisse venir la grâce et laisse passer ce monde. Hosanna au Dieu de David. Si quelqu'un est saint qu'il vienne, si quelqu'un n'est pas saint, qu'il se repente. Maranatha. Amen. »

7. Permettez aux prophètes de rendre grâce tant qu'ils veulent.

 

Le chap. 13 demande des prémices de la moisson, des boeufs et des moutons, etc. pour les prophètes et les pauvres.

 

14 : 1. Rassemblez-vous le seigneurial (jour) du Seigneur et rompez le pain, et rendez grâce après avoir, confessé vos fautes, afin que votre offrande soit pure.

2. Que celui qui a une dispute avec son ami ne s'unisse pas à vous avant d'être réconcilié, afin que votre offrande ne soit pas souillée.

3. Car voici ce que le Seigneur a dit : « En tout lieu et temps, présentez-moi une offrande pure, car je suis un grand roi, dit le Seigneur, et mon nom est grand, parmi les nations. »

 

 

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On se rend compte de la différence énorme qui existe entre ce langage et celui des Écritures. Il y a là une adaptation des cérémonies juives, des prières « standardisées », etc. La « sainte cène » est appelée une offrande. Tout cela peut très bien être utilisé par Rome, qui professe s'appuyer sur la tradition ; mais ce n'est certainement pas scripturaire.

 

c)       Les Épîtres de Clément

d)        

Elles datent de la fin du Ier siècle et sont adressées aux Corinthiens. Elles parlent d'offrandes qui doivent être faites à des jours et à des heures déterminés et d'une succession dans les fonctions ecclésiastiques. La « loi du Seigneur » doit être suivie, les « prêtres supérieurs », les « prêtres » et les « lévites » ont leurs fonctions déterminées. On voit que des instructions humaines devaient êtres introduites et se substituaient en partie aux instructions divines données au peuple d'Israël (3).

Les objections contre le rituel chrétien restent toujours les mêmes : toute cérémonie demandée par Dieu, était complètement décrite et ceux auxquels Il s'adressait avaient tous les détails directement de Lui. Si l'on veut se substituer à Israël, il faudrait continuer à suivre ces cérémonies divines ou justifier un changement. Si Dieu avait voulu d'autres cérémonies des chrétiens on le saurait et celles-ci auraient été observées depuis le début. Nous voyons, au contraire pendant les premiers siècles une évolution lente ayant comme point de départ les cérémonies juives et païennes.

 

3 (3) Batiffol dit à ce propos " Oui, la Prima Clementis proclame le droit divin de la hiérarchie investie par les apôtres » (L'Église Naissante, p. 156). Or cette hiérarchie des prêtres et lévites est en majeure partie empruntée à Israël. Ce n'est que dans le cas où " l'Église » est le « vrai Israël » qu'on peut parler de « droit divin » en relation avec ces institutions, et encore faudrait-il enlever ce qui est d'innovation humaine. La question cruciale restera toujours : Dieu se repent-Il de Ses dons et de Son appel ? (Rom. 11 : 29). C'est-à-dire Dieu a-t-Il abandonné définitivement Israël comme peuple élu terrestre ? La réponse scripturaire est formelle et négative. Les discussions interminables de Batiffol, Harnack, Lightfoot, Renan, Sabatier, Sohm et beaucoup d'autres ne touchent pas le point principal et se perdent dans la confusion. Si « l'Église ) remplace Israël, la position de l'Église Romaine est solide. Si « l'Église » est le vrai Israël, elle est une Église visible et il lui faut une autorité vivante indiscutable. Mais plus on insiste sur cette position solide et sur la tradition « apostolique » et plus on démontre ,sa faiblesse scripturaire.

 

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Comment ose-t-on faire ce que Dieu n'a pas demandé ? Ou prétend-on que tout ce qu'on fait est de source divine ? Rome peut, sans y parvenir, essayer de se justifier. Mais que peuvent dire ceux qui prétendent vouloir s'appuyer uniquement sur la Parole écrite pour tout ce qui concerne leur vie religieuse ? La faiblesse de toutes les « Églises » actuelles réside dans leur origine. Alors que tout ce qui concerne un peuple visible comme Israël est net et clair, « l'Église » commence dans les ténèbres, au temps où Israël fut rejeté, Paul abandonné et où il n'y avait aucune unité, mais un désarroi complet.

Clément ne connaît rien de la doctrine de Paul, quoiqu'il mentionne « l'évangile » de cet apôtre.

 

(d) Les Épîtres d'Ignace.

 

Elles datent de la fin du Ier siècle ou du commencement du IIe.

Il dit aux Éphésiens : « Vous, disciples de Paul » et leur recommandent de ne pas résister aux évêques, qu'ils doivent considérer comme le Seigneur même.

Aux Tralliens : « Il faut respecter les diacres comme ordonnés par Jésus-Christ ; l'évêque comme celui qui est la figure du Père ; les anciens comme mandataires de Dieu et comme continuation des Apôtres. Sans eux, il n'y a pas d'Église. »

Aux Philadelphiens : « Faites attention de n'user que d'une seule eucharistie. Car une est la chair de Jésus-Christ, et un le calice dans l'unité de son sang ; un autel... » « Je vais à l'Évangile comme à la chair de Jésus, et aux Apôtres comme aux ancêtres de l'Église. »

Aux Smyrnéens : « Ils s'abstiennent de l'eucharistie et de la prière parce qu'ils ne confessent pas que l'eucharistie est la chair de notre Sauveur Jésus-Christ, celle qui a souffert pour nos péchés et que le Père a ressuscitée... Où est l'évêque, que là s'assemble la multitude ; de même que là où est le Christ-Jésus, là est l'Église catholique... »

« Celui qui honore l'évêque est honoré de Dieu... Celui qui agit de quelque manière sans consulter l'évêque, est le serviteur du diable. »

Graduellement le clergé se forme et devient puissant. Que nous sommes loin de Paul ! Préférons-nous Ignace ?

 

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e)       L'épître de Polycarpe

 

Aux Philippiens il parle de l'épître de Paul qui leur est adressée, mais ce qu'il écrit est complètement étranger à l'enseignement de Paul.

 

f)        Les livres d'Hermas

 

L'esprit général ici encore est l'observation de la loi et la justification par les oeuvres. L'auteur dit p. ex. « Si je ne pèche plus je serai sauvé. » Il parle beaucoup d'un édifice qui représente « l'Église » et on a voulu en déduire qu'il se rapprochait de Paul. Malheureusement sa doctrine est tout l'opposé de celle de l'Apôtre.

 

g)       Constitutions des Apôtres

 

Cet écrit a été attribué à Clément, mais l'authenticité en est fort discutée. Il daterait du IVe siècle. Les choses ont évolué et le ritualisme commence à se stabiliser. Au chapitre 57 du Livre 11 il dit :

 

« Après cela, que l'évêque fasse le sacrifice, tout le peuple étant debout... et quand il aura été offert qu'il prenne le corps du Seigneur et le sang précieux, tous s'avançant avec ordre et avec respect et crainte, comme au corps du roi ; les femmes aussi. »

 

Cet écrit montre elle-même ses erreurs, quand il prétend que ces « Constitutions » ont été rédigées par les Douze et par Paul :

 

« Pierre et André, Jacob, etc., de même Jacques, frère du Seigneur, Évêque de Jérusalem, et Paul, Docteur des Gentils, Vase d'élection, tous ensemble réunis avons mis par écrit cette doctrine catholique. »

 

L'Église romaine tire de ce document la série de « Papes » : Pierre, Linus, Anacletus, Clément, etc. Une des bases de cette Église est donc un document douteux, plein d'erreurs.

 

h)       Les Pères Apologètes

 

Nous trouvons là : Justin, Irénée, Tertullien, Cyprien, Clément d'Alexandrie, Origène, qui écrivent aux IIe et IIIe siècles.

 

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L'opposition contre le Christianisme en général a favorisé la formation d'un groupe, qui entreprend la lutte contre les « hérésies ». Paul est parfois mentionné par eux quand on trouve chez lui un argument contre les adversaires, mais sa doctrine reste toujours ignorée. On admet qu'il y a beaucoup de questions obscures et l'on recommande de se borner à ce qui est clairement et ouvertement proposé par les Écritures.

Justin dit :

 

« Douze hommes sont partis de Jérusalem pour parcourir le monde : ces hommes étaient simples et sans éloquence, mais avec la vertu de Dieu ils annonçaient aux hommes de toute race qu'ils étaient envoyés du Christ pour enseigner à tous la parole de Dieu » (Apolog. 1 : 23).

 

Il n'est donc pas question de Paul et contrairement aux Écritures, les Douze se seraient adressés à tous. D'après Justin, les prophéties de Michée se sont réalisées depuis que les apôtres ont porté l'évangile aux Gentils dans le monde entier (Dialog. 110 : 4). Il dit aussi :

 

« Ceux qui croient au Christ sont une âme, une synagogue, une église » (Dialog. 63 : 5).

Irénée écrit dans son troisième livre, chapitre 1 :

« Quant à Luc, sectateur de Paul, il fit un livre de l'Évangile prêché par Paul... auquel si quelqu'un n'adhère pas, il méprise ceux qui participent du Seigneur, et se damne lui-même en repoussant son propre salut : c'est ce que font les hérétiques. »

 

Or ce que Luc écrivit, ce sont les Actes des apôtres et nous avons vu que ces Actes traitent à peu près exclusivement d'Israël et de la venue du Royaume. L'Évangile de Paul est exposé dans ses épîtres et non pas dans les Actes. On voit ainsi combien peu Irénée connaissait les enseignements spéciaux de Paul. Au troisième chapitre il dit :

 

« Par la tradition des Apôtres, et par la succession continue, conservée dans les Églises, des Évêques institués par eux, on confond invinciblement les hérétiques. »

Les hérétiques, ce ne sont pas ceux qui s'opposent à la Parole de Dieu, mais ceux qui ne croient pas à la tradition humaine.

 

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Tandis que les plus anciens documents ne parlent pas d'une prépondérance de l'Église de Rome, nous trouvons à la fin du IIe siècle chez Irénée qu'elle devient la « grande, très antique » Église qui aurait été constituée par Pierre et Paul !

 

« Car à cette Église, à cause de sa primauté qui s'impose, il est nécessaire que toute autre Église se rattache ; en elle a été toujours la tradition qui vient des Apôtres. »

 

En lisant ces écrits, on est frappé par le fait que l'origine de « l'Église » est, même pour ceux de cette époque, dans les ténèbres. Tout ce qu'Irénée dit n'est pas généralement établi, au contraire il cherche des renseignements de divers côtés, tâche de se justifier, fait des déductions, etc. Nous verrons qu'Eusèbe confirme cette incertitude et ce manque d'informations indiscutables.

De ce temps certains opposaient Paul à Pierre. Irénée dit qu'ils sont apôtres du même Dieu (13e chap.). Il défend Paul contre les Ébionites (14e et 15e chap.). Il montre que « lateinos » (latin) donne par addition de la valeur numérique des lettres, le nombre 666 et il est donc inutile pour nous de chercher là un argument contre l'Église romaine qu'Irénée aide justement à créer.

Tertullien et Cyprien s'en réfèrent en tout à Irénée et confirment qu'il y avait rivalité entre ceux qui mettaient Pierre en relief et d'autres qui soutenaient Paul. Tertullien nie que Paul ait prêché un autre évangile que Pierre ! Après une visite à Rome, il en revient désenchanté et nie que « l'Église », considérée comme organisation extérieure, ait les « clefs ». C'est Pierre seulement qui les avait, pense-t-il.

L'Église est appelée « l'épouse ». Des sept Églises de l'Apocalypse, celle de Pierre est la première. Cyprien ne fait pas mention de Paul. Clément d'Alexandrie et Origène parlent un peu différemment et semblent résister à la primauté de Pierre et de Rome. Origène surtout connaît Paul et semble se rendre compte que son message diffère de celui des Douze.

 

i)        Eusèbe

 

Nous terminerons par Eusèbe (Évêque de Césarée, le « père » de l'histoire de l'Église) qui écrivait au IVe siècle. Il essaie d'écrire l'histoire d'une manière systématique et est fort gêné par le manque de documents clairs et positifs.

 

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Les quelques indications sont « comme de faibles lumières qui paraissent de loin ». La tradition s'est cristallisée en une organisation et on désire maintenant établir une base pour cette tradition.

Eusèbe parle de Papias qui croyait en un Royaume de 1000 ans, mais il trouve cela trop fabuleux. Népos au IIIe siècle avait aussi cette espérance.

Il nous fait connaître que certains martyrs du IVe siècle s'appelaient par des noms juifs pour montrer, qu'ils étaient le véritable Israël. La prophétie connue des os d'Ézéchiel 37 signifierait que des églises seraient bâties et que le christianisme se répandrait partout. La prophétie d'Es. 35 : 1-6 ne concerne pas Israël, mais les faits qui s'accomplissent depuis l'avènement de Constantin : c'est l'épanouissement de « l'Église ». De même plusieurs autres prophéties ont comme sujet « l'Église ». On voit que l'idée que « l'Église » remplace Israël et doit réaliser le « Royaume des cieux » sur terre, conduit à en faire un instrument politique et une organisation appartenant à ce monde. Eusèbe connaît Paul, mais pas ses doctrines.

Nous faisons suivre quelques extraits d'Eusèbe, qui nous donnent de singulières précisions concernant la Pâque juive et son observance par les Apôtres, Évêques, etc.

 

Livre 5, Chap. 23. Du temps de ces Évêques se produisit une grande dispute à cause des églises de toute l'Asie qui, d'après une très vieille tradition, étaient d'avis qu'il fallait tenir la fête de la Pâque du Seigneur le quatorzième jour de la lune (le jour où les Juifs devaient immoler l'agneau pascal) et que le jeûne devait se terminer en ce jour, quel que fût le jour de la semaine où il tombait. D'autre part, les autres églises dans le monde entier n'avaient pas, l'habitude d'agir ainsi, mais suivaient selon la tradition apostolique, l'usage qui a jusqu'à présent la prépondérance : à savoir qu'il n'est pas permis de rompre le jeûne un autre jour que celui de la résurrection de notre Sauveur. On a alors tenu à ce sujet des Synodes et des Réunions d'Évêques : et tous les Évêques avertirent unanimement les chrétiens de partout de la règle de l'Église par des lettres. Notamment qu'il ne fallait pas fêter le mystère de la résurrection du Seigneur un autre jour que le dimanche et que le jeûne ne devait se terminer que ce jour-là...

Livre 5, Chap. 24. D'autre part, les Évêques d'Asie, avec Polycrate en tête, prétendaient qu'il fallait maintenir avec soin l'usage traditionnel.

 

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Polycrate même explique dans sa lettre à Victor et à l'Église de Rome, que la tradition leur est parvenue ainsi. « C'est nous qui sommes fidèles à la tradition, sans y rien ajouter, sans en rien retrancher. C'est en Asie que reposent ces grandes lumières, qui ressusciteront le jour de l'apparition du Seigneur, quand Il descendra en gloire du ciel et éveillera tous les saints. Philippe, celui qui était un des douze apôtres, qui est enterré à Hiérapolis, ainsi que ses deux filles, qui vieillirent dans la virginité, sans parler de son autre fille, qui observa dans sa vie la règle du Saint-Esprit, et qui repose à Éphèse ; puis Jean, celui dont la tête s'inclina sur la poitrine du Sauveur, lequel fut pontife portant la lame d'or (Voir Lev. 8 : 9, etc.), et martyr, et docteur ; celui-là aussi est enterré à Éphèse ; puis Polycarpe, celui qui fut à Smyrne évêque et martyr ; puis Thraséas, à la fois évêque et martyr d'Euménie, qui est enterré à Smyrne. Pourquoi parler de Sagaris, évêque et martyr, qui est enterré à Laodicée, et du bienheureux Papirius et de Méliton, le saint eunuque, qui vécut en tout dans le Saint-Esprit, lequel repose à Sardes, attendant la venue du Seigneur du ciel, quand il ressuscitera ? Tous célébraient la Pâque le quatorzième jour, selon l'Évangile, sans rien innover, suivant la règle de la foi. »

« Et moi aussi, j'ai fait de même, moi Polycarpe, le plus petit de vous tous, conformément à la tradition de mes parents, dont quelques-uns ont été mes maîtres, car il y a eu sept évêques dans ma famille, je suis le huitième ; et toujours ils ont fêté le jour auquel le Peuple (juif) cessait de manger le pain sans levain. Moi donc, mes frères, qui compte soixante-cinq ans dans le Seigneur, qui ai conversé avec les frères du monde entier, qui ai lu d'un bout à l'autre la Sainte Écriture, je ne perdrai pas la tête, quoi que l'on fasse pour m'effrayer. De plus grands que moi ont dit : Mieux vaut obéir à Dieu qu'aux hommes. »

« Je pourrais citer les évêques ici présents, que, sur votre demande, j'ai convoqués ; si j'écrivais leurs noms, la liste serait longue. Tous étant venus me voir, pauvre chétif que je suis, ont donné leur adhésion à ma lettre, sachant bien que ce n'est pas pour rien que je porte des cheveux blancs, et assurés que tout ce que je fais, je le fais dans le Seigneur Jésus. »

Alors Victor, l'évêque de Rome, essaya de séparer de suite de la communauté toutes les églises d'Asie et celles des environs. À cette fin, il écrivit des lettres dans lesquelles il déclara que tous ces frères étaient bannis de la communion. Mais ceci ne plut pas à tous les évêques. Ils conseillèrent à Victor de ne pas agir ainsi et de garder la paix, l'unité et la charité envers son prochain.

 

 

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Il y a aussi des lettres d'évêques qui attaquèrent Victor avec des réprimandes assez sévères. Entre autres Irénée lui écrivit au nom des Frères de la Gaule, où il était évêque. Dans cette lettre, il reconnaît que le mystère de la résurrection du Seigneur ne doit être fêté que le jour du Seigneur, mais il exhorta Victor à ne pas séparer ces Églises de Dieu, qui suivaient une ancienne tradition. Parmi d'autres choses, il utilisa les mots suivants : « Il n'y a pas seulement différence concernant le jour, mais aussi concernant la manière de jeûner, car les uns prétendent qu'il faut jeûner un jour, d'autres deux jours, d'autres plusieurs jours, enfin il y en a qui comptent comme jour de leur jeûne quarante heures se succédant jour et nuit. Ces différences dans l'observation du jeûne ne sont pas récentes, mais existaient du temps de ceux qui ont vécu avant nous et qui, n'ayant probablement pas été très stricts dans l'observation du jeûne, sont la cause que leurs descendants ont suivi cette coutume, due à la simplicité et à l'ignorance. Mais malgré cette différence, ils ont vécu en paix, comme nous aussi nous vivons en paix. Ainsi cette différence dans le jeûne confirme l'unité de la foi. »

« ... Car Anicet ne parvint pas à convaincre Polycarpe d'abandonner cette ancienne coutume qu'il avait observée avec Jean, le disciple du Seigneur, et avec les autres apôtres. Mais Polycarpe ne sut pas non plus convaincre Anicet de la suivre ; celui-ci disait qu'il était de son devoir d'observer la coutume qu'il avait reçu des anciens, ses ancêtres. »

Livre 3, Chap. 23. De ce temps, l'Apôtre et Évangéliste Jean, que Jésus aima, était encore en vie, et dirigea l'Église d'Asie, étant retourné de son exil à l'île (de Pathmos) après la mort de Domitien.

 

Nous sommes loin de considérer Eusèbe comme infaillible, mais il semble qu'il a dû rendre fidèlement les documents qui étaient à sa disposition. En particulier, quand il parle du conflit entre les Églises d'Asie et les autres, il semble que ces faits ont dû se produire, attendu qu'ils ne sont pas trop favorables à « l'Eglise ». Nous voyons donc en particulier qu'un groupe important de chrétiens, s'appuyant sur l'exemple de Jean et de Philippe (des Douze) et sur d'autres évêques et martyrs, fêtent la Pâque le quatorze Nissan, comme les Juifs, observent le jeûne comme les Juifs, et terminent ce jeûne le jour de Pâques et non le dimanche suivant (4).

 

4 (4) -Ceci confirme aussi que les Juifs chrétiens observaient, pendant la période des Actes, toutes les cérémonies juives.

 

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Ils considèrent cela comme une tradition divine et au risque d'être excommuniés, maintiennent leur point de vue, considérant qu'il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. La fête de Pâque était devenue la fête de la résurrection et était fêtée le dimanche (qu'ils appelaient le « jour du Seigneur » comme les païens). Ceux qui avaient introduit cette nouvelle coutume jeûnaient jusqu'au dimanche. Jean, à son retour de Pathmos, aurait conduit les Églises d'Asie (celles dont Paul dit qu'elles l'ont abandonné). Jean aurait encore donné l'exemple dans l'observation méticuleuse de la fête juive. Il est en tout cas difficile de concevoir que si Jean avait compris et répandu un message correspondant à celui de Paul, on aurait eu recours à lui pour justifier l'observation de cérémonies judaïques parmi les chrétiens. Jean semble donc avoir persévéré dans l'enseignement des Douze, mais sans doute appliqué aux Gentils. Irénée et Clément d'Alexandrie nous l'assurent et il n'existe aucune indication contraire. Il semble d'ailleurs que si tous les évêques et autres piliers de « l'Église » ignorent la doctrine de Paul et tâchent d'adapter les enseignements des apôtres de la circoncision aux Gentils, ils ont dû être dirigés dans cette voie par ces apôtres mêmes. Si ceux-ci avaient compris Paul, ils se seraient opposés à ces pratiques et il est hors de doute que nous l'aurions su. La théorie selon laquelle Israël était remplacé par « l'Église », que tout devait être « spiritualisé » et que les fêtes juives mêmes pouvaient être adaptées aux nouvelles conditions, était acceptée par la grande majorité et c'était en effet la seule solution possible, du moment qu'ils ne suivaient pas les enseignements de Paul.

Pourtant ils avaient bien du mal à venir à bout de cette assimilation des cérémonies juives. Il a fallu des siècles pour arriver à des pratiques assez uniformes, comme celle de la messe, basée sur la Pâque juive et sur le repas du Sabbat. Voir App. 7 et 8. La controverse pascale était particulièrement difficile à résoudre. La masse des chrétiens s'appelait « l'Israël spirituel » et voulait donc garder cette fête (5) qui parlait de la mort du Seigneur, du sacrifice de l'Agneau, mais d'autre part il fallait maintenant y donner un autre caractère en souvenir de la résurrection.

 

5 (5) N'oublions pas que les Gentils non circoncis ne pouvaient pas y avoir part, Ex. 12 : 43-48.

Les documents montrent que la fête de Pâque n'a pas été célébrée en tant que commémoration annuelle de la Résurrection jusqu'à la moitié du second siècle. On gardait la Pâque juive, tout en reconnaissant que l'agneau représentait Christ. Pendant une période de transition on célébrait la « Pâque de la crucifixion » et la " Pâque de la résurrection ». La première a donné naissance à la « messe » et à la « Cène » actuelle. La deuxième est restée la « Pâque chrétienne ».

 

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D'une part le jeûne juif cessait le quatorze Nissan, qui pouvait être un jour quelconque de la semaine, d'autre part pourtant on ne pouvait interrompre le jeûne que le jour de la résurrection, qui était fixé au dimanche ! De génération en génération la tradition juive s'est estompée et la nouvelle coutume a pu être généralisée. Dans ce cas encore, le fait qu'une nouvelle manière d'observer cette fête n'a pas remplacé brusquement celle des Juifs, mais s'est formée lentement, prouve qu'elle n'est pas une institution divine. De même pour les autres cérémonies, il y a incertitude, contradiction, séparation et ce n'est que sous l'influence d'une puissante organisation religieuse et politique favorisée par Constantin, qu'on a pu arriver à uniformiser. C'est p. ex. le Concile de Nicée qui, en 325 imposa à tous de fêter la Pâque le dimanche. Depuis Constantin « l'Église » est devenue l'Église de ce monde, de l'âge présent. L'abandon de Paul et la prétention de remplacer Israël ont porté leurs fruits.

Le fait que les douze Apôtres de la circoncision ont été suivis, plutôt que l'Apôtre de l'incirconcision (6) a évidemment attiré l'attention des théologiens et des savants. D'aucuns, comme Baur et Renan ont cru que c'était là un phénomène temporaire et que le Judaïsme avait remplacé dans « l'Église » l'enseignement de Paul. Or il n'est pas difficile de montrer que ce n'était pas une réaction temporaire et brusque. Ainsi Lightfoot n'a pas eu de peine à montrer qu'Irénée et d'autres ne font jamais allusion à une telle révolution, mais qu'ils sont témoins que l'évolution s'est faite graduellement depuis Jean, par Polycarpe, Papias, etc.

 

6 (6) Nous n'avons -aucune objection à ce qu'on fasse un large usage du message des Douze en ce qu'il a de personnel. Il est même essentiel de présenter à tous les hommes l'évangile du pardon des péchés par la repentance et de leur montrer la nécessité de la nouvelle naissance. Mais il est important, de se souvenir que les Douze adressaient leur message au peuple élu Israël, en vue de sa repentance nationale afin qu'il pût exécuter sa mission nationale dans le Royaume terrestre. Le message personnel était donc partie intégrante d'un message national. Le premier est universel, le second est réservé à Israël. Nous objectons donc à ce qu'on suive les Douze jusqu'à faire application à tous de ce qui concerne seulement Israël et au fait que pour en arriver là on substitue « l'Église -) à Israël, comme si la mission future de ce peuple était dévolue désormais à un nouvel organisme.

 

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Il n'y a pas eu une période spéciale de Judaïsme, mais celui-ci était l'état « normal » de « l'Église ». Ceux qui ont abandonné Paul n'ont pas produit une révolution dans « l'Église », pour la bonne raison que c'est justement cette « Église » qui, dans son ensemble, s'est détachée de la doctrine de Paul. Mais il y a eu, au contraire, révolution quand on est revenu d'une manière résolue vers Paul, ainsi qu'on l'a vu lors de la Réforme. Il est vrai que Saint Augustin était déjà retourné en partie vers Paul, mais ce mouvement concernait seulement la dogmatique et, de ce fait, n'atteignait pas les masses. À ce sujet il peut être intéressant pour certains lecteurs de savoir que les théologiens sont à peu près d'accord pour admettre que Saint Augustin est un des premiers qui retournent vers Paul. Nous citons comme témoin Harnack (7) :

 « Ce n'est que par Augustin que l'Évangile de Paul a été placé, en Occident, sur l'avant-plan ; quant aux pays orientaux, il y est toujours resté dans l'ombre. »

Un théologien de l'Église Réformée Hollandaise (8) a dit :

« Il y a beaucoup de vérité dans l'affirmation d'un savant connu, que, parmi l'Ancienne Église, Marcion était en somme le seul qui comprenait Paul ; et encore Marcion le comprenait-il mal ! Car on ne trouve aucune trace de l'influence des idées fondamentales de l'épître aux Romains, par exemple sur le développement dogmatique de l'Église grecque et latine des premiers siècles. En Occident, Augustin est en somme le premier à se rendre compte de la signification de cette épître. Et, se rattachant à Lui, vient Luther dont on connaît assez les commentaires de l'épître aux Romains. »

Citons encore un autre docteur de cette Église (9):

« Ainsi, l'enseignement d'Augustin est devenu de la plus grande importance pour la dogmatique ultérieure ; il domine les siècles suivants. Toute réformation retourne vers lui et vers Paul. »

Calvin de même cite abondamment Augustin en opposition avec « l'Église ».

 

7 (7) Die Mission und Ausbreitung des Christentums, p. 210.

(8) Le Dr. J. A. C. Van Leeuwen dans De Brief aan de Romei Den, p. 33.

(9) Le  Dr. H. Bavinck dans Gereformeerde Dogmatiek, vol. 1, P. 115.

 

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Nous croyons avoir justifié dans ce chapitre notre affirmation que les chrétiens des premiers siècles ont persisté dans l'abandon de Paul et qu'ils ont été forcés par conséquent de « spiritualiser » l'Ancien Testament et de se substituer à Israël. Ce n'est donc pas vers eux que nous devons nous tourner quand nous voulons toute la vérité, malgré l'admiration que nous pourrions professer à leur égard sur d'autres points. Ce qu'il nous faut et ce qui peut au-dessus de tout glorifier Dieu, ce n'est pas la théologie telle qu'elle s'est graduellement formée en tentant de concilier les Écritures et la tradition en sacrifiant la Parole inspirée par Dieu, mais c'est une théologie purement biblique, c à d. fondée uniquement sur les Écritures (10).

Les origines de ce qu'on nomme « l'Église » sont enveloppées de trop d'obscurité, l'histoire montre trop de variations et de conceptions anti-scripturaires, pour que nous ayons le droit de nous appuyer sur cette organisation. Tout homme a dans les Écritures tout ce qui lui est nécessaire, et cela suffit s'il veut utiliser les facultés naturelles que Dieu lui a données et la grâce que Dieu veut lui donner. Tout le monde ne saurait être « théologien » dans le sens habituel de ce mot, mais tout homme peut être un « théologien » biblique.

 

10 (10) A ce sujet nous citerons un passage de l'Introduction de La Théologie de saint Paul, le livre remarquable du jésuite F. Prat : « La théologie biblique serait protestante si elle avait la prétention d'être toute la théologie : protestante en principe, car par une heureuse inconséquence, jamais les luthériens, ni les calvinistes, pas plus que les anglicans, ne se sont exclusivement renfermés dans la théologie biblique. » Il n'est que trop vrai que le protestantisme a conservé une large part de tradition

 

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Conclusion

 

Nous avons été conduit par notre examen à un certain nombre de conclusions qui s'écartent de ce qui est généralement accepté. Nous le regrettons, mais nous ne pouvons qu'exprimer franchement nos convictions en invitant la critique à montrer où nous sommes en contradiction avec la vérité. À quoi nous servirait de garder une tradition, si celle-ci est contredite par la Parole ?

De plus, nous nous faisons un devoir de répéter que jamais nous ne rejetons systématiquement l'enseignement d'autrui. Nous nous estimons, en tout cas, dans l'obligation morale d'en tenir compte très sérieusement, de l'approfondir. Mais c'est la Parole de Dieu qui doit rester la décisive pierre de touche. Il est vrai que les « évangélistes », « pasteurs » et « docteurs » resteront toujours nécessaires dans la dispensation actuelle. On ne peut pas exclure systématiquement toute aide humaine, mais leurs messages, leurs conseils, leurs enseignements ne devront jamais être présentés comme faisant autorité par eux-mêmes.

Leur fonction ne sera pas de s’imposer, mais d’aider tout homme à se rendre compte de sa propre situation vis-à-vis de Dieu, à former sa propre conviction, à déterminer sa propre voie, en se basant sur l’écriture et en se laissant guider par l’Esprit. Le « docteur » ne devra pas s’enfermer dans sa tour d’ivoire et rendre les textes inspirés inaccessibles aux non-initiés, mais il devra au contraire faciliter l'accès de ces textes à celui qui est moins bien préparé (1).

Un philosophe chrétien a dit : « La réforme n'est pas arrivée à se constituer dans l'unité, même un seul instant. La liberté des interprétations individuelles l'a brisée et tend à la fractionner toujours plus en une multitude indéfinie de dénominations. Les disputes, d'abord violentes, ont fini par se calmer ; les Églises protestantes se reconnaissent les unes les autres, elles essaient même de se confédérer.

 

1 (l) Il faudrait en premier lieu une Concordance française, où tous les textes de la Bible seraient groupés d'après les mots grecs. Il faudrait ensuite un lexique où le sens de ces mots serait donné d'après leur usage dans le texte inspiré.

 

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Pour chacune d'elles c'est confesser clairement la possibilité d'entendre les textes autrement qu'elle ne fait, et comme le texte seul est infaillible, c'est reconnaître que sa propre doctrine n'est qu'une opinion sujette à l'erreur. C'est avouer soi-même, à la joie des papistes, qu'un texte infaillible sans un interprète infaillible ne donne aucune garantie d'unité ni de vérité. Et pourtant chaque secte n'a de raison d'être que l'opinion qu'elle représente, tout en la sachant douteuse. Elle est obligée de l'imposer à ses membres, elle ne saurait subsister qu'en limitant le libre examen auquel elle doit son origine : pour mieux dire, elle se compose uniquement des croyants que le libre examen a conduits à sa formation et qui désormais n'examinent plus. Si la congrégation n'écarte pas ceux qui se séparent de ses vues, elle n'est plus qu'un cadre vide, elle n'est plus rien ; de sorte que l'esprit de recherche, la préoccupation consciencieuse de la vérité parmi ses membres, sont incompatibles avec sa paix et mettent constamment en péril son existence. L'étude personnelle, indépendante, est un devoir pour le protestant, et s'il pratique ce devoir, il fait le désert autour de lui, rien n'est plus aisé que de s'en convaincre.

D'où vient que tant d'opinions, divergentes sur des points capitaux au jugement de chaque secte, se réclament également de l'Écriture, avec une égale bonne foi ? Ce fait, qu'on ne songe plus à contester nulle part, ne comporte qu'une explication ; mais si l'on accorde le fait, on n'en repoussera pas moins l'explication, parce que l'admettre serait abandonner le terrain où la Réforme s'était assise. La Bible n'est pas un livre, c'est un recueil. Nulle confession ne l'embrasse également tout entier, chaque parti se fonde sur certains textes qui parlent clairement dans son sens, et s'efforce avec plus ou moins de succès de ramener à la même doctrine ceux qui servent de base aux sentiments contraires. On oppose passage à passage, et si nul chrétien biblique ne peut avouer que l'un contre dise l'autre, la controverse prouve assez que souvent ils ont au moins l'air de se contredire, ce qui pratiquement est la même chose. Dès que la Bible est le seul fondement, la seule source et le seul juge, il n'y a pas à choisir en elle, il n'y a pas de versets plus importants les uns que les autres, il faut tout viser, tout mettre en oeuvre et l'on n'a pas même le droit de rester dans le doute sur un point dont la Bible a parlé.

 

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Aussi n'est-il point facile de se former une manière de voir véritablement biblique. Celles qui tiennent le plus à ce titre sont loin de le mériter. La théologie des réformateurs n'est point tirée de la Bible uniquement et sans secours étranger. Ils ont accepté le travail dogmatique de quinze siècles en abrogeant les décisions qui établissaient une autre autorité que l'Écriture ou qui de prime abord semblaient en contradiction avec celle-ci ; mais que tout ce qu'ils ont conservé de cet héritage soit, démontrable par les livres saints, que leurs systèmes religieux résument l'Écriture sainte, sans en rien laisser en arrière et sans y rien ajouter, c'est une prétention insoutenable » (2).

Il nous semble difficile de nier qu'il y a beaucoup de vérité dans ces lignes. Chaque Église, chaque secte a sa profession de foi qui, au début est le résultat d'un examen consciencieux, mais devient trop vite une clôture. À notre avis, tout le mal provient du fait qu'on trouve nécessaire de former des organisations qui prétendent constituer « l'Église ». Cette erreur découle de la notion fausse qu'il peut y avoir une Église visible dans la dispensation actuelle. Et cette notion a sa source dans l'erreur fondamentale que les « chrétiens » ont remplacé Israël.

On peut très bien se réunir, mais il ne faudrait pas qu'une restriction puisse empêcher une recherche continue de la vérité et une épuration constante de nos pauvres convictions ; l'unique restriction, sans laquelle nous tomberions dans un quelconque humanisme, devant être que seule la Parole inspirée peut nous servir de base certaine et seul le saint-esprit peut donner l’interprétation exacte. Il ne faut pas pour cela des inspirations, des révélations, des visions, des intuitions ; tout

ce qui est nécessaire c'est que nos facultés soient éclairées, que nous puissions nous en servir pleinement et sincèrement.

 

2 (2) La Philosophie de la Liberté, par Ch. Secrétan, tome II, p. 34. Nous sommes loin d'accepter toutes les idées de ce philosophe, qui doute de l'inspiration intégrale des Écritures et propose le dilemme suivant : « La Réforme abjure et se soumet à la tradition ou bien la valeur et l'autorité de la Bible elle même sont remises au jugement individuel. » Il tend à s'en référer à, une inspiration individuelle tout en faisant usage des « débris des constructions écroulées ». Nous préférons dépendre des Écritures et être des protestants conséquents, même si cette attitude fait le vide autour de nous. Nous ne saurions, dans un âge dont Satan est le dieu, chercher le succès.

 

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Certaines Églises disent franchement qu'il faut accepter leur enseignement sans discuter et sans comprendre. D'autres ne le disent pas, mais excluent celui qui pense autrement, sans faire un effort sérieux pour le comprendre. Il n'est que trop vrai qu'un protestant conséquent fait le désert autour de lui. L'Apôtre Paul a été le premier à l'éprouver. L'unité qu'on cherche à établir n'a pas pour base la vérité ; elle ne se fait le plus souvent qu'en la sacrifiant.

La Bible est en effet un recueil, et l'erreur est de ne considérer qu'une partie de ce recueil, de ne pas l'embrasser dans son ensemble. Toute contradiction apparente, toute difficulté dans l'interprétation sont une preuve d'une erreur ou d'un défaut dans le système d'interprétation. Il ne faut pas alors s'enfermer dans, son erreur et s'acharner à défendre sa conception, mais réviser l'interprétation qu'on avait jusque-là professée. Chaque Église ou secte détient une part de vérité. Il est vain d'opposer vérité à vérité ; il faut les réunir et éliminer ce qui est erreur. Surtout ne pas éliminer la vérité pour réunir les erreurs.

Nous avons fait un effort pour mieux embrasser le recueil inspiré dans son ensemble. La distinction des éons, des sphères et des dispensations nous ont permis d'éviter des contradictions et des difficultés et d'accepter à la lettre ce que Dieu nous dit. Mais nous ne prétendons pas être arrivés à la perfection. Nous restons, donc toujours chercheur et invitons à la recherche. Cette attitude est peu appréciée, car on pense qu'elle est incompatible avec une foi solide. Or, rien n'est plus faux. Avons-nous moins de foi en Dieu, dans l’oeuvre de Son Fils, dans l'inspiration de la Parole, dans la nécessité de la nouvelle naissance, de la nouvelle création, de la justification, de la sanctification, de la perfection ? Au contraire. Ces notions fondamentales restent, s'étendent et s'emparent de nous d'autant plus qu'elles s'enchaînent logiquement. La recherche touche en effet surtout à ce qui relie ces points et doit conduire à un ensemble que nous pouvons saisir par nos facultés sanctifiées. La recherche biblique peut sacrifier certaines habitudes, certaines notions sentimentales, certains rites. Mais cela ne touche pas la foi en ce qui est vrai et divin. La recherche met en danger toute « religion » humaine ; mais n'est-ce pas un bien ?

 

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On nous objecte que la grande majorité n'a ni les facultés, ni le temps nécessaire pour un examen personnel. Notre réponse est que chacun doit examiner selon ses conditions particulières. La pratique montre que des personnes n'ayant que peu d'instruction peuvent, de fait, étudier et comprendre les questions les plus profondes. La plus grande partie de notre instruction est de peu d'utilité pour un pareil examen ; ce qu'il faut avant tout c'est la soif de la vérité. Le manque de connaissance n'est donc pas le plus grand obstacle, car il peut être vite comblé : c'est la tiédeur envers les choses divines qui nous arrête le plus souvent. Certaines connaissances acquises par l'étude peuvent même rendre impossible une vision correcte de la vérité.

Quant au manque de temps, ce n'est très souvent qu'une excuse. Dire qu'on n'a pas le temps pour une chose, c'est dire qu'on préfère utiliser son temps pour une autre chose. Or combien de temps ne gaspillons-nous pas à des choses de moindre importance ! Pour toute chose, il faut un effort soutenu : la culture d'un jardin, l'éducation d'un enfant, l'entretien de notre santé, etc. Et la connaissance des choses divines devrait nous être donnée sans effort ? La Parole de Dieu nous dit tout autre chose : « Si tu la poursuis (la sagesse) comme un trésor, alors tu comprendras la crainte de l'Éternel et tu trouveras la connaissance de Dieu » (Prov. 2 : 4-5). Les Israélites n'obtenaient pas le pain tout cuit dans le désert, mais ils devaient se lever tôt pour ramasser la manne, la broyer, la piler, la cuire. Et cela tous les jours. Il faut « acheter » la vérité (Prov. 23 : 23). Les Écritures sont avant tout utiles pour enseigner (2 Tim. 3 : 16) (3). Il n'est pas difficile de se rendre compte combien d'efforts sont dépensés pour quelque plaisir futile ou pour quelque gain. Le fait qu'on dit ne pas avoir le temps pour lire et comprendre ce que notre Père nous écrit est une preuve du peu d'intérêt qu'Il nous inspire. Il serait bon qu'on le reconnaisse franchement au lieu de présenter une excuse.

 

3 (3) Nous ne voulons pas un examen purement intellectuel, mais une étude spirituelle n'exclut pas l'intelligence : Il faut un équilibre. C'est aux humbles que Dieu enseigne Sa voie (Ps. 25 : 9).

 

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Est-il bien utile de dire que nous ne voulons pas détruire, mais construire ? Dieu peut dans sa magnanimité utiliser ce qui est partiellement vrai et bon et ce serait donc une grande erreur de vouloir renverser ce qui n'est pas parfait. Que resterait-il ? Tout a une certaine utilité et peut amener à ce qui est mieux. On a dit de certaines professions qu'elles sont bonnes, pourvu qu'on en sorte. C'est exactement ce que nous disons de tout ce qui existe dans ce monde. Ne l'abolissons pas, mais sortons-en et aidons les autres à en sortir. Le danger universel est de se laisser enfermer dans un cercle qui nous empêche de progresser vers la vérité, la liberté, la gloire. Tout peut concourir au bien, pourvu que nous ne nous laissions pas retenir et immobiliser à jamais par ce qui nous a fait du bien.

Notre conception des sphères de bénédiction nous permet de sympathiser avec tout homme et de lui venir en aide avec le message qui lui convient. Nous ne devons pas le considérer comme un réprouvé ou un hérétique, mais comme un homme qui a besoin de plus d'amour et de vérité. Nous pourrons partout reconnaître la part de bien qui s'y trouve.

Tendons donc à un seul but : la glorification de notre Père ; par un seul moyen : la communion avec la Parole vivante et la Parole écrite ; par une seule puissance : celle de l'Esprit.

 

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Appendices

 

APPENDICE I

 

Autre et différent

 

 

Plus nous nous rendrons compte exactement des paroles qui ont été choisies par le Saint-Esprit et plus l'Écriture vivra et agira en nous. Nous en donnerons un exemple simple en distinguant entre deux mots grecs « allos » et « heteros ». Une bonne Concordance indique à tous, sans qu'il soit nécessaire de savoir le grec, les textes où l'un ou l'autre de ces mots est employé. Ces textes indiqueront la signification exacte de ces mots. Nous n'avons donc recours à aucune « autorité » humaine, nous laissons parler les Écritures.

À titre d'exemple nous donnons les textes suivants :

 

Mat. 5 : 39. « Si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l'autre (allos). » - Qui pourrait mieux nous définir le sens de ce mot « allos » ? C'est une chose « autre », mais de la même espèce.

Mat. 27 : 42. « Il a sauvé les autres (allos), et il ne peut se sauver lui-même. » - Voilà où le mot « allos » (c'est-à-dire autre, mais de la même espèce) nous indique que l'erreur fondamentale des sacrificateurs, scribes et anciens était de classer le Fils de Dieu dans la même espèce que les pécheurs.

Luc 5 : 29. « Beaucoup de publicains et d'autres (allos) personnes. » - Ceci définit ces personnes : elles étaient de la même espèce que les publicains, donc des pécheurs. Au verset 30, nous trouvons la confirmation : « les publicains et les gens de mauvaise vie » (grec - pécheurs).

Jean 5 : 32. « Il y en a un autre (allos) qui rend témoignage de moi. » - Cet autre est le Père d'après le v. 37. On voit l'importance capitale de la signification précise du mot « autre ». Si nous n'attachons pas l'importance nécessaire aux paroles inspirées, nous risquons de voir en Jésus un homme, peut-être excellent, mais non pas un être de la même espèce que le Père, c'est-à-dire Dieu.

 

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Jean 10 : 16. « J'ai encore d'autres (allos) brebis, qui ne sont pas de cette bergerie. » - Il ne faut pas perdre de vue qu'en ce temps le Seigneur avait dit : « Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël » (Mat. 15 : 24) et : « n'allez pas vers les païens... allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d'Israël » (Mat. 10 : 5, 6). Il fallait d'abord rassasier les « enfants », c'est-à-dire les Juifs (Marc 7

27). Les gentils seraient bénis après, par le peuple élu. Or il y avait en premier lieu les Juifs de Jérusalem et puis ceux de la dispersion. Quand Il s'adresse à ceux de Jérusalem (« cette bergerie »), Il fait remarquer qu'il y a encore d'autres brebis (ceux de la dispersion), qui ne sont pas de cette bergerie. Le mot « autre » indique des brebis de la même espèce, c à d des Juifs, des « enfants ». Il n'est pas encore question des gentils. Ceux-ci auraient été désignés par le mot « heteros » (d'une espèce différente), que nous examinerons plus loin. La distinction entre Juifs et gentils, illustrée par l'histoire de la femme cananéenne (Marc 7 : 25-28), était trop grande à cette époque pour qu'il fut permis de désigner les gentils par : « les autres brebis ».

Jean 14 : 16. « Il vous donnera un autre (allos) consolateur. » - Le croyant le plus simple peut trouver ici une preuve que le Saint-Esprit est une Personne divine et une confirmation de la divinité de Jésus-Christ. Si le Saint-Esprit n'était qu'une puissance, le Seigneur n'aurait pas pu employer le mot « allos », c'est-à-dire « un autre de la même espèce ».

 

Il nous semble que ces quelques exemples montrent d'une part l'importance d'une connaissance précise des paroles inspirées et d'autre part la simplicité d'un examen de ce genre où la seule autorité est la Parole de Dieu.

Nous continuons par une série de textes, qui emploient le mot « heteros » et qui feront encore mieux ressortir la nécessité de distinguer.

 

Mat. Il : 3. « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre (heteros) ? » - Jean n'avait plus la certitude que Jésus était le Christ. S'Il n'était pas l'Oint, Il n'était qu'un homme né dans le péché et ils devaient encore attendre, non un « allos », c'est-à-dire un autre de la même espèce, mais Celui qui serait différent de tout homme.

Luc 17 : 34. « L'une sera prise et l'autre (heteros) laissée. » - Il s'agit bien là de personnes différentes, l'une est née de nouveau, l'autre pas.

Luc 23 : 40. « Mais l'autre (heretos) le reprenait ».

 

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- Un des malfaiteurs croyait en Christ et était donc un homme différent essentiellement de l'autre.

Jean 19 : 37. « Et ailleurs l'Écriture dit encore. » - Le texte grec dit : « une Écriture différente (heteros) dit. » Nous avons ici deux citations. La première : « aucun de ses os ne sera brisé » venait de s'accomplir. La deuxième : « Ils verront celui qu'ils ont percé » ne l'est pas encore. Ces deux Écritures sont donc d'espèce différente.

Actes 1 : 20. « Qu'un autre (heteros) prenne sa charge. » - Matthias devait remplacer Judas. Matthias était « allos » par rapport aux Onze, mais « heteros » par rapport à Judas.

Actes 7 : 18. « Jusqu'à ce que parut un autre (heteros) roi. » - Non seulement ce nouveau roi d'Égypte ne connaissait pas Joseph, mais il était d'une autre race que les rois précédents. Les Hyksos furent dépourvues de leur pouvoir au profit d'un véritable Égyptien. Nous avons ici dans le choix du mot heteros, un important indice historique, qui explique l'attitude différente à l'égard des Juifs. Déjà alors, un nationalisme outré conduisait à la persécution d'Israël.

Rom. 7 : 23. « Une autre (heteros) loi. ». - Il y a contraste entre la loi divine et la loi, différente, du péché.

Gal. 1 : 6, 7. « que vous passez... à un évangile différent (heteros), qui n'en est pas un autre (allos). » Darby a traduit fidèlement ce passage. Il y a beaucoup de bonnes nouvelles (évangiles) dans les Écritures, mais toutes ont une origine divine et sont dans ce sens de la même espèce. Ici, il s'agit d'un évangile différent, d'origine humaine ou satanique.

Jac. 2 : 25. « Elle les fit partir par un autre (heteros) chemin. » - Ils étaient entrés par la porte, mais sortirent par la fenêtre ! (Jos. 2 : 15). Le chemin était donc bien différent.

Jud. 7. « Étant allés après une autre (heteros) chair. » - Darby traduit ceci plus fidèlement que d'autres, mais aurait dû écrire : « différente chair ». Il s'agit ici des anges qui n'ont pas gardé leur dignité, mais qui ont abandonné leur propre demeure. Ils s'étaient incarnés dans une chair différente de celle des hommes. Voir Gen. 6 : 2 et les conséquences aux versets 4 à 7.

 

Nous terminons ici cette étude. On se rendra compte que les Écritures commencent à vivre et peuvent nous nourrir et nous réjouir quand nous gardons les saines paroles. D'autres études aussi simples permettront à tout croyant d'obtenir des renseignements précis et importants, directement de la Parole de Dieu.

 

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APPENDICE II

 

Né de l'Esprit, rempli de l'Esprit, accompli par l'Esprit

 

 

Dans une intention louable, on a distingué entre « avoir l'Esprit » et « la plénitude de l'Esprit ». On a dit p. ex. que tous les convertis ont reçu l'Esprit, tandis que la plénitude ne vient que quand le croyant s'abandonne entièrement au Seigneur. En somme on fait là une distinction entre les deux premières sphères. Celui qui est né « d'en haut » est né de l'Esprit et l'Esprit peut agir en lui. Mais le don de l'Esprit n'habite, c à d. ne réside d'une manière continue, que dans celui qui est mort avec Christ et qui est justifié.

Nous ne donnons ici qu'un rapide aperçu de la question et commençons par faire observer qu'il faut avant tout s'habituer à distinguer entre le Saint-Esprit, la Personne divine, et « esprit » ou même « saint-esprit », le don, la puissance. D'après Actes 1 : 4 les Apôtres devaient attendre à Jérusalem ce que le Père avait promis (1). Luc 24 : 49 dit ce que c'est : « la puissance d'en haut » et cela correspond d'après Actes 1 - 5 au baptême dans l'esprit saint. Nous lisons donc dans Actes 1 - 8 : « Mais vous recevrez une puissance, le saint-esprit survenant sur vous. » Le jour de la Pentecôte cette promesse est accomplie et nous lisons : « ils furent tous remplis de saint-esprit » c à d. de la puissance, comme nous le verrons encore mieux plus loin.

En ce temps cette puissance se traduisait extérieurement par des effets sensibles. Ainsi on lit : « ils furent tous remplis de saint-esprit et se mirent à parler en d'autres langues... » (Actes 2 : 4). Ils parlaient des merveilles de Dieu (v. 11). « Ils furent tous rempli de saint-esprit et ils annonçaient la parole de Dieu avec assurance » (Actes 4 : 31). On voit par là qu'ils ne furent pas « remplis » une fois pour toutes, mais que cela arrivait quand c'était nécessaire, selon la volonté du Saint-Esprit. De même Actes 13 : 9 et d'autres textes montrent par la forme du verbe employé en grec, que cette plénitude était passagère et se répétait.

 

1 (1) Notons qu'il s'agit ici d'une ancienne promesse du Père à Israël (Voir p. ex. Joël 2 : 28 ; 3 : 2 ; Es. 44 : 3).

 

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Ce n'est pas encore là l'habitation du saint-esprit dans l'homme justifié.

Nous croyons utile, pour qu'on puisse mieux se rendre compte, de donner tous les textes où les mots « plèroô » (accomplir), « plèthô » (remplir) et « plèrès » (plein) sont employés en relation avec esprit, esprit-saint ou saint-esprit.

 

Plèroô (rendre plein-accomplir)

 

Eph. 5 : 18. Soyez, au contraire, accomplis en esprit (par l'Esprit) (2).

 

Plèthô (remplir)

 

Luc 1 15. Jean... sera rempli d'esprit saint.

Luc 1 41. Élisabeth... fut remplie d'esprit saint.

Luc 1 67. Zacharie, son père, fut rempli d'esprit saint.

Actes 2 4. Ils furent tous remplis d'esprit saint.

Actes 4 8. Pierre, rempli d'esprit saint.

Actes 4 31. Ils furent tous remplis du saint-esprit. Actes 9 17. Que tu (Paul) sois rempli d'esprit saint. Actes 13 9. Paul, rempli d'esprit saint.

Actes 13 52. Les disciples étaient remplis de joie let d'esprit saint.

 

Plèrès (plein),

 

Luc 4 : 1. Jésus, plein d'esprit saint.

Actes 6 3. Sept hommes... qui soient pleins d'esprit. Actes 6 5. Etienne, homme plein de foi et d'esprit saint.

Actes 7 55. Etienne, plein d'esprit saint.

Actes 11 : 24. Barnabas... plein d'esprit saint et de foi.

 

On remarquera immédiatement qu'Eph. 5 : 18 se distingue des autres textes : d'abord par l'usage de « plèroô », ensuite parce que c'est le seul cas où le datif est utilisé, tous les autres textes se servant du génitif. Que l'on ne perde pas de vue que c'est aussi le seul texte qui date d'après les Actes. Nous l'examinerons de plus près ci-dessous.

Le génitif indique que ces personnes sont remplies de quelque chose, tandis que le datif indique qu'ils sont remplis (ou plutôt « accomplis » en Eph. 5 : 18 ; voir aussi Col. 2 : 10, Darby) par quelqu'un (c.-à-d. ici le Saint-Esprit, la Personne divine).

 

2 (2) On peut traduire « en esprit »,ou « par l'Esprit ». La préposition « en » se traduit souvent « par » (Mat. 9 : 34 ; 17 : 21 ; Gal. 3 : 11, etc.). L'article, quoique ne figurant pas dans le texte grec, peut être latent après la préposition.

 

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Il est nécessaire de distinguer la nouvelle naissance (une action de l'Esprit) qui n'a lieu qu'une fois, de la plénitude de l'esprit qui était donnée au moment voulu et à plusieurs reprises afin d'accomplir certaines choses visibles. Mais ces deux actions de l'Esprit ne concernent que la sphère terrestre (3).

Le Saint-Esprit peut encore agir de manière différente. D'abord il n'y a pas nécessairement un effet visible, comme pendant la période des Actes, quand le Royaume était encore en vue. Et puis, nous lisons dans les textes où Paul s'adresse à ceux qui sont « en Christ-Jésus » et font partie de la nouvelle création, des expressions telles que : « l'Esprit de Dieu habite en vous » (Rom. 8 : 9, 11 ; 1 Cor. 3 : 16) ; « ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu sont fils (non pas : enfants) de Dieu » (Rom. 8 : 14). Dans cette sphère céleste, cette nouvelle création, il y a une communion plus intime avec Dieu et une action permanente (quoique pas nécessairement sensible) du Saint-Esprit. Ceci est possible parce qu'ils ne sont plus pécheurs, étant morts par rapport au péché et à l'ancienne humanité. Cette action permanente n'existe pas à la Pentecôte qui concerne Israël et l'ancienne création.

Mais en Eph. nous dépassons même la sphère céleste et Eph. 5 : 18 dit une chose entièrement différente des autres textes. Ici c'est le Saint-Esprit qui rend parfait ou accompli. Nous avons en effet de nombreux textes qui mentionnent encore cette action : « En sorte que vous soyez accomplis (plèroô), jusqu'à toute la plénitude (plèrôma) de Dieu », Eph. 3 : 19. Voir aussi Eph. 1:23; 4: 10; Phil. 1: 11; 2:2; 4: 18-19; Col. 1 : 9, 25 ; 2 : 10 ; 4 : 17, etc. Le but est : « l'état d'homme parfait, à la mesure de la stature de la plénitude (plèrôma) du Christ », Eph. 4 : 13. Il faut être accompli (plèroô) en Lui, Col. 2 : 10.

Dans chaque position : enfant, fils, homme parfait, dans chaque sphère, on est invité à marcher d'une manière digne de sa vocation selon la capacité que Dieu a donnée à cet effet. Il faut donc dans chaque cas, quant à la marche journalière, s'abandonner entièrement à Dieu afin d'atteindre la plénitude de grâce correspondant à cette sphère.

 

3 (3) Les textes cités montrent qu'on pouvait aussi être « rempli du saint-esprit " avant la Pentecôte et nous croyons que cette action spéciale correspond à celle qu'éprouvèrent les prophètes et d'autres dans l’A. T.

 

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Voir ainsi p. ex. dans 1 Pi. 2 et 3 les exhortations de Pierre aux Juifs dispersés, nés de nouveau (1 Pi. 1 : 23). Voir p. ex. aussi comment Paul demande aux « fils » de se regarder comme morts au péché (Rom. 6 : 11), mais de se donner eux-mêmes à Dieu (v. 13). Voir enfin comment Paul, après les Actes, exhorte aussi ceux de la sphère sur céleste à marcher d'une manière digne de leur vocation (Eph. 4 : 1 et Col. 3).

 

 

 

APPENDICE III

 

Les Épîtres de Paul

 

 

Il est intéressant pour notre sujet, de distinguer entre les épîtres de Paul écrites pendant et celles qui sont écrites après la période des actes. Le groupement suivant a été accepté par la grande majorité des théologiens :

 

Épîtres que Paul a écrites pendant la période des Actes

Romains

1 et 2 Corinthiens

Galates

1 et 2 Thessaloniciens

 

Épîtres que Paul a écrites après Actes 28 :29

Éphésiens

Philippiens

Colossiens

2 Timothée

Philémon.

 

On n'est pas d'accord sur l'ordre dans lequel les épîtres de chaque groupe ont été écrites, excepté pour ce qui concerne 2 Timothée, qui est la dernière en date. Les dates de 1 Tim. et de Tite sont incertaines. Nous pouvons très bien laisser ces deux épîtres de côté, lors d'un premier examen. Il est en effet important d'omettre au début tout ce qui n'est pas certain. Si l'on accepte les conclusions générales de notre examen, le contenu des autres épîtres ne constituera plus une difficulté importante (1).

 

1 (1) Si nous négligeons la critique moderne, l'épître de Jacques est considérée, habituellement, comme étant une des premières en date. L'Évangile selon Jean est sans doute écrit après le temps des Actes, mais il ne fait que rendre fidèlement le passé. L'Apocalypse est aussi de composition tardive, mais ne concerne que ce qui est encore maintenant dans l'avenir.

 

 

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Comme certains théologiens des temps actuels ont une tendance à croire que les épîtres aux Eph. Col. et celle à Philémon ont été écrites en prison à Césarée et non à Rome, nous examinerons sommairement leurs arguments.

Le Dictionnaire Encyclopédique de la Bible, rédigé sous le signe général du modernisme, donne les arguments suivants, au chapitre « Colossiens » :

Les arguments sérieux paraissent être :

a) la mention, en Col. 4 : 10, des trois seuls collaborateurs juifs de Paul, alors que, d'après Rom. 16, il en avait davantage à Rome ;

b) la différence entre le groupe Col., Philémon., Eph., et Philipp. vraisemblablement composée à Rome ;

c) la mention par Tacite d'un grand tremblement de terre dans la région colossienne en 60-61, et le silence à ce sujet de Col., Philém., Eph. qui seraient donc antérieures à cet événement ;

d) le vide de trois ou quatre ans dans l'activité épistolaire de Paul, d'après l'hypothèse romaine.

 

La réponse à ces arguments est bien simple.

a) Col. 4 : 10 et 11 nous informe en effet qu'Aristarque, Marc et Jésus étaient les seuls qui travaillaient avec Paul tandis que Rom. 16 mentionne un grand nombre de collaborateurs. Il n'y a pas ici une question de lieu, mais de temps. À Rome, aussi bien qu'ailleurs, l'attitude des chrétiens vis-à-vis de Paul a changé. Depuis qu'il parle dans ces épîtres aux Eph., Phil., Col. du grand mystère caché de tout temps, on l'abandonne (Voir Phil. 2 : 21 ; 2 Tim. 1 : 15 et ce que nous avons dit de cette question ci-dessus). Il n'est donc pas étonnant qu'il n'y ait que trois fidèles à Rome après le temps des Actes. On se rend compte que cet argument tombe complètement dès qu'on voit la différence radicale entre le temps des Actes et la période actuelle.

Col. 4 : 11 est au contraire un argument en faveur de Rome, car s'il s'agissait de Césarée, on ne voit pas pourquoi Philippe ne serait pas mentionné. Cet évangéliste venait de recevoir Paul avant sa captivité à Césarée (Act. 21 : 8-10).

 

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b) On fait remarquer qu'il y a une différence entre le groupe Col., Philémon, Eph. et l'Épître Aux Philippiens. Mais pourquoi cela serait-il une indication que ces trois premières ont été écrites en un endroit ou un temps différent ? Il y a d'ailleurs entre Phil. et Eph. Col. 2 Tim. une correspondance d'idées et de style remarquable, qui sont en faveur de l'opinion qu'elles ont été écrites approximativement en même temps. Voir aussi le tableau p. 62.

c) L'argument du tremblement de terre est peut-être d'importance pour ceux qui considèrent l'Écriture comme un document non entièrement inspiré par Dieu. Peut-on sérieusement s'attendre, en des épîtres de cette valeur, atteignant la perfection, que mention soit faite d'un événement terrestre sans rapport direct avec le sujet ? Et si ce tremblement de terre a eu lieu, qu'est-ce qui empêche que Paul, s'il l'a jugé à propos, ait écrit à ce sujet dans d'autres lettres (non-inspirées) ? Enfin on est d'accord que l'Épître Aux Philippiens a été écrite à Rome. Or elle non plus ne dit rien de ce tremblement de terre.

d) Le vide de trois ou quatre ans dans l'activité épistolaire (tout au moins en ce qui concerne les épîtres inspirées) s'explique très bien du fait du changement radical de dispensation. N'y a-t-il pas un vide de ce genre entre le chemin de Damas et l'activité de Paul pendant son premier ministère ? (Voir Gal. 1 : 18).

En résumé il semble qu'il ne reste aucun argument en faveur de Césarée. Voyons maintenant ce qui est en faveur de Rome.

Pour Phil. on ne peut pas hésiter. Paul dit en Phil. 4 : 22 : « Tous les saints vous saluent, et principalement ceux de la maison de César. » Ceci indique Rome. Il en est de même de Phil. 1 : 13 : « Dans tout le prétoire. »

En Phil. 1 : 26 et 2 : 24 il parle de son retour auprès des Philippiens. Or à Césarée, il n'avait aucune raison pour s'exprimer ainsi. Il venait d'aller à Jérusalem et voulait visiter Rome. Étant arrêté, il en appelle à César afin d'aller à Rome. Nous verrons encore plus loin qu'il n'est ici nullement question de la Macédoine.

À Césarée il était enchaîné (Act. 26 : 29) et même si on lui laissa un peu de liberté et qu'on n'empêcha aucun des siens de lui rendre service (Act. 24 : 23), ceci n'était pas comparable à son état à Rome. Là, il avait une demeure particulière (Act. 28 : 16, 30) et il prêchait en toute liberté et sans obstacle (Act. 28 : 31).

 

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L'impression que donnent les épîtres aux Phil. et Col. sous ce rapport est nettement en faveur de Rome.

L'épître à Philémon est aussi en faveur de Rome. Il est bien plus naturel qu'un esclave (Onésime) se soit enfui vers la grande capitale, que vers un centre peu important comme Césarée. Au verset 22 Paul demande à Philémon de lui préparer un logement à Colosse. Or, comme nous l'avons déjà dit, Paul n'avait aucune intention d'aller en Asie Mineure quand il était à Césarée. En quittant Milet, il avait même dit aux anciens d'Éphèse : « Je sais que vous ne verrez plus mon visage. » (Act. 20 : 25).

Le grand théologien anglais Lighfoot a examiné en détail dans quel ordre les épîtres aux Eph., Phil. et Col. ont été écrites et le résultat de son étude est que celle aux Phil. doit être la première en date. Comme il est certain que cette épître a été écrite durant la captivité à Rome, les autres ne peuvent donc pas avoir été composées à Césarée.

Il est aussi assez caractéristique que tous les chrétiens ayant la plus grande vénération pour la Parole inspirée sont unanimes à accepter Rome.

Notre étude concernant le contenu de ces épîtres, confirme qu'elles sont nettement différentes de celles écrites pendant la période des Actes et montre qu'il est tout à fait impossible qu'elles aient été écrites de Césarée.

 

 

APPENDICE IV

 

Les Sur célestes

 

Le mot grec pour « ciel » est « Ouranos », l'adjectif « céleste » est « ouranios ». Paul parle du troisième ciel (2 Cor. 12 : 2) et le pluriel « cieux » est employé plus souvent que le singulier « ciel ». On doit donc distinguer entre plusieurs cieux.

Nous mentionnons en premier lieu le ciel atmosphérique, le ciel bleu, la « voûte » d'azur. L'impression qu'il nous donne est en effet celle d'une voûte et il est intéressant de faire observer que, si certains « esprits forts » se sont moqués de cette conception, la science confirme qu'à une dizaine de kilomètres au-dessus de la terre commence une couche diffusante, qui exerce une action plus grande sur la lumière bleue du soleil, dont la longueur d'onde est plus petite que celle des autres couleurs intenses.

 

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Au-dessus de l'observateur, il y a donc littéralement une voûte bleue gazeuse à une hauteur d'environ 10 kilomètres. Cette couche est la limite de la stratosphère, qui comprend encore une couche ozonée et des couches ionisées, parmi lesquelles les fameuses couches d'Heaviside et d'Appleton, qui semblent jouer un si grand rôle dans la propagation des ondes radio-électriques courtes.

La Parole mentionne aussi un mi-ciel en Apoc. 8 : 13 ; 14 : 6 ; 19 : 17 (mèsouranèma). Il ne faut pas voir là le « milieu du ciel » atmosphérique du fait qu'il est question d'un « aigle » et d' « oiseaux » qui « volent » dans ce ciel. En effet, cet aigle et ces oiseaux sont des êtres spirituels. L'aigle parle et prophétise, un ange parle aux oiseaux. Ce ne sont donc pas des animaux. Apoc. 14 : 6 dit d'ailleurs qu'un ange volait dans ce mi-ciel. Comme dans toute prophétie et vision spirituelle, il faut distinguer entre deux significations du mot littéral. L'aigle n'est pas littéralement un aigle, mais bien littéralement un être appelé « aigle ». Il faut prendre les faits littéralement, dans le sens qu'ils se produiront un jour, mais il faut se souvenir que les choses qui dépassent notre sphère terrestre doivent nécessairement être exprimées à l'aide de nos mots courants. Il ne s'agit donc pas dans tout ceci, de vagues symboles, mais de réalités encore plus réelles que celles que nous connaissons.

L'Ancien Testament parle des cieux et des « cieux des cieux » (p. ex. Deut. 10 : 14 ; 1 Rois 8 : 27 ; Néh. 9 : 6). L'expression « cieux des cieux », distincte de « cieux », indique une « région » plus élevée, mais qui appartient encore à la création (Néh. 9 : 6). Les cieux des cieux aussi bien que les cieux ont leur « armée », c.-à-d. des multitudes d'êtres. On se rappelle que ces armées, conduites par le Seigneur, sont souvent mentionnées dans les Écritures.

Nous voyons ainsi trois régions dans les cieux : le ciel atmosphérique, le ciel interplanétaire (et interstellaire) et le ciel du ciel. C'est sans doute jusqu'à ce troisième ciel que Paul a été ravi (2 Cor. 12 : 2).

Mais ni la terre, ni les cieux, ni les cieux des cieux, ne peuvent « contenir » Dieu (1 Rois 8 : 27). Tout ce que nous avons mentionné jusqu'à présent appartient en effet à la création (Néh. 9 : 6) et Dieu est en dehors de toute création.

 

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Les expressions « au-dessus de tous les cieux » (Eph. 4 : 10) ; « qui a traversé les cieux » (Héb. 4 : 14) et « plus élevé que les cieux » (Héb. 7 : 26) ne doivent donc pas nous étonner. Il y a nécessairement une « région » qui dépasse la création.

Quoi de plus approprié alors qu'une expression spéciale pour cette sphère ? Or le N. T. utilise 19 fois l'adjectif « epouranios », formé de la préposition « épi » (sur) et de « ouranios » (céleste). Dans la plupart des cas, ce mot indique qu'une chose est d'origine sur-céleste, mais dans cinq cas il est clair qu'il s'agit de la présence de quelqu'un dans cette sphère. On trouve alors l'expression : « en tois epouraniois » c à d. « dans les sur célestes » (Eph. 1 : 3, 20 ; 2 : 6 ; 3 : 10 ; 6 : 12).

Quand on examine ces questions, une série de problèmes se posent. D'abord, si donc Dieu est au-dessus de tout, comment Mat. 5 : 16 et Col. 4 : 1 disent-ils qu'Il est dans les cieux ? Quelles que soient nos idées sur les cieux, nous avons ici une de ces « contradictions » que la critique aime à relever. Or ces « contradictions » sont toujours très utiles pour montrer notre faiblesse, l'étroitesse de nos idées et la divinité de la Parole. Nous pourrions répondre que « cieux » est une expression qui a une signification générale et peut indiquer tout ce qui est en contraste avec la terre. Le mot cieux peut ainsi comprendre toutes les « régions » dont nous avons parlé, de même que l'expression « les saints » peut comprendre tout le tabernacle, divisé en parvis, lieu saint et saint des saints. Du point de vue de la terre tous les cieux se confondent. Ce n'est que quand on s'élève qu'on peut bien distinguer. Il en est de même d'un paysage lointain où tout est confus et où les maisons, les routes, les arbres, etc., ne se distinguent que quand on approche. Quand on se place donc au point de vue terrestre, le mot « cieux » peut indiquer tout ce qui est au-dessus de la terre et il n'y a alors nulle contradiction entre « dans les cieux » et « au-dessus des cieux ».

Ce qui précède est une explication suffisante, mais on peut aller plus loin en faisant un effort pour ne pas rester dans les chaînes matérialistes. Dieu est au-dessus de la création, mais cela veut-il dire qu'il faut L'exclure de la création ? Il est évident que non. Des phénomènes physiques pourront nous faciliter la compréhension de cette thèse.

 

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On a dû considérer l'existence d'un « éther » qui s'étend partout, même dans le vide, même dans les corps matériels. Ainsi, là où il y a de la matière, il y a aussi de l'éther. Les phénomènes électromagnétiques, comme les ondes de T. S. F., se propagent dans l'éther, mais ne sont pas nécessairement gênés par la matière. Ces « ondes » sont dans l'éther, mais si une portion de cet éther est occupée par un corps matériel mauvais conducteur de l'électricité, ces ondes seront aussi dans ce corps. Par rapport à l'espace, les ondes se trouvent à la fois dans les deux ; selon leur nature, elles ne se manifestent que dans l'éther. Ces ondes sont (selon leur nature) au-dessus de la matière, quoique (par rapport à l'espace) elles peuvent se trouver dans la matière. Il y a pénétration. Nous croyons que d'une manière analogue les sphères célestes pénètrent la sphère terrestre et que la sphère sur céleste pénètre le tout. Les anges, qui d'après leur nature appartiennent à la sphère céleste, peuvent très bien apparaître sur terre, tout en restant dans leur sphère (1). Quand le Seigneur se présentait sous forme humaine devant Abraham p. ex., Il restait dans les cieux selon Sa nature, quoique se trouvant sur terre par rapport à l'espace. De même le Fils de l'homme est à la fois « descendu du ciel », et « dans le ciel » (Jean 3 : 13).

Pour qui donc n'est pas limité par des idées étroitement matérialistes, il n'y a nulle contradiction si d'une part on dit que certains êtres sont sur terre et que d'autre part, ces mêmes êtres sont au-dessus de la terre.

Il est bien entendu qu'en considérant les « sur célestes », il devient difficile d'employer des mots adaptés à ce qui est terrestre. L'idée d'espace, de lieu, d'endroit n'est, strictement parlant, plus applicable parce qu'il s'agit ici de ce qui dépasse la création, donc aussi l'espace et le temps. Mais nous pouvons cependant bien concevoir que cette sphère sur céleste pénètre tout, que Dieu peut être partout et pourtant au-dessus de tout. Il est partout dans le sens spatial et absolu, et au-dessus de tout d'après son essence.

Dire que Dieu, ou un ange, est sur terre, ne veut pas encore dire que nous le voyons.

 

1 (1) Ils peuvent aussi « quitter » leur sphère en passant d'une manière définitive à la sphère terrestre. C'est ce qui s'est produit avec certains d'entre eux (Jud. 6). il y a là non seulement changement de lieu, mais changement de nature.

 

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Tant qu'un être d'une sphère supérieure ne réagit pas sur la sphère inférieure, les organes de cette sphère inférieure ne peuvent évidemment rien enregistrer. De même nous ne voyons ni ne sentons les ondes électromagnétiques, même quand elles traversent notre corps. Pour qu'il y ait une impression, il faut une réaction d'une sphère sur l'autre. Pour devenir visible, il faut donc que l'ange se « manifeste ». En général on voit que les êtres des sphères inférieures ne peuvent avoir connaissance des sphères supérieures que de deux manières : ou bien un être de la sphère supérieure communique avec la sphère inférieure et, quand il s'agit de Dieu, il y a révélation, ou bien un être de la sphère inférieure est élevé, par une action spéciale, dans la sphère supérieure et il y a vision en esprit.

Il est bon d'examiner de plus près la signification de « au-dessus » dans Eph. 4 : 10. Le grec a ici « huperanô », ce qui veut dire littéralement : « au-dessus en haut ». Nous rencontrons ce mot encore en Eph. 1 : 21 et Héb. 9 : 5. Or ce dernier texte nous permet de mieux comprendre la signification, parce que les choses spirituelles sont ici représentées matériellement. Au-dessus (huperanô) de l'arche se trouvent les chérubins. Si on considère l'arche en général, les chérubins en font partie. Examine-t-on les détails, alors on distingue p. ex. le coffre, le couvercle et les chérubins. Ex. 25 : 21 dit ainsi : « tu mettras le propitiatoire sur l'arche. » Dans un sens, le propitiatoire fait partie de l'arche, dans un autre sens, il est au-dessus. D'une manière analogue les sur célestes peuvent, dans un sens, faire partie des cieux et, dans un autre sens, se trouver au-dessus.

Mais on a objecté que dans « huperanô pantôn tôn ouranôn » l'expression « des cieux » est au génitif et que « au-dessus de tous les cieux » n'indiquerait donc pas des régions au-dessus des cieux, mais les régions supérieures des cieux. Or cela est vrai quand on prend ici « cieux » dans son sens général, mais croit que ceci veut dire que le Seigneur n'a pas dépassé les cieux. c'est d'abord se mettre en contradiction avec Héb. 7 : 26 et c'est aussi limiter Dieu aux cieux, puisque Eph. 1 : 20 dit que le Christ est assis à Sa droite. Si ce génitif nous forçait vraiment à accepter ce sens, on pourrait encore comprendre que ce verset pût gêner un peu notre manière de voir, mais il n'en est rien. N'importe qui peut s'en convaincre par la Parole même.

 

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Nous avons en effet en Mat. 5 : 14 une expression qui se rapproche beaucoup d' « huperanô », savoir « epanô », et qui est également utilisée avec le génitif. Or « sur une montagne » ne veut certainement pas dire qu'il s'agit de la région supérieure de la montagne. Comme « huper » est « au-dessus », tandis que « épi » n'est que « sur », « huperanô » indique encore bien plus une chose supérieure que « epanô ».

Mais pourquoi le texte inspiré a-t-il « sur célestes » et non « sur cieux » ? Le grec use souvent d'ellipses et dans le cas présent il faut ajouter un mot, dont « sur célestes » est l'adjectif. Or comment parler de ce qui est au-dessus des cieux ? Ce ne sont plus des « cieux », ni des « espaces », ni des « régions » puisqu'on dépasse la création, l'espace et le temps. Nous avons parfois mis « sphères », mais le, mieux n'est-il pas de garder l'ellipse et de dire « sur célestes » sans préciser ?

On a parfois prétendu que « en tois epouraniois » (dans les sur célestes) devait être lu : « parmi les (êtres) sur célestes » parce que la préposition « en » se lit souvent « parmi » quand il s'agit de plusieurs personnes. Mais on peut répondre que quand il s'agit d'un emplacement, le sens de « en », même au pluriel, reste toujours « dans » (voir p. ex. Mat. 6 : 2 ; 8 : 32). La préposition ne permet donc pas de conclure s'il faut compléter l'ellipse par « êtres » ou « lieux ». Il nous semble qu'Eph. 1 - 20, 21 doit décider ici : « en le faisant asseoir à sa droite dans les sur célestes, au-dessus de toute domination... » « Dans les sur célestes » ne peut pas vouloir dire « parmi les êtres sur célestes » puisque la suite dit justement « au-dessus de toute domination » et que ces " dominations, etc. » sont des êtres sur célestes d'après Eph. 3 - 10.

Le verset Eph. 1 - 20 rapproché de 3 : 10, nous indique aussi que la « droite de Dieu » est encore un « lieu » spécial parmi les « sur célestes », puisque Dieu et le Seigneur Jésus-Christ sont à la fois dans les sur célestes et au-dessus des êtres qui se trouvent dans les sur célestes.

Nous ne mentionnons qu'en passant que d'aucuns ont prétendu qu'il fallait comprendre par « sur célestes » les êtres qui se trouvent sur les planètes ou étoiles. Ils arrivent alors à l'absurdité que Jésus-Christ -est « parmi » les êtres qui habitent les corps célestes et, que là aussi se trouve le trône de Dieu.

 

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APPENDICE V

 

 

L'Église qui est le Corps de Christ est-elle l'Épouse ?

 

 

Avant tout, il faut observer que Paul n'emploie jamais l'expression « épouse » et que « Épouse de Christ » ne se trouve pas dans les Écritures. Celles-ci parlent de « l'épouse, la femme de l'agneau » (Apoc. 21 : 9). Il est vrai que l'Agneau est Christ, mais seulement en relation avec la sphère terrestre et Son humiliation. Le mariage est aussi une chose terrestre (en Christ il n'y a ni homme ni femme) et est peu approprié pour symboliser une relation céleste et encore moins une unité sur céleste.

Dans l’A. T. Israël est souvent désigné comme « femme », « épouse » et « fiancée ». Voir p. ex. Es. 54 : 6 ; 62 : 5. Cette femme s'est détournée de l'Éternel (Jér. 3 ; Os. 2 ; Ezéch. 16). Mais Il l'invite à retourner (Jér. 3 ; Os. 2) et elle sera accueillie (Es. 54 : 1-8 ; Jér. 3 : 12-22). Ceux d'Israël qui se repentent et se tournent vers Christ forment donc l'Épouse et existaient déjà au temps des Évangiles (Mat. 9 : 15 ; Jean 3 : 29). Ce n'était certes pas un mystère, comme l'Église dont parle Paul après les Actes.

À la Pentecôte nous voyons que le groupe qu'on peut appeler « l'Épouse » se développe : il était constitué exclusivement de Juifs-chrétiens. C'est pendant le Royaume que les noces de l'Agneau ont lieu (Apoc. 19 : 7), l'Épouse étant maintenant au complet par la repentance nationale d'Israël.

Le mot « épouse » est au sens strict applicable seulement pendant la noce. Après le Royaume, l'Épouse est « femme » (Apoc. 21 : 9).

Mais on peut s'imaginer qu'il y a une difficulté. Comment celle qui ne sera littéralement l'Épouse que dans l'avenir, est-elle déjà appelée femme dans le passé ? La solution est aisée quand on sait que d'après la Loi, la fiancée était déjà comptée comme « femme ». Ceci est indiqué p. ex. par Mat. 1 : 18 et 20, où Marie, qui n'est que fiancée, est appelée la femme de Joseph.

Mais malgré tout on s'en réfère à Eph. 5 pour dire que l'Église est l'Épouse.

 

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Or là non plus Paul n'utilise pas le terme « épouse ». Il parle d'une femme et d'un mari, après leur mariage. Comment ceci peut-il être en rapport avec l'Épouse et l'Époux dont le mariage doit encore venir ? Au contraire Christ est ici représenté comme Chef de l'Église du mystère. Cette Église est son Corps et non son Épouse. Le mari doit aimer sa femme comme son propre corps. Ces deux ne sont donc pas un seul corps, quoique étant « une seule chair ». Tout ce que Paul fait, c'est d'évoquer l'identification de Christ et de l'Église du mystère, pour la donner en exemple à l'homme et à la femme dans le mariage. La perfection est donnée comme exemple à ce qui est imparfait. Mais ceci ne permet pas de retourner les choses et de dire que l'union de Christ avec l'Église est donc du même genre que celle qui est entre l'homme et la femme et encore moins de déduire de ce passage que l'Église du mystère est l'Épouse de Christ.

La relation entre Christ et l'Église du mystère était cachée de tout temps en Dieu, jusqu'à la fin des Actes et ne peut être exprimée par quelque chose qui était connue depuis Adam. L'identification avec Christ est d'un tout autre ordre que l'union entre femme et homme et cette dernière ne peut d'aucune manière être utilisée pour représenter la première.

Nous pourrions comprendre qu'on dise que l'Église est l'Épouse, si l'on entend par là l'Église de la Pentecôte. Mais ceci exclut alors totalement les Gentils, comme nous croyons l'avoir montré dans Le Plan Divin, cette assemblée de croyants n'a rien à voir avec l'Église dont parle Paul dans ses dernières épîtres.

Si nous avons insisté quelque peu sur cette question, c'est que l'expression « Épouse » contribue à confondre ce qui doit être distingué. Cette idée nous est aussi venue des premiers siècles alors qu'on croyait que « l'Église » chrétienne s'était substituée à Israël. Si cela avait été vrai, on aurait pu dire que cette Église était l'Épouse.

 

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APPENDICE VI

 

 

Peut-on juger de la valeur d'un message

d'après le nombre de conversions obtenues ?

 

 

Il n'est pas rare d'entendre dire que la suprême épreuve d'un message est le nombre de conversions qu'il produit. Il est vrai qu'on ne saurait surestimer l'importance de la conversion, mais avant de prendre le nombre de conversions comme indice de la valeur d'un enseignement, il faudrait pouvoir donner une réponse satisfaisante aux observations suivantes :

1. Il n'est pas facile pour nous de distinguer une vraie conversion d'un mouvement produit par l'enthousiasme ou la sentimentalité, ou même par de basses pensées. Il faudrait donc observer les « convertis » pendant quelque temps au moins, et corroborer les statistiques initiales par des statistiques révisées établies parfois des années plus tard.

2. Un message non scripturaire peut apporter la conversion. Dans ce cas, le message ne peut pourtant pas manquer d'avoir en même temps (comme tout ce qui s'écarte de la vérité) une action néfaste. Comment apprécier l'étendue de cette action ? Elle peut, par les conséquences ultérieures qui nous échappent, devenir considérable.

3. Les tribulations peuvent apporter la repentance. Est-ce à dire que ces tribulations sont bonnes en elles-mêmes ?

4. Il y a une chose encore plus importante que la conversion : c'est la glorification de Dieu. Si notre but principal est de glorifier Dieu, nous devons nous demander avant tout si ce que nous disons et faisons est scripturaire, car ce qui est scripturaire seulement peut aboutir à la gloire de Dieu. Ainsi le critérium ne sera pas le nombre de conversions obtenues, mais la fidélité scrupuleuse de la prédication à la Parole. Si notre but est essentiellement la conversion des pécheurs, nous risquons souvent d'être moins attentifs à ce critérium souverain.

 

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Si on répond que la conversion glorifie Dieu et que celui qui a pour but la conversion a donc aussi pour but la glorification de Dieu, nous répliquerons que des conversions peuvent résulter de choses qui ne sont pas scripturaires et qu'un message très insuffisamment scripturaire peut même être utilisé par Dieu pour amener la conversion. C'est malgré l'imperfection du message que Dieu a alors provoqué un bon résultat. On peut ajouter qu'il est telles « conversions » sensationnelles qui ont introduit au milieu des vrais chrétiens des éléments dont la présence y a causé par la suite le scandale. Si on est d'accord pour admettre que le but suprême doit être la glorification de Dieu, pourquoi ne pas s'en tenir à ce but ? Des conversions immédiates ou ultérieures en résulteront d'une bien plus grande certitude, et nous éviterons les conséquences fâcheuses de ce qui n'est pas strictement scripturaire.

5. Il y a plus. Souvent un examen approfondi de la Parole, et seul un tel examen permet d'être scripturaire, est négligé ou même repoussé sous prétexte que le « simple évangile » suffit pour convertir. Or s'il est vrai qu'un message simple doit être présenté aux débutants, encore faut-il qu'il soit scripturaire et à cette fin celui qui le délivre doit en connaître un peu plus, donc avoir examiné plus. Ensuite d'autres ont besoin de messages plus complets et ceux qui parlent d'un « simple évangile » généralement ne s'en contentent pas en pratique, mais vont plus loin.

En résumé il arrive trop souvent que l'on néglige l'étude des Écritures prétextant que la conversion « des âmes » est plus importante. Ainsi on court le risque de ne pas être scripturaire et de sacrifier la gloire de Dieu.

6. Personne ne peut prétendre être absolument dans la vérité. Si Dieu donne des bénédictions, c'est donc malgré ce qui est anti-scripturaire. Dieu peut bénir quand cette attitude non conforme à Sa volonté est excusable. Ainsi, pour prendre un cas extrême, un homme qui devient conscient de sa nouvelle naissance, mais qui est encore peu instruit dans la vérité, peut dans l'enthousiasme du moment dire beaucoup de sottises. Mais le Saint-Esprit peut néanmoins utiliser ce message. Tout autre serait le cas d'un prédicateur qui dirait la même chose. Il serait responsable de beaucoup d'expressions anti-scripturaires et ne pourrait pas se justifier en disant que Dieu a cependant béni ce message chez l'autre.

 

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Quand l'attention est attirée sur certaines erreurs, on se contente trop souvent de répondre que tant de grands et saints prédicateurs ont proclamé ces choses, que leur message a été béni et qu'on veut se tenir à cela. On trouve inutile de réexaminer la Parole et on se base sur une « autorité », tout comme le fait l'Église Romaine. Or il se peut très bien que ce message ait été béni malgré ce qu'il avait d'anti-scripturaire. Ces saints prédicateurs peuvent s'être mal exprimés sans le savoir, ils pouvaient être excusables. Mais celui auquel on propose de réexaminer la question parce qu'on est persuadé, après une sérieuse étude spirituelle, qu'elle est anti-scripturaire et qui refuse de faire une tentative d'examen personnel n'est plus excusable (1). Il croit une chose parce que Calvin, Luther, Moody, Spurgeon, Wesley, Darby, Bullinger ou un autre l'ont cru. Il a l'esprit catholique-romain contre lequel les réformateurs se sont élevés.

Toute foi qui se base sur une autorité humaine, qui n'est pas personnelle, est vaine. L'examen continuel, des Écritures, sous la conduite du Saint-Esprit, reste toujours nécessaire pour glorifier Dieu et pour amener chaque créature à son but.

7. Mais ce sont là simples raisonnements, dira-t-on. Soit. Mais il y a aussi des faits et nous n'en toucherons qu'un seul en posant la question : Ose-t-on appliquer à l'Apôtre Paul ce principe que la valeur d'un message, ou sa conformité à la volonté divine, doit être jugée d'après le nombre de convertis ? Il se peut que pendant la période des Actes le résultat de cette application semble parfois confirmer le principe, mais plus tard ? A-t-on été frappé par ce fait formidable que si, pendant les Actes, « tous ceux qui habitaient l'Asie entendirent la parole du Seigneur » (Actes 19 : 10) par l'intermédiaire de Paul, nous lisons qu'après cette période Paul dit : « tous ceux qui sont en Asie m'ont abandonné. » (2 Tim. 1 : 15) ?

 

1 (1) On peut, à ce sujet, se rappeler ce que Calvin disait dans son « Epistre au Roy de France » : « Davantage il falloit considérer ce que dit sainct Cyprien en quelque passage, assavoir que ceux qui faillent par ignorance, combien qu'ils ne soyent pas du tout sans coulpe, toutefois peuvent sembler aucunement excusables, mais que ceux qui avec obstination rejettent la vérité, quand elle leur est offerte par la grâce de Dieu, ne peuvent prétendre aucune excuse. »

 

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Si nous devons donc juger Paul d'après ce principe, nous devons conclure que l'enseignement qu'il a donné après les Actes était non seulement de peu de valeur, parce qu'il n'avait pas fait de nouveaux convertis, mais qu'il était même dangereux parce qu'il égarait ceux qui avaient déjà été convertis. Or quel était cet enseignement ? Celui des épîtres aux Éphésiens, aux Philippiens et aux Colossiens, qui constitue de l'aveu unanime, le message le plus élevé, le plus spirituel de la Bible tout entière.

Il nous semble donc que la conclusion est nette : Jamais on ne peut juger de la valeur d'un message par le nombre de convertis. Toujours il faut, avant tout, se demander si ce qu'on fait et ce qu'on dit est scripturaire et glorifie Dieu. La Parole inspirée doit être le seul critère réel parce que c'est Dieu même qui a parlé par ce moyen. Et ces Écritures devront être soumises à une étude approfondie et personnelle par tous, mais surtout par ceux qui veulent enseigner.

De toute manière, il est bon de ne pas trop considérer les hommes, ni même leur conversion. La gloire de Dieu prime tout, et si Dieu est glorifié par ce que nous faisons, nous avons atteint le but. Dans ce cas, le petit nombre de conversions ne doit pas nous étonner : nous sommes dans un âge « mauvais » (Gal. 1 : 4), dont Satan est le « dieu » (2 Cor. 4 : 4). En général ce sont les enseignements non scripturaires (pouvant avoir toutes les apparences d'un message de lumière) qui ont le plus de succès dans le siècle présent. Dieu se tait parce qu'Il a tout dit dans les Écritures. Ne cherchons donc pas d'encouragements venant des hommes, des résultats de notre travail, de nos expériences. Seule la Parole est un guide sûr, au sein de ce qui est visible. Ne cherchons pas de preuves de la bénédiction divine dans ce que nous voyons ou sentons, mais seulement dans ce que nous ne voyons pas : la foi scripturaire, la communion avec Dieu, la proximité du Seigneur et l'action du Saint-Esprit.

Quelqu'un nous demandera peut-être si la parole du Seigneur : « Car on reconnaît l'arbre à son fruit » n'a aucune valeur pour nous ; notre réponse sera fort aisée. Nous y attachons au contraire la plus grande importance, comme à toute la Parole. Appliquons-la donc au christianisme officiel. Quels sont les fruits depuis 1.900 ans ? Nous entendons par là, comme notre interlocuteur supposé, les fruits visibles. Ce fruit, c'est le désordre mondial. Si c'est par cette parole qu'il faut contrôler la valeur du christianisme officiel, le résultat lui est donc fatal.

 

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Voyons maintenant l'application à Paul. Comme fruit visible il y a peu de chose et ceci nous montre de suite que tout fruit n'est pas nécessairement visible. Les enseignements de Paul ne porteront que peu de fruits visibles pendant le mauvais éon présent, mais les résultats réels dépasseront de loin ceux des autres messages. N'arrive-t-il pas trop souvent qu'on sacrifie l'avenir au profit de quelques résultats immédiats ?

La parole citée pouvait cependant être comprise dans le sens de fruits visibles. Mais il ne faut pas oublier, comme le fait le christianisme officiel, que ces paroles avaient surtout en vue les conditions terrestres du Royaume. À l'époque actuelle l'arbre sera aussi connu par le fruit, mais gardons-nous de ne faire attention qu'à ce qui est visible pour nous et à ce que nous croyons être bons. Ce n'est pas à nous d'estimer le fruit parce que nous ne saurions le faire actuellement. Mais ce que nous pouvons et devons faire, c'est être scripturaires. Alors les conséquences sont entièrement entre les mains de Dieu et il y aura certainement des fruits abondants et de bons fruits.

 

 

APPENDICE VII

 

 

La Pâque et la Messe

 

 

S'il y a une tradition liturgique ancienne, c'est bien celle de la messe. Les écrits des premiers siècles font souvent allusion à cette cérémonie (1), qui a le caractère d'un sacrifice. Les plus anciens documents ne donnent pas de détails parce qu'on prenait soin de cacher le plus possible aux non-baptisés ces rites considérés comme sacrés. Mais des allusions montrent que cette cérémonie était connue et observée par les croyants. Dans les documents moins anciens, plus de détails sont donnés, et s'il est vrai que la liturgie n'est pas partout identique, les nombreux points communs montrent qu'il y a une source commune, qui, par la tradition verbale, a donné lieu à quelques variantes.

 

1 (1) Voir p. ex. The Early Eucharist par W. B. Frankland, qui cite beaucoup de passages.

 

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Ce qui prouve surtout l'ancienneté de la cérémonie, c'est sa ressemblance (même sous sa forme moderne) avec la Pâque juive et le repas du sabbat. On y trouve les mêmes chants, les mêmes prières, les mêmes lectures, les mêmes allusions à la création, à la sortie d'Égypte et aux faits glorieux d'Israël (2). Nous avons d'ailleurs déjà vu que les chrétiens d'Asie gardèrent même longtemps le 14 Nissan pour célébrer la Pâque et prétendaient avoir reçu des Apôtres cette ancienne tradition. En résumé, il est indéniable que la masse des premiers chrétiens n'a pas seulement observé un rituel sommaire, se limitant aux quelques détails mentionnés par les Écritures au sujet de la Pâque juive et de ce qu'avait fait et dit le Seigneur quand Il fêtait la Pâque pour la dernière fois avant l'arrivée du Royaume, mais qu'elle a suivi assez fidèlement le rituel juif.

Ces chrétiens essayaient d'être logiques. Ils prétendaient remplacer Israël, ou mieux encore, être le véritable Israël. Les « fêtes de l'Éternel » (Lev. 23), la Pâque, la fête des pains sans levain, la fête des prémices de la moisson, la fête des pains agités (Pentecôte), etc. devaient donc en principe être observées par « l'Église » (3). Ils ne pouvaient pas le faire servilement, mais ils essayaient d'en garder le plus possible. On « spiritualisa », on adapta aux conditions nouvelles et, petit à petit, les liturgies « chrétiennes » furent « standardisées ». Si après 19 siècles la célébration de la messe ressemble encore tant à celle d'une partie de la Pâque juive, il est certain que, tout au début, la ressemblance était encore bien plus grande.

Il est bon de faire remarquer ici que les juifs tenaient un repas cultuel le vendredi soir à l'ouverture du sabbat (4). La Mishnah donne des détails à ce sujet. On bénissait le pain et le vin, on disait des prières et on mangeait.

 

2 (2) Voir une étude du Dr. G. Bickell : Messe und Pascha (1872).

(3) Le célèbre théologien Ch. Hodge dit dans son Commentary on the Epistle to the Romans, p. 69 : " On ne peut manquer d'observer que la doctrine des Juifs a été transférée complètement dans la chrétienté par des ritualistes. »

(4) La relation entre la messe et le repas du sabbat a été examinée particulièrement par Drews (Realenzyklopädie fur protestantische Theologie. Article Eucharistie) et von der Goltz (Tischgebete und AbendmahIsgebete in der altchristlichen und in der griechischen Kirche. 1905).

 

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Une partie du pain était réservée pour la fin du repas quand le père de famille prononçait la grande bénédiction et faisait allusion à la venue du Messie. Les femmes, les enfants et les étrangers n'étaient pas admis à cette partie du repas. Le mot hébreu « amen » était prononcé.

Ce repas était un sommaire du repas pascal, mais ce dernier était beaucoup plus solennel.

Pour permettre au lecteur de mieux suivre les allusions du N. T. à certaines parties de la Pâque juive (Mat. 26 : 26-29 ; Marc 14 : 22-25 ; Luc 22 : 15-20 ; 1 Cor. 10 : 16 ; 11 : 20-26) nous donnons ci-dessous un sommaire du rituel juif (5).

 

Résumé du rituel de la Pâque, juive

 

On verse la première coupe.

Commencement de la fête (Kiddush).

Bénédictions.

On boit la première coupe.

On rompt le pain sans levain (Mazzoth) (6). On rend grâces et on mange un morceau trempé dans de la sauce.

On verse la seconde coupe.

L'histoire de la Pâque (Haggadah).

Bénédictions.

On boit la seconde coupe.

On rompt le pain sans levain. On rend grâces et on en mange un morceau trempé dans de la sauce.

....................................................................................................................................

Souper substantiel hors du rituel. On mange l'agneau pascal et du pain sans levain et on boit du vin.

.....................................................................................................................................

On verse la troisième coupe. La « coupe de bénédiction ». (Voir Luc 22 : 20 : « la coupe, après le souper » ; 1 Cor. 11 : 24 « après avoir soupé, Il prit la coupe » 1 Cor. 10 : 16

« la coupe de bénédiction »; 1 Cor. 11 25 : « cette coupe »).

Bénédictions et actions de grâce (Voir Mat. 26 : 27 ; Marc 14 : 23 « après avoir rendu grâces »).

On boit la troisième coupe (Voir Mat. 26 : 28 ; Marc 14 : 23 : « buvez-en tous »).

On verse la quatrième coupe.

Chant de louange (Hallel - Ps. 115-118).

Bénédictions et actions de grâce.

On boit la quatrième coupe.

 

5 (5) Voir par ex. la Mishnah, le Dictionnaire de la Bible de Don Calmet, ainsi que d'autres livres spéciaux.

(6) L'expression « rompre le pain » indiquait un repas quelconque chez les Juifs (voir p. ex. Mat. 14 : 19). Les Arabes parlent de « manger du sel , les Anglais de « prendre le thé », nous disons en France « casser la croûte » pour indiquer par euphémisme un repas ; il ne faut rien voir de plus dans l'expression « rompre le pain ». Les Juifs rompaient souvent le pain pendant la cérémonie pascale. l'Église Romaine veut justifier les messes quotidiennes par des textes tels que Act. 2 : 46 et ils disent que le Seigneur a remplacé la prédication de la Parole, par la prédication de sa chair et de son sang dans la messe.

 

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La Pâque « chrétienne », la messe et la cène tirent leur origine des pratiques juives aux repas ordinaires, aux repas du sabbat et au repas pascal. Le N. T. nous donne des exemples de ces trois repas (7). Dans le repas du sabbat et dans celui de la Pâque, il y avait une partie profane et une partie plus réservée. La dernière surtout a été « christianisée » et est devenue la messe et la cène.

Ceux qui croient être le « véritable Israël » peuvent croire aussi que Paul s'adresse à eux en 1 Cor. 10 : 1-5 où il est question des « pères » qui ont traversé la mer rouge, puisque la mention de Rom. 9 : 4 : « A qui (c.-à-d. aux Israélites) appartiennent... les patriarches (même mot grec que « pères ») » ne les gêne pas. Le reste de 1 Cor. 10 et 11 peut donc aussi les concerner. Mais comment expliquer l'attitude de ceux qui se rendent compte qu'Israël a encore, comme nation, une mission à remplir, mais qui croient que la nouvelle alliance (1 Cor. 11 - 25) est conclue avec eux, alors que Jérémie dit clairement qu'elle concerne Israël et Juda (Jér. 31 : 31) ?

Nous devons reconnaître que les Églises romaines et anglicanes sont les plus « apostoliques » dans ce sens qu'elles sont les plus fidèles aux 12 Apôtres de la circoncision. Mais ainsi elles sont aussi les plus anti-scripturaires. Non pas parce qu'elles gardent ce qu'il y a de personnel dans ces enseignements (et qui concernent tout homme) mais en ce qu'elles veulent remplacer Israël comme nation et suivre les cérémonies juives.

La Réforme s'est rapprochée de Paul, mais en même temps a voulu conserver ce qui appartient à Israël ; de là une position difficile et instable.

 

7 (7) Pour le repas ordinaire, la " fraction du pain », voir Mat. 14 : 19 Act. 2 : 42, 46 ; 27 : 35. Pour le repas du sabbat, voir Act. 20 7, 11 et ne pas oublier que " le premier jour de la semaine " est littéralement « un des sabbats , (Voir Le Plan Divin, App. 5). Pour le repas pascal, voir Mat. 26 : 26, 27 ; Marc 14 : 22, 23 ; Luc 22 : 19, 20 ; 1 Cor. 10 : 16 ; 11 : 24, 25. On peut montrer que contrairement à l'opinion de certains, le Seigneur a fêté la Pâque le 14 Nissan, le jour même de sa crucifixion.

 

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APPENDICE VIII

 

 

La date de la Pâque

 

 

D'après Ex. 12 : 2 l'année devait commencer par le mois de Nissan et la Pâque tombait le 14 Nissan (Ex. 12 : 6 ; Lev. 23 : 5, etc.). En ce mois il fallait aussi apporter au sacrificateur une gerbe ; c'étaient les prémices de la moisson. Ce premier mois devait donc être choisi de telle sorte que ces prémices pussent être apportées au Temple. Or, en Palestine, la date de la moisson ne diffère pas beaucoup d'une année solaire à l'autre. D'autre part l'année étant divisée depuis longtemps en 12 mois lunaires, le premier mois venait un peu plus tôt chaque année. À un moment donné les prémices ne pouvaient donc plus de ce fait être offertes au moment voulu et il fallait alors recourir à l'intercalation d'un mois supplémentaire (1). Le 14 Nissan pouvait donc, dans l'année solaire, varier d'environ 30 jours.

Plus tard ont prit comme règle d'insérer un mois supplémentaire de telle manière que l'équinoxe du printemps tombait toujours avant la Pâque. Cependant ce mois n'était jamais inséré dans une année sabbatique.

Au I siècle, à part la controverse déjà signalée, il y en eut une autre entre ceux qui observaient la Pâque le 14 Nissan et d'autres qui préféraient le 15 (les quintodécimans). Cette controverse fit couler beaucoup de sang.

 

1 (1) Les indications divines pour les fêtes et les sabbats ne pouvaient être observées qu'en Palestine. Pour tout autre pays la différence en longitude, latitude, température et autres conditions climatiques devaient conduire à d'autres résultats. Ceci aussi indique que ces cérémonies n'étaient instituées que pour Israël et, de plus, pour être célébrées par ce peuple dans son pays.

 

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Le concile de Nicée décida en 325 que la fête pascale serait observée le dimanche, mais il restait à fixer quel dimanche. On choisit le dimanche après la pleine lune qui suit l'équinoxe d'hiver. Mais comme ce moment dépend de la longitude, il fallait aussi fixer l'endroit où cette observation devait se faire. On décida que cette date devait être calculée à Alexandrie et que l'évêque de cet endroit devait communiquer l'information à Rome. C'était une innovation, puisque d'après les Écritures ce jour devait être fixé en Palestine.

Plus tard, on a voulu fixer la date de la Pâque en se basant sur un cycle d'années. On a d'abord adopté un cycle de 8 ans, puis de 84 ans, puis de 532 ans, enfin de 19 ans. C'est ce dernier qui permet de fixer le « nombre d'or » et la « lettre dominicale ». Du fait de l'incertitude du jour exact, saint Augustin a pu dire qu'en 387 les Églises de la Gaule fêtaient la Pâque le 21 mars, celles d'Italie le 18 avril et celles d'Égypte le 25 avril. Une lettre de Léon le Grand nous apprend qu'en 455 il y avait une différence de 8 jours entre la Pâque de Rome et celle d'Alexandrie. Au VIIe siècle les Églises britanniques et celtiques suivaient encore le cycle de 84 ans. Comme elles refusaient absolument d'abandonner cette ancienne tradition pour le cycle de 532 ans, il y eut une controverse amère avec les latins. La Pâque était alors célébrée en Angleterre à deux dates différentes : un jour par les fidèles des Églises britanniques et l'autre par les membres des Églises latines.

La modification du calendrier en 1582 fut de nouveau la cause de divergences. Ce nouveau calendrier ne fut adopté en Grande-Bretagne et en Irlande qu'en 1752. Actuellement les Églises orientales ne suivent pas encore ce calendrier et leur jour de Pâque ne coïncide donc pas habituellement avec celui des Églises occidentales.

Les inconvénients d'une fête mobile ont depuis longtemps fait rechercher une combinaison qui placerait la date de la Pâque à un jour fixe, mais il n'est pas certain qu'on arrive à une solution avant la fin de l'âge présent.

Cet aperçu montre les conséquences d'institutions non scripturaires. Toute cérémonie instituée par Dieu est déterminée dès le début aussi bien en ce qui concerne la date qu'en ce qui touche la manière dont elle doit être observée.

 

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Jamais il n'y a eu évolution, ni discussion au sujet des « fêtes de l'Éternel » (2). Que l'on compare à cela la confusion, les conflits, les divisions produits par les différentes cérémonies « chrétiennes » et on sera fixé sur leur origine.

Nous n'avons aucune objection de principe contre une fête mobile, mais bien contre le fait que les manières de fixer les fêtes « chrétiennes » ont varié et ne sont pas données par Dieu.

 

 

APPENDICE IX

 

Quelques considérations éparses relatives

à « l'Église naissante »

 

 

Il faut convenir que l'Église Romaine est logique dans le raisonnement suivant :

1. « Des communautés visibles ne peuvent être régies que par une autorité vivante : une loi écrite ou traditionnelle ne peut pas ne pas enfanter de controverses, de discordes, de séparations » (1).

2. « Or la chrétienté s'est substituée à Israël... Il y a substitution d'un peuple à un autre dans le choix de Dieu, et la nouveauté historique est la création de ce peuple, dont l'unité est visible comme celle du judaïsme... » (2).

3. Donc : la chrétienté doit être régie par une autorité vivante.

Comme l'Église romaine est la seule qui présente une véritable unité, qui est universelle (catholique) et qui possède un chef visible exerçant l'autorité divine (?), il s'ensuivrait donc qu'elle serait la vraie Église et que nous devrions tous en faire partie et être soumis à son magistère.

L'erreur réside surtout dans la prémisse mineure de ce syllogisme : « Or la chrétienté s'est substituée à Israël. »

 

2 (2) Il est vrai qu'il y a eu des discussions entre ceux qui ne tenaient pas compte des prescriptions divines.

(1) BATTIFOL, P. 66 de l'Église Naissante. Le protestant Harnack doit admettre cela (Dogmengeschichte, tome I, p. 416).

(2) BATTIFOL D. 69.

 

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Le protestantisme a essayé, mais avec peu de succès, de résister à la prémisse majeure. Il a pratiquement admis la nécessité d'une autorité vivante. Quoiqu'il se trouve plus près de la vérité, sa position est affaiblie par son acceptation de la prémisse mineure. À part les petites réactions locales et l'influence de l'histoire encore un peu trop récente des temps de la Réformation, le courant général porte de toutes parts les milieux protestants vers le catholicisme, ou tout au moins vers une sorte de catholicisme. Tout le monde ou presque y convient qu'il faudrait constituer une unité et, du moment où l'on croit à une « Église » visible, il faut nécessairement donc que l'unité soit visible. D'autre part si on laisse à Israël sa mission terrestre et si l'on se garde de mettre l'Église à sa place, l'unité cesse d'être nécessairement visible dans le présent siècle mauvais.

L'erreur fondamentale de substituer l'Église à Israël a entraîné des difficultés innombrables. Nous serions alors en plein Royaume des cieux et Satan serait présentement lié 1... (Apoc. 20 : 2). Or Paul dit que l'âge présent est « mauvais » (Gal. 1 : 4) et que Satan est le dieu de cet âge (2 Cor. 4 : 4). Pierre ajoute qu'il rôde comme un lion rugissant (1 Pi. 5 : 8). Le nombre des non-chrétiens dépasse de loin celui des « chrétiens » et parmi ceux-ci un faible pourcentage, qui va plutôt diminuant, mérite réellement ce nom. Nous voyons, partout la guerre, la corruption, le péché. À part l'unité extérieure et de pure apparence de l'Église romaine, nous ne voyons que divisions dans cette chrétienté qui, soi-disant, formerait « l'Église visible ». Si l'état actuel était ce que les prophètes ont dit du Royaume messianique, on se demanderait ce que valent ces prophéties, et jusqu'à quel point on a le droit de « spiritualiser » aussi les enseignements de la Loi, du Seigneur et des Apôtres.

Et que devons-nous penser des Apôtres et des communautés de la première heure, qui tous attendaient le prochain retour du Christ ? Le Seigneur Lui-même ne s'est-Il pas trompé quand il parlait de son avènement prochain ? Comment expliquer ce long délai dans la venue en gloire et dans l'établissement du Royaume sur terre s'il n'y a pas une interruption nette dans l'accomplissement des prophéties à la fin des Actes, si le plan divin s'est développé régulièrement par la substitution de « l'Église » à Israël (3) ?

 

3 (3) Battifol résume dans l'Église Naissante, p. 174, quelques théories de A. Sabatier Les communautés chrétiennes de la première heure, - car dès la première heure le christianisme se forme en communautés, - sont individuées (sic) par une même foi au retour prochain du Christ, et cette foi obsédante leur ôte toute pensée d'établissement durable. Les communautés chrétiennes de la première heure, parce qu'elles vivent dans cette attente fébrile de la parousie, n'ont besoin d'aucune discipline. »

 

 

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Ceux qui veulent s'appuyer sur la tradition des premiers siècles, au surplus, ne doivent pas oublier qu'il n'y a pas une tradition, mais des traditions. Un exemple notable est celui, que nous avons déjà mentionné, de la controverse pascale. « Le malheur est que, dans le cas présent, il y a conflit entre deux usages authentiqués tous deux par une tradition apostolique. Qui l'emportera ? » (4). La tradition se développe, varie, s'accommode aux circonstances. Comment peut-il être question de chercher là un appui ?

Toute l'histoire de « l'Église » montre que le fait d'être martyr, de mener une vie exemplaire, d'être continent, d'être baptisé d'eau, de s'abstenir de viande, d'alcool, etc. ne prouve d'aucune manière que l'on est dans la vérité. Le marcionisme, le montanisme, le novationisme, le donatisme, etc. ont toujours été fiers d'avoir plus de martyrs que les autres, d'avoir des adeptes saints, continents, etc. Il en est de même de nos jours, où des groupes même antichrétiens observent parfois la plus haute moralité et sont des plus humanitaires. Il est vrai qu'un croyant sérieux doit avoir une marche impeccable, mais il est faux de conclure, d'une vie apparemment exemplaire, à la possession de la vérité.

Toute la théologie officielle protestante et catholique romaine est imprégnée de l'idée que « l'Église » est héritière de toutes les promesses d'Israël. De là des spéculations innombrables, des controverses sans fin, des problèmes multiples et souvent insolubles. Les hommes ont tellement embrouillé les choses que n'est pas théologien qui veut. La théologie est devenue un terrain inaccessible au profane, qui doit se borner à recevoir ce qu'on veut bien lui enseigner. Malheureusement il n'y a pas de concordance et la « foi » devient une affaire de clan. Alors qu'un examen des Écritures - prises à la lettre là où c'est possible - est relativement simple et peut être entrepris par le croyant lui-même, on est actuellement forcé de choisir d'abord une « autorité » (et sur quelle base ?), puis d'accepter servilement l'enseignement de cette autorité.

 

 (4) BATTIFOL, dans l'Église Naissante, p. 270.

 

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Pour des choses terrestres, d'une importance toute relative, il est convenable qu'on accepte cette manière de procéder ; mais quand il s'agit de notre être, de choses divines, aucune « autorité » autre que celle de Dieu ne peut être indispensable. Si les hommes peuvent servir d'instruments entre les mains de Dieu, jamais ils ne doivent avoir la prétention de se substituer à Lui et de rendre impossible une vérification personnelle. « Je vous parle comme à des hommes intelligents, disait l'apôtre Paul, jugez vous-mêmes de ce que je dis. » (1 Cor. 10 : 15).

Citons quelques difficultés prises au hasard. On voit Harnack se demander pourquoi Luc a perdu tout intérêt dans « l'activité missionnaire » de Pierre après Actes 12, alors qu'il lui semble que cette activité doit l'avoir rapproché de Paul (5).

Harnack reconnaît que Paul n'a pas admis qu'Israël était rejeté définitivement, mais il dit que ce point de vue lui est particulier (6). En général on a accepté cette réjection car si l'on maintient une seule promesse pour Israël, comment pourrait-on « spiritualiser » le reste et qui nous autoriserait à appliquer les autres promesses à un peuple étranger (7) ? Mais alors il faut rejeter toute interprétation littérale de l'A. T. et Israël n'aurait donc jamais été le vrai peuple élu ! C'est en effet à cette conclusion que beaucoup de chrétiens des premiers siècles ont été conduits. Mais ils admettaient que les patriarches, les prophètes et les autres hommes de Dieu étaient les précurseurs du « peuple » chrétien, qui existait alors à l'état latent (8) ! Harnack reconnaît que c'est là l'opinion unanime de tous les auteurs chrétiens de la période postapostolique et il ajoute qu'une injustice pareille de l'Église des Gentils par rapport aux Juifs est unique dans l'histoire : la Fille rejette la Mère après l'avoir dépouillée (9). Il pense cependant pouvoir accepter cette solution si elle est exprimée d'une manière un peu différente, c à d. que « l'Église » prend dans les « traditions » d'Israël ce qui est utilisable et spiritualise ou rejette le reste.

 

5 (5) Die Mission und Ausbreitung des Christentums, p. 43.

(6) Id., p. 46.

(7) Id., p. 47.

(8) Id., p. 49.

(9) Id., P. 50.

 

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C'est la transformation de la religion juive en une religion universelle. Il est regrettable qu'il n'explique pas comment Paul a résolu la difficulté. L'abandon de Paul est d'ailleurs un problème qu'à notre connaissance, on ne touche même pas.

Parlant de la libération des chrétiens du judaïsme, vers l'an 140, Harnack ajoute :

« Quarante ans après, Irénée pouvait considérer l'A. T. et sa religion d'une manière plus objective, car on ne se trouvait plus alors gêné par le judaïsme dans la possession de l'A. T. Irénée pouvait de nouveau admettre que l'observation littérale de l'A. T. était juste et selon la volonté de Dieu dans l'ancien temps. Les Pères qui lui succédèrent allèrent encore plus loin et dans un sens se rapprochèrent ainsi de Paul. Mais dans un autre sens, ils s'écartaient simultanément de lui, et si possible encore plus que les générations précédentes, parce qu'ils comprenaient encore moins son opposition à la Loi et qu'ils avaient à défendre l’A. T. contre les Gnostiques. Ils acceptaient facilement le sens littéral de l'A. T. non seulement parce qu'ils ne craignaient plus le judaïsme, mais surtout à cause de leur sympathie pour les lois et les cérémonies de FA. T. » (10).

La dogmatique des siècles succédant aux deux premiers commençait à dépasser l'A. T., mais la vie courante de l'Église n'en était pas affectée. Nous voyons encore aujourd'hui l'opposition criante qui existe entre une grande partie de la théologie biblique et la pratique courante et cela plus encore dans l'Église romaine que dans le Protestantisme. L'accommodation est allée si loin que d'un pays à l'autre cette Église présente les aspects les plus divers. Cette inconséquence est possible du fait que rares sont ceux qui pensent, surtout quand il s'agit de « religion ». Il semble que, dans ce domaine, on est prêt à accepter n'importe quoi. Autant cependant une foi « aveugle » en ce que Dieu dit dans Sa Parole est justifiée et logique, et glorifie Dieu, autant une crédulité aveugle est un scandale qui appelle nécessairement des réactions, parfois même violentes comme celles que nous voyons actuellement en Russie.

Nous citerons encore le cas du grand théologien anglais Lightfoot, qui, dans son introduction à l'épître aux Colossiens, se demande comment il est possible que trois siècles après la rédaction de cette épître, il était encore nécessaire au Concile de Laodicée (363 ?) d'anathématiser ceux qui observaient le sabbat.

 

10 (10) Id., p. 51.

 

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Or si l'on a suivi attentivement notre examen, cela n'est nullement étonnant. On voulait s'approprier toutes les promesses d'Israël, mais on n'était pas encore entièrement arrivé à se les assimiler et quelques-uns tenaient, comme dans la controverse pascale, à suivre les choses plus à la lettre que les autres. Même au IVe siècle l'existence de ceux qui fêtaient la Pâque le 14 Nissan et que l'on appelait les « Quartodecimans » (11) est historique (12). Et n'avons-nous pas encore de nos jours les « Sabbatistes » qui portent avec une surprenante constance le poids de la tradition des premiers siècles et ne peuvent pas se résoudre à « spiritualiser » ?

 

11 (11) En latin 14 est , quartodece ».

(12) Mosheim, Hist. Christ. Saec. 2, § 71.

 

 

 

 

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